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par Hida Koan » 08 févr. 2006, 18:11
Aux esprits mystérieux
Dans la grande rue se bousculent paysans en visite à la ville et serviteurs affairés. L’échoppe de Yoshida montre encore shoji clos. Des femmes de tous âges se pressent déjà à la devanture : une vieille femme tient bien serré une plaquette en bois gravée de kanji mystiques, deux jeunes femmes bavassent un peu fort et rient aux éclats, d’autres se tiennent en retrait, comme à l’écart et un peu honteuses d’être là. Beaucoup ont en main un petit papier gribouillé de lignes rayées ou non, certainement des listes de courses à faire pour leur maîtresse. Une belle jeune fille parait perdue dans ses pensées, elle compte les perles d’un fin bracelet de bois qu’elle porte au poignet.
Lorsque le auvent s’ouvre et que Yoshida place les bâtons de bois pour le tenir ouvert, les femmes piaffent d’impatience. Les plus empressées se précipitent à l’intérieur pour observer les étals.
La boutique est petite et enfumée, des serpentins d’encens brûlent dans chaque coin de la pièce. Nombres de petites plaquettes de bois pendent du plafond, y sont inscrites des formules apaisantes, des imprécations ou simplement des locutions du tao. Certaines semblent être destinées à augmenter la fertilité, d’autres repoussent les mauvais esprits, les plus encombrantes situées en stock impressionnant près de la porte sont sensées apporter richesse et gloire à leur possesseurs.
Le marchand possède une quantité énorme de netsuke de toute forme et de toute matière disposés dans des paniers d’osier à même le sol. Les plus jolis sont exposés sur des étagères bien en vue des potentielles acheteuses… Car il faut dire ce qui est peu d’hommes entrent dans cette boutique.
Les bâtonnets d’encens sont triés par parfum, et donc par but à atteindre. « Prends celui-ci » peut-on entendre chuchoter parfois « sa fumée réveillera ton ivrogne de mari et lui donnera des pensées… utiles. » « Avec celui-là, je peux arranger mes rhumatismes c’est ça ? ». Yoshida comprit bien vite tout l’intérêt de ces bouffonneries de femmes, car qui vient acheter une cargaison d’encens pour autel part toujours avec au moins un petit bâtonnet au propriétés soit disant magique.
On trouve aussi tout un étalage d’herbes aux pouvoirs étranges : dormir plus, dormir moins, faire des rêves prémonitoires, faire pousser les cheveux plus vite, etc. Autant de possibilités d’extorquer de l’argent aux pauvres hères qui passeraient par ici… Ou leur rendrent un fier service qui sait ?
Le produit typique, qui se vend bien, ce sont les fuurin : les carillons qui empêchent les mauvais esprits de rentrer dans les demeures, à mettre près de la porte d’entrée ou alors accroché au coin du toit. Beaucoup de rokugani en ont un chez eux, et c’est un cadeau facile à trouver et bon marché.
Tout ce qu’esprit peut concevoir en terme d’objet magique folklorique se trouve « Aux mystérieux esprits », chez le fringant Yoshida. C’est un homme d’une quarantaine d’années, à la mine joviale mais aux yeux profonds. Il tient le magasin depuis quelques années maintenant, il a repris la suite d’un vieil homme malingre et peu aimable… « Depuis les affaires spirituelles marchent mieux dans le quartier » déclareront les soupçonneux. L’affaire de Yoshida fonctionne en effet très bien, beaucoup de clientes sont satisfaites, à tort ou à raison, et le clament haut et fort. La boutique désemplie rarement, et Yoshida vit de mieux en mieux, au grand damne de certains qui le jalousent ouvertement. Depuis peu le marchand à même embauché, il répètera à qui mieux mieux que c’est sa grand-mère mais on peut être sûrs que c’est bien une embauche en bonne et dûe forme qui a amené la vieille Yaeko à travailler pour lui. Quoiqu’il en soit depuis que le nouveau service est en place, encore plus de clients affluent et parfois même des samurai… C’est à la mode l’onychomancie…
Dans le fond de la pièce, derrière un rideau de perles aux propriétés mystiques protectrices (évidemment ça ne marche pas on est d’accord, mais on est chez Yoshida après tout) a été aménagé il y a peu ce que tout le quartier appelle maintenant communément l’Antre de la Vieille Yaeko. Il n’y a pas d’encens ici, la pièce est aussi claire que possible et une porte dans un coin de la pièce donne sur la petite cour derrière le magasin. La vieille Yaeko parait centenaire, elle a autant de rides qu’un pruneau sec et autant de dents qu’un canard. Elle est très bien habillée, même trop bien pour son âge et son apparence décrépie, c’est tellement paradoxalement laid que c’en est choquant. Pourtant Yaeko parait sympathique, elle ne parle pas très fort et entend très bien. Elle a les yeux pétillants d’intelligence, c’est d’ailleurs bien la seule chose pétillante qu’on peut déceler sur elle…
Quand vous entrez dans la pièce, la vieille femme vous invite du regard à vous asseoir. Tout près du rideau de perles, un petit panier en osier contient quelques piécettes et un petit écriteau : un bu la consultation. Quand vous vous asseyez, Yaeko prend un pilon et un mortier en pierre, elle y met une minuscule branche de bois sec et laborieusement y met le feu. Si vous proposez de l’aider, elle refusera assurément. Les minutes passent, le petit bois craque et fume dans le mortier… Et Yaeko vous regarde dans les yeux. Si vous avez de la chance, elle vous fera la conversation, elle sait plein de choses sur plein de sujets. Cependant elle essaiera de vous soutirer des informations personnelles (informations qui lui serviront ensuite à affiner ses divinations). Si c’est un mauvais jour pour Yaeko, elle ne vous dira rien et vous rongerez votre frein pendant un moment. Une fois la combustion terminée la vieille femme verse un liquide huileux dans le mortier et s’applique à obtenir un mélange homogène avec les cendres : cela lui prend seulement quelques secondes, c’est facile et elle a le coup de main. S’armant d’un petit pinceaux, elle prend la mixture et la dépose sur un ongle de votre main gauche (préférentiellement le pouce). Elle souffle alors sur votre doigt et vous invite à la suivre dans le jardin.
Le beau temps est quasiment essentiel dans l’art difficile de l’onychomancie, qui vous l’aurez peut-être deviner consiste à lire l’avenir sur les ongles. Les rayons de Dame Amaterasu se reflétant sur la surface maintenant cendrée et huilée de votre pouce amènent la vielle femme à vous révéler votre avenir. Ces révélations valent ce qu’elles valent mais cet art divinatoire peu répandu est pourtant reconnu. Vous en pensez ce que vous voulez mais la vieille Yaeko semble y croire elle. Riche de toutes vos informations vous pourrez repartir, Yaeko ne manquera pas de mentionner qu’elle peut aussi faire de la divination pour des évènement moins personnels (en polissant un ongle de la main d’un jeune enfant si vous lui demandé des précisions)… Elle ne manquera pas non plus de vous montrer la petite corbeille d’osier et de s’assurer que vous y disposer bien la monnaie demandée, sans quoi elle appellera Yoshida.
NB : exemples de divination sur la surface d’un ongle
- Taches noires
Si une personne a alors des taches noires sur les ongles il doit se méfier car un grand malheur va s’abattre sur lui.
- Petites taches blanches
Signe de maladies futures
- Grande tache blanche
Couvre plus de la moitié du pouce. C'est certain que l'homme rencontrera sa mort dans un futur proche
- Ongle complètement clair (sans distinction de couleur grises)
Mort par assassinat
- Petite forme de croissant de lune
Une demi-lune indique promotion et bonnes nouvelles (augmentation de statut). Demie Lune sur la base du pouce indique progrès et aspect favorable.
- Grand croissant de lune
Qui couvre au moins la moitié du pouce. Prédictions contraires au petit croissant de lune
- Disque (pleine lune)
Réussite en affaires, argent facile
- Etc. Etc. il ne reste qu’à en inventer d’autres…
Bien évidemment on peut voir également sur les ongles nombres de choses liées à l’état de santé du consultant (fièvre, maladies diverses et variées, lupus, diabète , désordre du foie, etc.)
Flood Thunder - Koan jin'rai
Mille ans pour régner
L'éternité pour briller
Ma vie pour servir