[2.11] Takkoku no Iwaya Bishamondo

[Hida Koan]

• Situé au pied de la falaise du Sunda Mizu Ryu
• Entretenu par les élèves du dojo
• 108 statues de Bishamon occupent le "rez-de-chaussée" (dans les poutres)
• A l'intérieur une salle nue (pas de statue, y'en a bien assez en bas) à l'exception d'un méga gros bonzai de la mort (puisque c'est synonyme de force etc.)
• Un spécialiste es bonzai passe quand même de temps en temps histoire qu'il ne meurt pas
• Après tout le reste est classique (il doit quand même y avoir des décos aux murs - vite fait - un peu "spartiate" quoi, puis fatalement de l'encens et tout le fatras)
• un visage (de bishamon?) est gravé dans la roche au dessus du toit (initialement c'est bouddha) / c'est un défi au dojo de la ville que les élèves grimpe à la paroi pour lui peindre les yeux en bleus
• il est de coutume que les enfants de la ville soient emmenés au temple afin de se choisir une des 108 statues comme gardien. ils prennent le pli d'y revenir de temps en temps, adulte (et n'oublie jamais la statue qu'ils ont choisie)
• il y a une grosse statue de bishamon dans le fond (ouais le fond de la photo, imaginez un peu)
• il y a aussi une cloche près de l'escalier

[Hida Koan]

Kei était partie avec pas mal d'avance. Elle claudiquait un peu, plus que quand il y avait quelqu'un dans les parages. Ça lui faisait un mal de chien. Elle avait jeté un œil rapide sous son kimono en début d'après-midi, elle était déjà violette. Elle avait traversé le pont près de la capitainerie et se laissait guider un peu au hasard au travers des rues par l'ombre grandissante de la falaise. Certains heimin la saluaient et elle répondait d'un hochement de tête, se gardant bien de bouger les bras ou les épaules. Elle mit une éternité à rejoindre le grand escalier de pierre qui menait au dojo, le dépassa et longea l'imposante montagne. Quelques lanternes éclairaient le site d'une lumière diffuse. Elle passa sous le lourd torii de bois rouge et s'approcha du temple.

[Hida Koan]

Elle monta en serrant les dents les six marches de pierre qui la séparait de la plateforme du rez-de-chaussée. Un élève du Sunda Mizu Ryu descendait les escaliers. Il la salua

- Bonsoir Hida...-gunso commença-t-il hésitant

- Bonsoir

- Je viens d'allumer les torches et changer l'encens, j'espère que l'odeur ne vous incommodera pas.

- Ça ira, je te remercie.

Il la détailla la tête aux pieds semblant remarquer que quelque chose clochait.

- Deux de mes amis finissent de cirer le parquet en haut... Faites attention de ne pas glisser.

Et il partit au pas de course, vers le grand escalier de granit, pour remonter au dojo.

Elle s'arrêta un instant, sentant chacune de ses côtes bouger imperceptiblement à chaque inspiration. Le temple semblait s'encastrer dans la montagne, presque comme si celle-ci avait grandit autour. Il y avait trop peu de lumière pour qu'elle distingue le visage gravée dans la roche, un peu au-dessus du toit. Un visage austère, mais que certains petits malins s'amusaient à rendre pis encore en lui peignant les yeux en bleu. Elle se souvenait que ça faisait partie des défis classiques des élèves du dojo... Toujours bleu par contre, car le gardien du Nord est souvent représenté avec les yeux bleus.

Elle se dirigea vers la structure du bâtiment, elle pourrait attendre un peu pour monter. Elle dut se baisse un tout petit peu pour passer sous le premier étage de larges poutres rouge. Sous le temple, à même le sol était disposé 108 statues de Bishamon. Elle en était sûre, petite, elle les avait comptées plus d'une fois. Elle était toutes identiques, d'environ 80 cm de haut. Des petits bonshommes de pierre, qui tenaient des lances dans leurs mains droites et des miniatures de temple dans les gauches. Elle chercha "la sienne".

C'était un genre de tradition... A leur première visite ici, les petits enfants de la ville se choisissait une des 108 statues, c'était la leur. Des fois ils repassaient la voir, rarement... N'empêche que tous se souvenaient sur laquelle ils avaient jeté leur dévolu quand ils étaient enfants. La sienne était presque au milieu, juste un peu plus en retrait et un peu plus à droite... Elle lui avait bien plu il y a de ça de nombreuses années. Déjà elle était juste à côté de celle de son père, et ensuite le haut du temple minuscule était cassé, ça la rendait un peu différente.

[Hida Koan]

Elle se laissa tomber sur les genoux. Il était hors de question de se servir de ses bras. Elle grogna a l'impact, et s'inclina précipitamment. La jeune femme murmura "Merci Bishamon-ten pour ton aide, sans toi..." Elle hésita elle n'était pas très à l'aise avec les prières en règle générale "sans toi je me serais certainement fait éclater le crâne à coups de poings..."

Elle laissa une petite pâtisserie aux pieds de la statue et força un peu pour faire rentrer un minuscule papier dans la miniature de temple. Elle y avait calligraphié le kanji compassion, parce que c'était bien ce dont avait fait preuve la Fortune en l'aidant. C'était stupide mais elle faisait ça depuis qu'elle était petite. Elle se doutait bien que les papiers étaient emportés pendant le nettoyage, et que Bishamon ne venait certainement pas tout seul chercher ses plis. Enfant par contre elle était persuadée que la Fortune prenait ses messages, ils disparaissaient après tout.

Elle entendit deux personnes dévaler les marches en courant. Les élèves étaient partis. Elle allait monter. Elle se redressa en prenant appui sur la pierre. Elle était toute transpirante de l'effort qu'elle venait de faire. Bah dis donc... ça va être long cette fois... Ça lui rappela un peu sa mésaventure sur les docks, quand elle avait été rouée de coups par quatre truands. Elle avait aussi mis des jours à s'en remettre.

[Hida Koan]

Elle passa entre toutes les petites statues, se pencha sous la poutre principale et marcha précautionneusement jusque l'escalier qui menait à l'étage. Elle entreprit de monter les marches, tout doucement, et en s'appuyant bien que la rambarde. Il y avait un équivalent de trois étages. C'est bien la première fois que je compte les marches se dit-elle, en pensant que d'habitude elle montait ça quatre à quatre. Trente-deux en tout ! Et à peine moins de dix minutes. Ce serait un entrainement pour la vieillesse. Autant elle avait passée la journée à peu près correctement, autant ce soir elle sentait bien tout les coups qu'avait portés Takeshi.

Elle arriva enfin en haut de l'escalier. Quelques lanternes brillaient, accrochées au mur, des bougies agrémentait la table sur laquelle trônait le bonzai, un chêne liège de plus de cent ans disait-on. Toutes les lueurs se reflétaient sur le parquet, aussi lisse qu'un miroir de bronze poli. Elle s'avança, se déchaussa et entra dans la pièce. Le parquet était tellement massif ici qu'il ne grinçait jamais. Il était d'une belle couleur acajou, comme les murs. Cela assombrissait la pièce mais mettait plus en valeur les calligraphies sur papier blanc qui ornaient les cloisons ainsi que le gros pot de porcelaine couleur coquille d’œuf qui accueillait l’impressionnant bonzai, qui dépassait le mètre de haut, pour presque deux de large.

[Vlad]

Quand Retsu arriva en vue du temple dédié à Bishamon, il fut l'objet de sentiments contradictoires.

Un respect mêlé de peur était la première chose qu'il éprouvait. Ce matin, Dai Bishamon Tenno était intervenu et lui avait parlé, à lui. Il avait toujours révéré la fortune depuis son plus jeune âge, que ce soit au Sunda Mizu Ryu ou au Kaiu Kabe, et il était habitué à n'avoir aucune réponse. Telle était la façon de faire des fortunes : elles ne répondaient jamais et semblaient toujours agir de façon que l'on puisse croire que ce soit un effet du hasard. Mais là les choses avaient changé. Pourquoi ?? Pourquoi lui ? Pourquoi ici ? Pourquoi maintenant ?

Suis-je une sorte de shugenja ?? se demanda Retsu.

Le second sentiment était la joie à l'idée de retrouver Kei-chan. Elle était partie toute seule jusqu'au sanctuaire, lui demandant d'aller chercher de quoi soulager ses douleurs à une vieille boutique d'herboristerie, dans le quartier est. Quand elle avait appris qu'il venait de la part de Hida Kei, l'apothicaire lui avait également remis plusieurs fioles d'un liquide translucide. Le jeune homme n'avait aucune idée de ce dont il pouvait s'agir. Ça ne le regardait de toute façon pas.

J'espère qu'elle va bien...

Il s'inclina avant de passer finalement sous le torii et se dirigea vers le chozuya.
Arrivé près du petit bassin couvert, il prit l'une des longues louches de bois et la plongea dans l'eau claire avant de la verser sur sa main gauche. Il fit ensuite de même avec la main droite, avant de se rincer la bouche.

Il récita alors silencieusement la prière de purification.

Kakemakumo kashikoki izanagino ohkami tsukushi no himuka no tachibanaodo no awagihara ni misogitaharai shi toki ni narimaseru haraedo no ohkami tachi moro moro no magagoto kegare aramu o ba harai tamai kiyome tamai to mohsu koto to kikoshi mese to kashikomi mo mohsu...

Humblement, j’approche le kami par la prière. Notre grand ancêtre kami Izanagi no Okami a pratiqué le misogi dans le lieu Ahagihara de Odo, dans la riviere Tachibana de Himuka, à Tsukushi dans le pays ancien, là tout son être fut nettoyé par de nombreux grands kamis de la purification. Je demande humblement aux kamis de me nettoyer de toutes mes impuretés, qu’elles soient à l’intérieur de moi, dans mes relations avec les autres, et entre moi et la grande nature. Entend ces modestes paroles. Avec humilité et révérence, je prononce cette prière...

A l'exception des prêtres, peu de personnes prononçaient cette prière de façon systématique. Mais Retsu y puisait un certain réconfort, et ceci d'autant plus depuis sa contamination...

Il se dirigea alors devant le visage de pierre qui était gravé dans la montagne. A défaut des autres élèves qui priaient devant les statues de Bishamon situées dans le temple, Retsu avait pour habitude de se recueillir devant l'immense visage taillé dans la roche. Quand il était jeune garçon, le visage sévère de la fortune, qui le toisait de toute sa hauteur, était pour lui l'incarnation de la figure paternelle. Ne pouvant pas rendre hommage à ses parents qui vivaient trop loin, il avait décidé de faire ses dévotions filiales devant la montagne.

Il déposa soigneusement quelques pièces au pied de la montagne, ainsi que quelques boules de riz et une petite bouteille de sake.
Il se dirigea alors vers la cloche du sanctuaire qu'il sonna deux fois avant de revenir devant l'imposante représentation de Bishamon.
Il s'inclina respectueusement deux fois puis frappa deux fois dans ses mains, non sans appréhension, afin d'attirer l'attention de la fortune.

Les mains jointes, il inclina la tête et ferma les yeux, priant silencieusement.

Je te salue, Dai Bishamon Tenno, gardien du Nord. Je te remercie respectueusement d'être intervenus et d'avoir permis à Kei-chan de s'en sortir sans être gravement blessée. Puisses-tu épauler ceux qui luttent et souffrent en ce moment sur le Mur, comme tu l'as aidé elle. Daignes approcher pour nous doter d'une armure, nous protéger, nous défendre et nous commander...

[Hida Koan]

La grosse cloche tinta deux fois. Kei se pressa autant qu'elle put jusque devant l'arbre. Nul besoin de montrer a qui que ce soit la difficulté qu'elle avait à se contorsionner. Elle passa rapidement devant toutes les calligraphies, affichées sur le mur côté montagne : protection, résistance, courage, guerre, force, armure, etc. Elle s'inclina face contre terre, le front sur ses deux mains jointes, au sol. Elle eut une suée à remuer autant les bras. Elle avait mal mais si elle ne bougeait pas, ça allait à peu près.

Elle se calma, la douleur refluant un peu et repensa au combat du matin. Elle remercia une nouvelle fois la Fortune.

[Vlad]

Une fois ses dévotions accomplies, Retsu se releva. Il adressa un salut respectueux à la statue de Bishamon avant de se diriger vers le temple. Il regarda rapidement dans la pièce si Kei-chan s'y trouvait et, n'y voyant personne, se dirigea vers l'escalier menant à l'étage.

Il grimpa les marches et ce fut là qu'il la vit. Elle priait. Il resta immobile et silencieux, attendant qu'elle remarque sa présence.

[Hida Koan]

Elle entendit quelqu'un monter les marches puis, plus rien. Elle attendit longtemps, jusqu'à entendre une respiration calme.

"C'est toi ?" dit-elle sans remuer, comme quand on parle le matin sans bouger la tête de sous les couvertures.

C'est toi ? Stupide question... Tout le monde a la bonne réponse à celle là... "Retsu ?" affina-t-elle

[Vlad]

"Oui, c'est moi." répondit Retsu d'une voix douce.

"J'ai de quoi te remettre sur pied." fit-il. On aurait pu entendre le sourire dans sa voix.

"Mais je t'en prie, termine tes prières tranquillement."

[Hida Koan]

"Et tu ne pries pas toi?" demanda-t-elle étonnée, toujours le front au sol.

[Vlad]

"J'ai prié dehors. J'aurai bien fait moi aussi mes dévotion devant le bonzai..."

"Mais je me suis dit que tu aurais envie de rentrer... Je ne veux pas t'obliger à attendre que j'ai fini..."

"Je reviendrai demain."

[Hida Koan]

"Non mais tu peux. Je suis pas pressée.... enfin à moins que tu comptes dormir là. Mais bon je peux aussi rentrer sans toi."

[Vlad]

"Non, rassure-toi." fit-il en s'approchant.

Il vint se placer à côté d'elle, s'agenouilla avant de frapper dans ses mains.

Il se prosterna à son tour.

[Hida Koan]

Elle attendit un peu qu'il soit vraiment concentré sur ses prières. Et il devait forcément être plus concentré qu'elle, ça c'était quasiment certain! Elle se focalisa aussi quant à elle, mais sur sa douleur. Elle se prépara à se redresser sans trop moufter... Elle réussit à se mettre en seiza en retenant sa respiration. Elle souffla un peu fort cependant une fois l'effort fait. Elle retarda un peu l'étape suivante en regardant le bronzai bien en face. Elle réussit à se relever sans se servir de ses bras. Ils savaient tous faire ça, jusqu'alors ça ne lui avait pas paru extrêmement primordial. Aujourd'hui pour une fois elle trouvait ça bien utile.