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par Aemon » 28 nov. 2006, 16:12
Bonjour à tous, ça fait quelques jours que je suis passé sur la voix, réussissant à me libérer en réorganisant mon planning mais je n'avais osé revenir directement, l'impression d'être redevenu un étranger en quelque sorte. Je vais sauter le pas, pourrait on dire, avec une petite histoire qui m'est arrivée à Cheng Du (Chine)
L'histoire en elle même n'a rien de spécial, juste une description de la bêtise humaine sur un « fait d'hiver » qui se passe à Carrefour.
Je recadre pour ceux qui ne savent pas, je suis venu à Cheng Du (Chine) par le biais d'un jumelage dont une des conditions fais que je « dois » travailler à la maison de montpellier. La maison de montpellier est une sorte de bureau des relations entre la chine et la france, pour simplifier. Cette dernière reçoit des invités français qui viennent rarement pour du tourisme (recherche de partenariat, contacts, ventes, joint-ventures..) et qui sont encadrés par la maison, l'inverse est tout aussi vrai pour des dignitaires chinois voulant partir en france, la maison de montpellier à cheng du s'arrange pour envoyer quelqu'un de la maison pour les guider.
Un des invités de la semaine précédente fut un vigneron qui est venu pour proposer un programme d'échange entre sa futur école du vin et celle de l'université du Si Chuan, je vous passe les détails. Toujours est il, quelques jours plus tard, la directrice de la maison de montpellier me demande si je peux aller au carrefour du sud (il y a quatre carrefours dans la ville) pour faire une liste des bouteilles de vin français et leur prix, je vous le mets dedans, le lien avec le vigneron pue à dix kilomètres...
Enfin bon, peu importe, j'y vais avec une feuille de papier, stylo pour noter les informations et rentrer le plus rapidement possible au chaud, chez moi. Petit problème, le carrefour est assez loin, plus d'une heure pour y aller, déjà ça motive moyen. Ensuite, une fois sur place j'eu le plaisir de me rendre compte par moi même que carrefour est actif dans l'importation de bouteilles de vin français, à vue de nez une bonne soixantaine de bouteilles. Bien entendu, hors de question de me tapper ces bouteilles tout seul à la main, je rentre donc chez moi avec en tête de revenir le lendemain avec mon appareil photo et quelques idées..
Le lendemain après le cours je retourne sur place avec mon appareil photo et un petit Sherlock Holmes dans la main. Une fois dans le magasin je vois un membre du personnel ou bout du rayon et une idée m'apparut, je lui demande tout simplement si elle peut me donner une liste des bouteilles de vin importés de france. Je ne sais pas pourquoi je n'y avais pas pensé la veille, peut être étais je trop écoeuré de voir un plein rayon de bouteilles sans avoir été prévenus, ou étais je simplement prix au dépourvu et décidai de rentrer tranquil avant les embouteillages. En tout cas, la pauvre chinoise me répondit par la négative et je me décidai donc à prendre des photos, ce que je fis avant que cette dernière ne s'affole soudainement.
« oui? »
« vous faites quoi ? »
« Bha je prends des photos, vous n'avez pas de liste. Je ne vais pas tout écrire à la main ! »
Sur ce, quelques secondes plus tard un homme en costard se pointe. A partir de là, la maison des fous ouvre ses portes :
Ce dernier me demande ce que je fais, je lui explique que pour la maison de montpellier je réalise une sorte d'enquête pour savoir quels produits sont importés de france, enfin le vin surtout. Là, premier problème : il ne connait pas la maison de montpellier, je lui explique rapidement et lui dis que je veux juste une liste mais que la chinoise ne peut m'en donner. Ce dernier me mène au bureau réservé aux personnels et là je me retrouve à réexpliquer ma situation à deux chinoises : ce que je fais, ce que je veux, c'est quoi la maison de montpellier. Elles m'écoutent puis passent un coup de fil pendant quelques instants avant de me tendre le combiné. La chinoise au bout de fil ne me comprend pas et c'est réciproque donc cette dernière me demande de l'attendre, elle arrive. Je sors Sherlock Holmes (l'histoire sur le fils du duc) et j'attends.
Quelques minutes plus tard une petite chinoise (oui, il y a des chinois petits) se pointe et là, quels comiques qu'ils sont ces chinois, cette dernière me guide vers l'étalage de vins... avant de me demander si c'était pour l'achat que je voulais la liste. Bon, là déjà ça commence à devenir pénible. Je lui explique à nouveau toute l'histoire (Vin français, liste, photo, maison de montpellier, enquête, j'en ai marre..) et elle m'amène une fois encore (je révise mes formules de répétition) au bureau du personnel et me demande d'attendre. Je ressors Sherlock et j'attends, trop baleze le mec mine de rien, il se plante jamais, ou presque.. enfin bref, une des deux employées du bureau qui avait appelé à ma première visite (vous suivez là ?) passe quelques coups de fil pour savoir si elle peut ou non me donner cette sacro sainte liste. Je ne sais pas ce qu'est devenu la chinoise qui ne me comprenait pas, elle venait surement vérifier qu'elle n'avait bien rien pigé, toujours est il que l'employée appelle différentes personnes parce que la personne recherchée n'est pas là. Quelques chapitres plus tard, j'apprends que l'on va m'imprimer la liste.
Attendez, ce n'est pas finis.
Sherlock trouve son premier cadavre quand la fameuse liste tombe dans mes mains, je remercie l'employée qui s'était démenée pour me sortir l'autorisation et je retourne au rayon vinasse. Là, premier choc : cette liste est faite dans une certaine logique, je n'en doute pas, mais toujours est il que je ne la comprends pas, les vins ne sont pas rangés par ordre alphabétique, ni par positionnement dans le rayon !
Deuxième choc : 150 ! CENT CINQUANTE SATANEES BOUTEILLES !
Autant pour ma « soixantaine » !
Quatre feuilles de bouteilles de vin, classées à la chinoise j'ai envie de dire, auxquelles je dois trouver leur équivalents en rayons pour connaître les prix (oui, j'ai eu la liste des noms des bouteilles mais pas les prix), trop bon.
Je cherche et trouve quelques prix de bouteilles quand un chinois apparaît et regarde quelques bouteilles, rien de spécial, jusqu'à ce que ce mec ME tourne autour. Là aussi rien de spécial, question d'habitude en chine. Par contre, j'ai moins l'habitude de recevoir des coups de coude dans une allée vide, donc je le regarde et lui demande ce qu'il veut.
« oui ? Qu'est ce qu'il y a ? »
« chiwawa »
Oui, à peu de chose près il m'a sorti un « chiwawa », comprenez une explication dans le dialecte local en mangeant la moitié des mots. Qu'est ce qu'un étranger est censé comprendre à ça !
Je l'ignore et continue de chercher des prix quand le rigolo recommence. Là, je me tourne vers le mec et prononce quelques mots moins polis, mais toujours en bon chinois. Ce dernier réplique mais comme il est resté ancré dans son petit monde, cela me passe au dessus de la tête, j'ignore donc ce qu'il me dit ne pouvant même pas dire vaguement s'il me sortait mon horoscope ou un cantique boudhiste.
Apparemment dégouté, il s'éclipse...
« bonjour.. »
Je tenais mon stylo en l'air quand ce mot m'a littéralement percuté les oreilles, autant parce que c'est la première fois que j'entends du français en dehors du dortoir, mais aussi parce que je sentais que le mec allait lui aussi me prendre la tête.
Faisons les choses simplement, le boss français de carrefour était là, quelle chance !
« Qu'est ce que vous faites ? »
« Je note les prix sur cette liste »
Je sais, j'aurai pu faire un effort pour expliquer mais je luttais déjà pour ne pas m'énerver, alors entendre encore cette question, fallait pas me demander une coopération complète. Sur ce, la personne me retire rapidement les feuilles des mains.
Je vais poser ici la question telle qu'elle est apparue dans ma tête : Pourquoi tous ces cons viennent m'emmerder là ?
Tentant tant bien que mal de m'accrocher à la règle number one en chine (Ne jamais s'énerver, cela ne résout jamais rien), je tente une autre approche,
« Qu'est ce qui se passe ? C'est le bureau du personnel qui m'a donné ces feuilles, c'est quoi le problème, je comprends pas »
« Expliquez moi ce que vous faites là.. »
Et voilà, c'est reparti! J'explique une dernière fois toute l'histoire, avec une petite nuance cela dis, en français ! J'en profite donc pour baratiner, sans en rajouter « maison de montpellier, stagiaire, enquête, dossier, je pige pas ce qui coince blabla »
A la fin, visiblement rassuré il me rend les feuilles, non sans expliquer la raison du bordel « vous auriez pu être là pour le compte d'Auchan ». Je le regarde sans comprendre quelques secondes, échange quelques banalités et le regarde partir..
Ok, j'ai une belle gueule, je suis intelligent, je prends des douches tous les jours et j'ai un appareil photo numérique dernier cri acheté il y a trois ans, mais c'est la première fois que l'on me prend pour un James Bond Auchanesque !
Plus sérieusement, l'espionnage industriel existe très sérieusement mais qu'un étranger en chine soit « embauché » pour aller espionner les prix en grande surface avec les milliers de chinois qui y passent tous les jours, je trouve cela surréaliste !
Trop fort l'espion, le seul blanc, blond qui dépasse les 1,80 dans toute la galerie !
Non mais sérieux, déja je comprends difficilement comment on peut avoir les idées assez tordues pour « empêcher » les concurrents de voir les prix affichés, mais en plus les étrangers en chine ont autre chose à foutre que d'aller recopier des prix pendant des heures dans un supermarché.
Le plus drôle est que le départ du patron m'a certes débarrassé de la pression du personnel, mais ne m'a nullement facilité la tache pour trouver ces prix...
Je suis parti à 18h30 de carrefour et je n'avais pas tout trouvé, mais j'en avais un certain nombre donc cela devrait suffire.
Pour info j'étais parti à 15h30 et je suis rentré à 19h40, pour une liste de bouteilles de vinasse, pourquoi les gens se compliquent tant la vie ? -_-