C'est un jeu "prêt à jouer" c'est à dire qu'il contient en 128 pages (tout en couleur en plus !) : le monde, les règles et 3 scénarios ainsi que des prétirés. Cerise sur le gateau, l'écran est vendu avec et le tout pour seulement 30 €. Le suivi se fera sous forme de PDF gratuits dispo sur le site de l'auteur et celui du 7ème Cercle.
Pour le genre, c'est un jeu de superhéros mais plus dans la mouvance de Ultimates ou Watchmen par exemple, qque chose de plus cynique, plus sombre et moins clinquant que du superhéros classique.
Perso, c'est clairement ce que j'ai lu de mieux en matière de JdR depuis pas mal de temps.
Voici ma critique pour donner un peu envie :
Genre généralement boudé sous nos latitudes, le jeu de rôle de super-héros a pourtant comme avantage de s’appuyer sur une culture populaire vieille de presque 70 ans, si vaste qu’elle peut fournir une inspiration quasi inépuisable à qui s’y intéresse et cela via de multiples supports (numéros mensuels, albums reliés, films, etc.).
Humanydyne est le premier jeu français à faire le pari de s’inscrire pleinement dans le genre et de créer son propre univers de héros en collant et de mutants à superpouvoirs. Pari réussi car comme nous allons le voir, ce jeu va en plus bien au delà de ces clichés.
En effet dans Humanydyne, le monde n’est pas un havre coloré empli de super-gentils au sourire ultrabrite affrontant d’inoffensifs vilains aux plans ridicules. S’inspirant de la vague postmoderne initiée par Watchmen dans les années 80 et dont les fleurons actuels sont les Ultimates ou Authority, Humanydyne propose un monde plus sombre, plus amer, dans lequel les mutants et êtres à pouvoirs sont vus avec méfiance et haine au point qu’ils ont préféré se regrouper dans leur propre Etat dont la capitale, San Sepulcro, sera le centre des aventures des personnages. Ceux-ci, membres d’une agence d’enquête sur les activités des posthumains, sont eux-même des hommes et femmes (ou autre…) dotés de pouvoirs surhumains, ayant décidé de les mettre au service de leurs semblables plutôt que d’en profiter égoïstement. Et autant dire qu’ils auront du pain sur la planche tant le monde des « masques » (ainsi que l’on nomme par dérision les posthumains) s’avère plein de zones d’ombre et de secrets inavouables la plupart du temps.
La description du monde, de son histoire, de l’agence Humanydyne et de la ville de San Sepulcro est particulièrement savoureuse tant elle recycle avec bonheur divers pans de la culture comics (mais pas seulement), brassant de nombreuses références pour mieux se les approprier. L’auteur fait montre d’une grande connaissance du sujet mais plus que ça, c’est sa compréhension profonde des codes même du récit super-héroïque (sous toutes ses formes) qui fait que l’univers dépeint fonctionne pleinement, s’inscrit dans le genre mais possède pourtant sa propre identité, forte et marquée (notamment par l’ambiance mexicaine apportant une touche exotique bienvenue ou grâce au versant shamanique du background). Ainsi, comme dans de nombreux comics, l’action se situe dans une ville imaginaire, les mondes parallèles existent, la magie fonctionne, l’humanité prise en otage se rebiffe, etc. De Superman aux X-Men, de Watchmen à Kingdom Come, l’amateur ne pourra que se régaler à la lecture du jeu en y reconnaissant toutes ces influences parfaitement digérées, tous ces clins d’œil adressés aux vieux briscards (dont je suis). Cerise sur le gâteau, trois scénarios (dont une aventure « prequel » dévoilant certains grands moments et secrets de l’histoire du monde) permettent de se lancer dès la lecture du livre terminée.
Au niveau du moteur de jeu, les règles ne semblent pas d’un abord très intuitif. Plusieurs lectures et parties seront sans doute nécessaires pour bien assimiler la richesse tactique permise par leurs mécanismes. La création de personnage est claire et le fait d’avoir fait l’impasse sur les sempiternelles listes de pouvoirs pour y préférer un système freeform permettant de réellement créer le personnage souhaité est indéniablement un gros avantage, même si cela demandera une certaine vigilance de la part du MJ afin d’éviter les abus. Dans l’ensemble, une fois maîtrisée, la partie technique du jeu ne devrait pas poser de problèmes aux vieux routards mais sera sans doute moins aisée à comprendre pour les débutants.
Au niveau de la forme, c’est un sans-faute. L’ouvrage est un très beau livre de 128 pages avec couverture souple, entièrement en couleur. Les illustrations, alternant dessins classiques et photos retouchées, plongent le lecteur directement dans l’ambiance et donnent envie de se créer son agent le plus vite possible pour parcourir les rues sordides de San Sepulcro. Ajoutons enfin que l’écran de jeu est directement fourni et qu’il est lui aussi d’une grande beauté.
Bref, Humanydyne est un jeu de grande qualité, fournissant tout le nécessaire pour jouer et cela à un prix modique. Pour qui apprécie le genre et désespérait d’un jour voir un vrai bon jeu de super-héros débarquer dans la langue de Molière, Humanydyne est une aubaine à se procurer d’urgence. D’autant que le jeu est français ! Voilà qui mérite bien un petit Cocorico non ?

