Finalement, après les saluts de circonstance, la princesse Doji prit congé de l'Impératrice, qui put aller se délasser dans un bain parfumé.
Avec tout le protocole imposée par son statut, l'épouse du Fils du Ciel fut ensuite vêtue d'atours somptueux, peignée, coiffée avec sophistication, et maquillée. On farda son visage épilé et peignit délicatement ses lèvres. Les serviteurs savaient parfaitement ce qu'ils avaient à faire. Tout ici démontrait la haute maîtrise du Clan de la Grue dans les arts de la Cour. Les chausses même de la l'épouse impériale était légèrement surélevées, afin de ne point paraître trop grande, tout en dominant le cortège de ses suivantes...
On présenta à Shikizu une panel d'éventails pris dans son coffre personnel, afin qu'elle y fasse son choix.
Déjà, plusieurs demoiselles attendaient dans l'antichambre des appartements, afin de composer la suite de l'épouse du souverain vers la salle du banquet.
Un détail néanmoins rompit l'impression de perfection qui se dégageait de tout le cérémonial : la dame des Kakita était arrivée avec du retard, et la jeune Kakita Yamiko, que l'Impératrice avait honorée de son attention, n'était toujours pas là...
Les gongs des temples avaient sonné à l'unisson au crépuscule, et le palais s'éclairaient de mille lampions colorés. De nouvelles mélodies résonnaient dans les couloirs du Palais, et des senteurs délicates gagnaient le moindre recoin, annonciatrices du banquet à venir.
On présenta un long miroir dans un cadre d'or à Shikizu, afin qu'elle put y admirer toute sa majesté. Finalement, les servantes, leurs ouvrages achevées, allèrent se ragenouiller à l'entrée de la pièce, prêtes à poser leur front sur leurs mains dès que l'Impératrice ferait mine de bouger.
Kakita Mai portait pour sa part un magnifique kimono en soie fine, dont la couleur rappelait le ciel d'un après-midi d'été radieux.De nombreux bijoux, perles, baguettes et netsuke, que 100 générations de dames des Kakita avaient porté avant elle, ornaient son obi, ses oreilles et sa chevelure remontée dans une coupe aussi complexe que figée. Seule l'éclat de l'Impératrice éclipsait, comme il se devait, la présence de la dame.
Avec de petits pas, dame Mai vint se porter à l'entrée de la chambre, et attendit. Son visage parfaitement exercé n'exprimait qu'une intense satisfaction, et une douceur qui semblait naturelle. Néanmoins, de légers plis aux commissures des yeux, et un regard que l'azur de ses yeux cachait difficilement, trahissait pour les yeux exercés un trouble certain.
Usant d'exercices respiratoires discrets, héritage de son enseignement auprès des courtisans Doji, elle chassa la tension, vida son esprit et redressa un visage qui se voulait aussi radieux que poli...
La soirée allait commencé à Kyuden Kakita...