[2.21-all] Kaboum

[Hida Koan]

Il avait parcouru la distance qui les séparait bien plus vite qu'elle ne l'aurait fait elle-même. "Je vais bien, je vais bien. C'est ma jambe, mais ça va" eut-elle le temps de lui dire quand il lui passa le bras autour des épaules. Il la soutint et l'emmena à l'écart, entre deux bâtisses de la rue des auberges. Elle était vraiment heureuse qu’il soit là et soulagée aussi, elle avait eu peur de mourir sans le revoir.

[Vlad]

Retsu déposa doucement Kei-chan sur le sol, l'adossant au mur d'une des bâtisses.

"J'ai eu tellement peur quand je t'ai vu tomber, Kei-chan..."

"Pour toi la bataille est terminée. Ne bouge pas."

"Il faut que je retourne mener l'attaque..." fit-il.

"Je reviendrai, je te le promets." lui dit-il, ses yeux plongés dans les siens, un sourire rassurant aux lèvres.

Il l'embrassa à pleine bouche avant de s'éloigner à toute vitesse en direction du combat.

[Hida Koan]

"Non... Mais... Mais non..." dit-elle perturbée.

Il était déjà parti. "Non mais ça va pas bien lui... Je vais pas rester là pendant qu'il se bat... que tout le monde se bat." murmura-t-elle. Elle profita de sa mise à l'écart temporaire pour jeter un œil à sa jambe. Elle avait un morceau de bois rentré dans la cuisse, pas très profond, juste sous la peau, mais d'une bonne longueur. Ça, ça devait venir de sa cascade dans le toit. Elle avait perdu un bout d'armure à cet endroit. Elle sentait une chaleur poisseuse à l'arrière en revanche, c'est là que le ronin avait du la frapper. Cette jambe là n'était pas en parfait état donc... Ça suffirait bien pour se battre, elle pouvait tenir debout, elle ne courrait juste pas comme un lièvre. Elle fit sortir l'énorme écharde de poutre en tirant doucement. Ça dura une minute et lui coûta une bonne suée. Sa blessure saignait pas mal mais c'était encore raisonnable, ça s'arrêterait sûrement tout seul, ça n'avait de toutes façons pas touché de gros vaisseaux sanguins sinon elle serait déjà sur le carreau.

Elle se releva, appuya sur sa blessure, se tint sur ses deux jambes, sans bouger pour voir ce que ça faisait. Ça irait... Elle s'assura que la poignée de son katana ne soit pas trop poisseuse, vérifia que les pièces d'armure qui lui restaient tenaient bien, puis s'approcha de la rue. Les combats faisaient toujours rage, un peu plus de cadavres encore jonchaient le sol. Elle chercha Retsu des yeux et le vit, pas trop loin de l'entrée du quartier noble. Elle se dirigea dans sa direction et progressa lentement, devant se battre avec deux assaillants rien que sur le court trajet. Les coups ricochèrent sur son armure et elle remercia les kami qu'ils ne lui visent pas la jambe. Retsu n'avait pas l'air plus en difficulté que toute à l'heure... Enfin pas plus que tout le monde en tous cas. Il fallait qu'elle retourne aider "ses" hommes et s'assurer qu'aucun assaillant n'était arrivé jusqu'aux civils.

[Kakita Inigin]

Le mur à côté d'elle explosa, un fouillis de corps traversa la ruelle, propulsé par les cent kilos de muscle d'Otodairi. À travers le mur, elle pouvait voir que l'intérieur d la maison - une maison miteuse d'artisans - était remplie de formes inhabituellement flasques et désarticulées.

- Kei-sama, je vous retrouve encore ! Pour un peu je croirais que nous sommes liés par le destin ! ... mais vous êtes blessée, vous avez besoin de soins ! Laissez-moi vous aider !

Il se glissa sous son bras, la souleva et l'emmena vers l'intérieur du quartier noble, vers les secours.

[Hida Koan]

Il la déposa sur ses deux jambes à l'arrière des combats, qu'il avait traversé sans trop de problème.

"Mais arrêtez de me porter à l'abri toutes les cinq minutes bon sang, je vais bien !"

Il afficha une expression indéchiffrable. Elle ne le connaissait pas du tout, elle ne pouvait rien lire sur son visage. Il avait du bien changer depuis toutes ces années car elle ne se rappelait pas du tout de lui.

"Non mais je vous remercie mais je peux me battre, mince. C'est quoi cette manie de transbahuter des gens sans rien leur demander."

C'était pas méchant hein...

"Bien. Tant que je suis là, je peux bien me faire bander la cuisse... MAis faut que j'y retourne après. Je vous ai dit que je dirigeais la garde des Eaux, je viens pas faire mon marché bordel. Vous me portez pas là où vous voulez sans rien me demander ! Vous mériteriez que vous en colle une."

[Vlad]

Retsu était retourné auprès des troupes de Hiruma Shigeo. De savoir que Kei-chan était en vie et qu'elle était à l'abri lui avait ôté un gros poids et c'est avec une énergie nouvelle qu'il combattait.

[Kakita Inigin]

La bataille, pourtant, commençait à se finir. Les flots de bushi hostiles se tarissaient ; les armes lourdes Crabes ouvraient des trouées effroyables dans leurs rangs, et soit que les survivants s'enfuient, soit que les suivants soit peu pressés d'être transformés en pots de peinture ambulants, les renforts n'arrivaient que parcimonieusement.

Autour de Retsu s'était constituée une masse de combattants expérimentés, un pack de choc qui écrasait tout ce qui entrait en contact. On retrouvait là le gros des Gardes Gris survivants, les deux sensei du Ryu compris : des hommes capables d'arracher des têtes en étant couverts de flèches - ce qu'ils faisaient à l'occasion quand leur arme leur était arrachée des mains. Hida Bensetsu, à force de perdre son arme, avait fini par utiliser un nagamaki à la lame recourbée avec laquelle il attrapait des têtes, les amenait à lui, et fracassait tout ce qui était dessous avec son autre main. Hida Honukei avait cassé les manches de deux ono et s'en servait comme de kama jumeaux - le poids en plus. C'était une vision d'horreur de voir ce groupe de samurai couverts de sang, hérissés de flèches, avançant dans la masse des ennemis comme si un Kami marchait au milieu de fourmis et les écrasait de ses sandales.

[Vlad]

Retsu mena cette petite troupe d'élite contre les points de résistance des ronin, l'utilisant pour faire éclater les formations ennemies les plus solides et laissant le soins aux troupes moins expérimentées le soin de finir le travail en éliminant les survivants...

[Kakita Inigin]

En traversant une rue entre deux bâtiments officiels, une porte s'ouvrit. Si une armure lourde hérissée de pointes en sortit en premier, laissant un parfum âcre de sang derrière elle, s'ensuivit une bouffée de parfum qui explosa aux narines de Retsu : sophistication et terreur mêlées. L'ambassadrice du Clan du Scorpion le regardait avec un air de petite fille effrayée et infiniment touchante.

- Sauvez-moi, murmura-t-elle en tombant dans ses bras.

Spoiler :

[Vlad]

Le sourire carnassier de son rêve revint à la mémoire de Retsu.
Doucement, il se libéra de l'étreinte de l'ambassadrice du clan du Scorpion.

"Vous..." fit-il en désignant un petit groupe d'hommes.

"Vous allez escorter Bayushi-gozen et sa yojimbo en sûreté."

Se tournant vers la dame, il poursuivit.

"Veuillez m'excuser de ne pas rester plus longtemps en votre compagnie. Nous avons des combats à mener..."

Il fit signe à la troupe de reprendre sa route, laissant l'ambassadrice avec sa petite escorte.

[Hida Koan]

Il ne répondit pas pendant quelques secondes. Deux petites flammes dansèrent dans les yeux de Kei, une rouge et une bleue.

- Mais gicle le donc plus loin ce chiant et retourne te battre, t'as pas que ça à faire je te signale.

- Je tiens à vous signaler qu'il n'est pas "méchant"

- Non bah t'as raison il nous estime juste incapable de faire ce qu'on doit faire, il nous trouve faiblarde au point de nous amener nous faire soigner comme le péquin moyen qui se pisserait dessus pendant une bataille.

- ... OK... Mais bon on n'est pas non plus "comme un poisson dans l'eau" tu remarqueras.

- Oui mais on DOIT COMMANDER DES HOMMES. On le fait comment d'ici?!

- Tu as raison...

- Bien sûr que j'ai raison ! En plus mademoiselle Fleur Bleue, je te signale que notre futur époux se bat, lui, quelque part, plus loin, derrière ce gros lourd qui bouche la vue.

- Oui, je sais... Ça m'angoisse aussi...

- Mais bon on est d'accord hein, d'un point de vue strictement visuel, il est pas mal non plus celui-là. Grand, baraqué, mâchoire carrée... Regarde cette masse quoi...

- ...

- Je sais, va, tu pourrais déglutir, tu déglutirais hein !

- ... Non... N'importe quoi... On va se marier en plus.

- Ah oui ça c'est à peu près certain, reste à savoir avec qui.

- Non !!!

- Non !!!

- Bah vous êtes d'accord pour une fois.

- Je... C'est "je", il n'y a que moi... et vous consciences parasites.

- Ça va, tu vas pas jouer la sainte nitouche avec moi. A quinze jours près, tu te le serais sûrement fait dans une ruelle. Tiens celle-la, là, juste là, à droite, y'a une charrette.

- Ta gueule !

- C'est fini tout ça, c'est fini. On a choisi maintenant. On avait choisi il y a dix ans. C'est fini maintenant.

- Ouais... Je sais... Je sais, je suis d'accord hein même je vous l'ai dit. C'était juste pour vous remettre un peu les pendules à l'heure moi que je disais ça... Maintenant veux-tu bien aller te faire bander la cuisse puisque t'as ouvert ta grande bouche et débarrasser ce béni de Benten du plancher qu'on puisse retrouver Retsu ?

[Vlad]

Alors qu'il s'éloignait, Retsu ne put s'empêcher de se demander pourquoi est-ce que cette femme s'était jeté dans ses bras, un geste hautement inconvenant pour une femme de son statut...

A cause de ses relations au sein du clan Daidoji ??

Sans doute.

Avec les politiciens, rien n'était jamais tel qu'il semblait...

[Kakita Inigin]

Lorsque l'escorte de Bayushi Chohime sortit de la ruelle, quatre bandes de ronin attaquèrent. Les bushi tombèrent deux à deux, éventrés par des attaquants pratiquant la technique de l'hirondelle : des coupes franches, de haut en bas, dévastatrices. Sa yojimbo la repoussa en toute hâte dans la ruelle, en riant :

- À nous ! Attaque ici !


*

Kei était arrivée-poussée jusqu'à une ambulance de fortune, où un shugenja de seize ans psalmodiait en continu et où deux domestiques de Clans mineurs sanglaient les blessures les plus légères. Elle fut examinée, pansée légèrement, mais au lieu de la renvoyer au combat le shugenja la fit assoir sur un lit de camp :

- Vos blessures sont sérieuses. Ben sûr, vous allez me dire que vous prétendez montrer à ces idiots que les vrais bushi se chauffent avec un tout autre bois, mais vous n'irez plus très loin dans cet état. Vous avez eu raison de me l'amener, Akodo-san.

- Je m'en doutais. Je reviendrai voir si vous vous rétablissez, Kei-sama.

Lorsqu'il fut reparti avec un entrain de jeune loup fringant avisant un daim blessé, le shugenja se retourna vers elle :

- À nous deux. Vous ne devriez pas présumer de vos forces dans la situation présente. Je suis encore jeune, mais j'ai vu plus de samurai-ko dans votre situation que vous ne pourriez le croire. Est-ce lui le père ? Si c'est le cas, il ne devrait pas vous laisser vous exposer ainsi.

[Vlad]

"Merde..." lâcha Retsu.

"En avant ! Protégez l'Ambassadrice !!" hurla-t-il à ses hommes.

[Kakita Inigin]

Les hommes de Retsu enfilèrent la rue, passant de part et d'autre de la yojimbo, et entrèrent en collision avec les ronin. Retsu eut alors un songe d la principale raison des décès à répétition, de la série noire qui touchait les officiers de la ville : le premier dans la mêlée heurta violemment un ennemi et, basculant par dessus, il aurait percuté la lame du suivant s'il ne lui avait pas fait sauter la lame des mains d'abord. Triste bataille que celle où le premier rang est presque sûrement sacrifié.

Mais, le combat repoussant les assaillants jusqu'au carrefour où ils avaient surgi, la voie s'élargit ; Retsu se retrouva à ouvrir des adversaires côte à côte avec Bayushi Atsuyo, qui tranchait avec les autres combattant qu'il connaissait par sa touche très personnelle au combat : toute de légèreté, de voltes, de coups anodins et qui se révélaient mortels parce qu'ils s'ensuivaient de larges éclaboussures de sang.

Ils finirent enfin, libérant le carrefour, noyant le dernier de leurs ennemis dans le sang de ses compagnons - Bensetsu le maintenant dans le flot visqueux en s'asseyant sur ses épaules.

Quand ils eurent fini, nettoyé leurs armes, Chohime s'approcha de lui et lui murmura :
- Vous avez sauvé ma vie. J'ai une dette envers vous.

Et Retsu pouvait lire la même reconnaissance dans les yeux de l'ambassadrice et de sa yojimbo.