[2.0-all] La Garde des Dignitaires

[Hida Koan]

Hirozaku, Shigueru et Kamodo, attendaient dans l'antichambre, ils avaient un peu d'avance. Kei devait venir, il le savait tous... Ils savaient aussi tous qu'elle serait sûrement en retard. Même Kamodo le savait, il n'était pourtant revenu en ville que depuis trois ans. Il avait passé sept années ou presque sur le mur mais il avait été affecté à la garnison du Nord, tout près de la caserne de Kei, il avait eu l'occasion de la voir à l'oeuvre depuis... Ils se voyaient tous régulièrement, parlaient de tout et de rien, rien n'était tabou... Sauf Retsu.

"C'est Toroboshi quand même... Elle pourrait faire un effort." grommela Shigueru.

Du bruit se fit entendre dans la pièce d'à côté, ils parurent soulagés. Quand le shoji s'ouvrit, tous les trois se décrochèrent carrément la mâchoire. Retsu se tenait dans l'encadrement de la porte. Ils allaient se diriger vers lui, ravis, quand le shoji qui leur faisait face s'ouvrit également. "Toroboshi-sama vous attend." le serviteur les laissa entrer.

Dans une grande salle, sur un dais, Yasuki Toroboshi se tenait bien droit. Il portait un kimono magnifique, bleu très sombre. Son visage avenant les enjoignit à s’asseoir en souriant. Les quatre hommes s'avancèrent et s'agenouillèrent en face du gouverneur, à bonne distance. Ils s'inclinèrent face contre terre.

"Bien... Vous êtes tous là ou presque." Un serviteur amena un parchemin à Toroboshi qui le déplia. Il présenta la future mission, précisant bien que les instructions venaient de Kuni Hayesu le magistrat.

Kei sorti de la caserne à toute allure, se faisait charrier par la plupart de ses hommes, qui avait tous parié avec elle aujourd'hui qu'elle serait à la bourre. Elle devrait payer une bonne tournée ce soir. Ça lui avait pris un peu de temps de s'assurer que sa tenue officielle était bien parfaite. Elle se précipita devant le palais du conseil, fit un signe à Nobunaga Kaikawa, qui par chance était de garde, il lui ouvrit la porte rapidement. Elle s'arrêta en dérapant un peu dans l'entrée. Le karo du palais vint à sa rencontre, irrité au possible "Dépêchez-vous au moins" "C'est pas comme si j'avais pas couru je vous signale". Il la mena devant un shoji, l'ouvrit et la poussa presque à l'intérieur avec un petit sourire suffisant. Il espérait sûrement qu'elle se fasse engueuler.

Quatre silhouettes étaient au sol, à genoux face contre terre. "...cette future mission." Toroboshi s'interrompit. "Ah. Vous êtes là. Prenez place je vous prie, vous nous pardonnerez de ne pas avoir attendu" lui dit-il sarcastique, en tendant le bras devant lui. "Toroboshi-sama" dit-elle après un magnifique sourire, en s'inclinant brièvement. Elle alla se placer sur la droite, et s'agenouilla. Elle regardait droit devant elle. Elle ne mit pas le front au sol, elle trouvait ça ridicule, il avait déjà commencé à parler... "Je disais donc, pour cette future mission, que je viens de vous décrire." Il la regarda dans les yeux "Kei-san vous rattraperez auprès de vos compagnons." Elle sourit un peu, l'air coupable, désolée mima-t-elle avec sa bouche. Le Gouverneur leva les yeux au ciel. Jamais il n'aurait promu pareille personne si elle n'avait pas participé au sauvetage de Dame Yasuki... "Vous ferez partie de La Garde des Dignitaires. que soit donc pris en note que..." Il continua égrenant tous leurs noms et leurs postes.

C'était étrange ce parfum. Ça lui plaisait beaucoup, ça la mettait à l'aise. Elle se sentait bien mais ne savait pas vraiment pourquoi. Ce devait être l'homme sur sa gauche. Elle ne l'avait toujours pas regardé. Elle espérait qu'il était aussi charmant qu'il sentait bon. "... de la Garde des Eaux, caserne de la Rive Est". Ça c'était elle, elle remua un peu sur ses genoux. "Et en plus de la charge de Garde des Dignitaires, une nouvelle place de gunso dans la Garde Grise, Garnison du Nord pour trois mois, et ensuite Garnison Ouest, pour Hida No Matsudaira Retsu, fraîchement revenu du Mur. La bienvenue à vous cher sergent."

L'homme sur sa gauche se redressa, les trois autres également. Elle devint blanche comme la mort. Elle était persuadée qu'elle allait tomber dans les pommes.

[Vlad]

Matsudaira Retsu fut heureux de retrouver ceux qui avaient été ses meilleurs amis au dojo du Sunda Mizu Ryu. Son retour les avait apparemment surpris mais leur expression en le voyant revenir avait été un véritable baume pour le cœur blessé du jeune homme.

Je suis bien content de les retrouver après tout ce temps... se dit-il. Ils allaient avoir des tonnes de choses à se raconter...

Malheureusement, il allait falloir attendre pour les retrouvailles. Yasuki Toroboshi-sama allait les recevoir...

Les quatre hommes entrèrent dans la salle d'audience et se prosternèrent devant le gouverneur de la cité, Retsu le gratifiant d'un kow-tow parfait.

Toroboshi commença alors à leur donner le détail de leur nouvelle mission quand son exposé fut interrompu par l'arrivée d'une autre personne.

Un autre partenaire ?? Intéressant... songea Retsu.

"Kei-san vous vous rattraperez auprès de vos compagnons..." entendit-il.

Retsu fut un instant tétanisé comme si on venait de lui planter un couteau dans le dos. Il resta prostré au sol. Il aurait de toute façon été bien incapable de se relever...

Putain... C'est pas possible... songea-t-il en fermant les yeux. Il n'était pas arrivé depuis deux jours à Sunda Mizu Mura qu'il tombait sur Kei-chan... Quel sacrilège avait-il pu commettre pour que les Fortunes soient à ce point en colère contre lui ??

Il frissonna alors qu'il sentait qu'elle venait prendre position juste à côté de lui. Gardant les yeux rivé sur le sol, Retsu prit une longue inspiration. Il entendit le gouverneur énumérer la liste de ses compagnons qui formeraient avec lui la Garde des Dignitaires... Il l'entendit alors prononcer son nom ce qui le tira de ses réflexions.

"La bienvenue à vous cher sergent..." conclut Yasuki Toroboshi-sama.

Fermant une ultime fois les yeux, Retsu se releva avec lenteur. Il dut faire appel à tout les talents que les grues lui avaient enseigné afin de dissimuler sa détresse.

"Merci, Yasuki-sama" finit-il par répondre, ponctuant ses remerciements d'un léger signe de tête.

Il savait que Kei-chan était là, juste à côté de lui, mais il ne pouvait, il n'osait pas la regarder...

[Hida Koan]

Elle pencha dangereusement sur le côté, les yeux mi-clos. Hirozaku se racla bruyamment la gorge. Il avait des yeux partout Hirozaku. Elle se reprit un peu et se redressa. S'il lui en voulait beaucoup au début pour Retsu, il s'était rendu compte, les années aidant, qu'il avait du se passer quelque chose de compliqué, qu'elle n'avait pas été forcément si mauvaise... En fait si, elle l'avait été, mais il lui imaginait des circonstances atténuantes. Il ne lui avait jamais rien demandé en dix ans à ce sujet (qu'elle évitait avec acharnement il faut bien le dire).

"Merci Yasuki-sama"

Ça lui fit un choc énorme d'entendre sa voix. Elle le regarda de biais, son profil se détachait de la fenêtre qu'elle voyait dans le fond. Il n'avait pas trop changé, il avait vieilli, comme eux tous, mais c'était toujours le même. Son cœur s'emballa et elle se sentit un peu la tête qui tourne.Toroboshi remarqua sûrement son trouble et leva un sourcil intrigué. Elle fit un gros effort pour avoir l'air normal. Hirozaku vint à son secours, consciemment ou pas "Toroboshi-sama, merci beaucoup de l'honneur que vous nous faîtes. Nous avons bien pris note de l'arrivée des dignitaires la semaine prochaine, nous nous rapprocherons de Kuni Hayesu-sama dans l'intervalle pour préparer la mission comme il se doit." Elle se leva à peine sa phrase terminée, s'inclina, se releva un peu trop vite, vacilla une seconde, et se dirigea dans l'antichambre par laquelle elle était arrivée. Le karo, la voyant sortir, l'air nauséeux parut satisfait. Les autres sortaient de la pièce, elles les entendaient remuer derrière elle. Elle respira un grand coup, se pinça discrètement les joues et se retourna en lançant à la cantonade sans réellement parler à quelqu'un en particulier.

"Bon, bah c'est pas tout ça mais j'ai du travail moi hein... Je vais y aller."

Shigueru s'encadrait dans la porte, Retsu de devait être derrière. Il lui dit sur un ton de reproche à peine voilé "Je te signale qu'on va avoir une mission et que t'as encore rien entendu. Va bien falloir qu'on te mette au parfum." Peu finement.... mais il y avait prescription au bout de dix ans se disait-il, il ajouta "Puis Retsu est revenu on pourr..." Kamodo lui coupa la parole de sa voix posée "Oui il est revenu et va être affecté dans la même caserne que moi pendant un trimestre" il avait l'air excité par l'idée, enfin aussi excité que puisse paraître Kamodo. "On pourrait quand même rester un peu avec lui." finit Shigueru.

[Vlad]

Quand il avait vu Kei-chan quitter prestement la pièce, Retsu n'avait pas pu se relever tout de suite. Alors que ses compagnons se levaient pour sortir, il s'inclina une nouvelle fois devant Yasuki-sama avant de se relever lentement.

Deux pas en arrière en direction de la porte, puis un demi-tour avant de sortir... Son passage chez les Daidoji avait laissé des marques même si Retsu ne s'en rendait pas vraiment compte.

En sortant, il surprit la fin d'une phrase prononcée par Shigeru : "On pourrait quand même rester un peu avec lui".

Ainsi il n'était pas le bienvenu ici... Il s'en était douté...

Se composant une attitude neutre, il lâcha : "Bien... J'ai été heureux de vous voir... Je dois maintenant me présenter à mes supérieurs et prendre mes quartiers..."

"A bientôt..." fit-il en se dirigeant vers la sortie.

Il n'avait pas besoin de leur pitié. Il n'avait jamais voulu revenir ici et ses futurs collègues et anciens amis ne voulaient pas qu'il revienne...

Quant à Kei-chan, elle ne l'avait même pas regardé...

C'est le coeur lourd qu'il se mit en route vers la caserne Nord... Il était une fois de plus le petit garçon perdu dans une ville étrangère et hostile.

Même le Mur était plus accueillant que cet endroit... songea-t-il en quittant le Palais du Conseil.

[Hida Koan]

Les trois hommes se regardèrent comme deux ronds de flan. C'est Kamodo qui réagit le premier, il partit à la suite de Retsu quasiment instantanément. Shigueru lui emboita le pas en regardant les deux autres "Bah allez, bougez-vous, on va pas le laisser tout seul pour son retour. Faites pas comme si vous étiez pas content de le voir. Je sais que c'est pas vrai." et il sortit à son tour. Hirozaku eut quand même comme un doute concernant Kei. Elle n'avait pas spécialemnt l'air heureuse, elle avait même plutôt l'air à deux doigts de tomber dans les vapes. "Viens on y va" lui dit-il plus gentiment que d'habitude "ça ne va pas?". "Si, si... Juste un truc qui ne passe pas bien." Pour ne pas passer ça ne passait pas bien. Il était parti. A peine arrivé il était déjà parti. Sans rien dire de gentil en plus. Peut-être pas à elle d'accord mais les autres? Elle se doutait bien que vu la honte qu'elle lui avait mis il y a dix ans il ne devait pas la porter dans son coeur. Mais de là à en snober les trois autres, qui se faisaient une joie de le revoir... C'était stupide.

Kamodo rattrapa Retsu rapidement. "Retsu-san, je suis parfaitement heureux de te revoir. Les Fortunes montrent grande bienveillance à vouloir reforger ainsi notre amitié. Ton affectation me met du baume au coeur. Je sais gré à notre bon gouverneur de t'avoir permis d'être à la caserne Nord avec moi pendant le trimestre prochain. " Ah, Kamodo et ses phrases ampoulées, même le Mur n'avait pas changé ça ! Shigueru et Hirozaku le rattrapèrent. "Je suis content moi aussi, Retsu-san" fit la grosse voix de Shigueru. "La bienvenue chez toi mon ami. Je ne sais pas si tu te rappelles de tout en ville. Nous n'avions pas tant l'occasion que ça de flâner. Maintenant... Maintenant pas trop non plus mais bon, nous avons quelques bonnes adresses à te donner!". Hirozaku était chaleureux et souriant, il fit un petit geste à Kei, qui les suivait silencieusement et la tête basse. Elle fit un effort colossal pour avoir un ton jovial et elle y réussit plutôt bien, des années à faire semblant que ça allait, ça laissait de jolies traces "Je suis ravie de te revoir aussi Retsu-san. Ton absence a été trop longue pour nous tous!" ça c'était bien le cas de le dire...

[Vlad]

Retsu fut surpris par les paroles de ses compagnons.

Les réflexes acquis au cours des quelques années passées dans les cours de la grue lui indiquèrent que soit ils étaient d'excellents menteurs, soit qu'ils étaient véritablement heureux de son retour. Vu leur passif, la vérité était aisée à deviner.

Pour la première fois depuis son retour, le visage de Retsu se fendit d'un large sourire.

"Merci les gars..."

L'arrivée de Kei-chan le blessa fortement. Il était évident qu'elle faisait semblant de paraître enjouée... Le sourire de Retsu disparu presque instantanéement.

Mais qu'ai-je donc bien pu lui faire pour qu'elle me déteste ainsi ?? se demanda-t-il.

Puisant dans ses ressources, il se recomposa rapidement un sourire.

"Je suppose que ma prise de quartier peut attendre un peu..." fit-il à l'attention de ses amis.

[Hida Koan]

Ils le menèrent quand même dans les quartiers nord, puisque c'était tout de même sur le chemin de sa caserne. Kamodo passa le trajet à lui vanter les mérites de la Garde Grise, comme si c'était une troupe d'élite... Retsu n'était pas dupe non plus, il avait passé de nombreuses années ici. Non loin du dojo Nobunaga, un ancien magasin de kimono avait été transformé en maison de thé : Le Chat Huant. Les amis s'engouffrèrent à l'intérieur et choisirent une table. Kei quant à elle, salua le tenancier et commanda à la serveuse du thé un peu cher, des îles du clan de la Mante. Elle s'approcha également curieusement d'elle et lui murmura quelque chose à l'oreille. La jeune fille disparut derrière le comptoir et revint avec une tasse joliment ouvragée presque pleine à ras bord, qu'elle tendit à la gunso. Kei la vida d'un seul trait en grimaçant un peu. "Merci beaucoup, il faut combattre le mal par le mal" souffla-t-elle, l'haleine chargée d'alcool de prune. Elle sentit la chaleur se diffuser dans son ventre, elle espérait qu'avec ça elle serait un peu plus calme.

Les quatre hommes s'étaient mis face à face, il lui restait la place en bout de table. Elle s'agenouilla doucement et casa ses jambes sous la table. Elle poussa un petit cri quand ses cuisses se retrouvèrent coincées entre les genoux de Shigueru et de Retsu. ce ne serait peut-être pas si facile, même avec l'alcool. "Ah, ah... C'est pas très grand ici. Désolée les gars." Elle souffla et une odeur de prune survola la table. Shigueru, qui la charriait quand même plus que les autres et dont le franc parler était le plus développé n'hésita pas "A cette heure là déjà? Tu seras trop occupée pour te souler ce soir, tu prends de l'avance c'est ça?". Au lieu de lui en décoller une dans l'épaule, comme d'habitude, elle se contenta de rougir, ce qui en estomaqua plus d'un, sauf peut-être Retsu.

"- Ca faisait longtemps qu'on ne t'avait pas vu cette couleur là sur la figure dis donc! continua le colosse, qui fut coupé Kamodo

- J'étais justement en train d'expliquer à Retsu-san que notre garnison et ta caserne étaient toutes proches, ce sera donc plus facile de se voir."

Elle n'avait pas du tout percuté ça toute à l'heure. Le cauchemar allait recommencer. Kamodo continua de se réjouir de l'affectation de Retsu pendant plusieurs minutes. Elle essaya de se raisonner : il n'y avait aucune raison qu'elle se considère dans la même situation qu'avant. Avant : elle était amoureuse de lui et elle devait faire comme si ce n'était pas vrai. Maintenant : elle était surement encore amoureuse de lui et elle devait faire comme si ce n'était pas vrai... et il la détestait... et il allait vivre dans la même ville, dans le même quartier... et elle avait une réputation calamiteuse... Et bien, oui, elle n'était effectivement pas dans la même situation qu'avant, c'était bien pire maintenant. Elle se passa une main sur le visage et se frotta un peu les yeux.

Elle fut sauvée de ces macabres pensées par l'arrivée de la serveuse avec la thière. Quand la jeune fille se pencha pour tout poser sur la table, Retsu, poli, bougea un peu pour lui faciliter la tâche. Se faisant il plaqua un peu plus sa jambe contre celle de Kei. Quelques secondes suffirent pour la mettre dans tous ses états. Même s'il s'était écarté rapidement, comme s'il s'était brulé, le mal était fait. Non, non, non se morigéna-t-elle, mon corps ne peut pas me trahir comme ça, je suis trau-ma-ti-sée, c'est clair?! Je ne suis pas excitée... Je suis triste. Elle le regarda de haut en bas avec tant d'insistance qu'il du sentir chauffer ses oreilles. Kamodo parlait toujours et Hirozaku, malin comme un singe, l'interrompit, lui dans ses paroles, elle dans sa contemplation "Il fait chaud ici non?" Il remonta ses manches. Merci mon ami se dit-elle, elle allait bientôt suer à grosses gouttes si elle ne se calmait pas. Elle fit donc de même, dévoilant ainsi un bras cuivré (on travaillait beaucoup en extérieur à la garde des eaux) et un bras complètement tatoué. Elle avait aussi son fameux petit bracelet en corne, que Retsu lui avait offert il y a dix ans, mais ça ne lui traversa même pas l'esprit. "Tu me passes ta tasse Kei?" "J'ai... pris du thé bleu des îles" dit-elle comme pour penser à autre chose mais la voix plus aiguë que d'habitude. Hirozaku fit le service. "Alors toi Retsu, quoi de neuf?"

[Vlad]

Retsu resta quelques minutes silencieux.

Le contact inopportun avec Kei-chan l'avait fortement sécoué et il avait retiré sa jambe vivement.
Mais malgré tout, il sentait encore le contact de Kei-chan là où leurs deux corps s'étaient touchés...

Il fut stupéfait de voir les tatouages de la jeune femme mais ce qui lui cloua définitivement le bec, ce fut de remarquer qu'elle portait toujours le petit bracelet qu'il lui avait offert, il y a dix ans. Elle ne l'avait pas jeté ?? Qu'est ce que cela pouvait donc vouloir dire ??

Elle ne savait pas qu'il serait là aujourd'hui c'est donc qu'elle le portait au quotidien ??

Entendant Hirozaku l'appeler, il parut un instant décontenancé avant de répondre.

"Hé bien... J'ai été plusieurs années sur le Mur après vous avoir quitté... J'ai ensuite fait un petit tour par shiro daidoji ou je suis resté deux ans avant de finalement être envoyé ici pour intégrer la Garde Grise..." fit-il évasif.

"Et vous, quoi de neuf ??"

[Hida Koan]

"Shiro Daidoji?!" s'exclama Kei. C'était sorti tout seul, mais c'était vraiment étonnant : elle ne se serait jamais dit ça. Shigueru parla "Et bien huit ans de Mur, résumé en deux phrases! Même Kamodo a été plus prolifique que toi! C'est vrai que c'est p't'être pas le lieu et l'endroit pour discuter de ça... Mais j'espère bien que tu nous en raconteras quelques unes, de ces histoires..." Après Kamodo pendant le trajet c'est Shigueru qui pris le relais :

- Kamodo il t'a déjà tout raconté par le menu toute à l'heure en ce qui concerne sa vie ici. Nous, on a tous les trois" il engloba Hirozaku et Kei "été affectés à la Garde des Eaux. Moi je suis au quartier du Grand Temple, Kei à la Rive Est et Hirozaku aux Embarcadères du Sud. Ca se passe pas mal, Ca tourne bien chez nous au Grand temple et j'm'entends bien avec tout le monde...

- Sans blague? Avec ta carrure et ton gros marteau c'est louche que tout le monde t'aime, chuchota Kei

Il lui sourit plein de malice,
- Kei continue à se faire plein d'amis...
Elle lui décocha cette fois-ci un bon coup de poing dans l'épaule.

- Quand elle n'est pas trop occupée à se faire réduire en bouillie par des coques de navires. Hirozaku va sûrement devenir la définition même du gunso parfait ou du mec compétent, ils savent pas encore très bien, pour ça pour le moment ils l'ont écrit nulle part.

- Merci Shigueru, ajouta Hirozaku, en fait je pense qu'on peut dire qu'on va bien ! Nos affectations nous conviennent, y'a beaucoup plus de magouilles ici que ce que nous petits cerveaux adolescents étaient près à encaisser mais globalement on s'en sort bien.

Kei buvait son thé en se concentrant dessus. Elle sentit qu'on la regardait. Il fallait qu'elle parle donc c'était ça... "Alors donc Shiro Daidoji? Comment ça se fait?" Elle croisa ses yeux quand il tourna la tête juste un instant à sa question. Son coeur fit un bond dans sa poitrine. Au moins paraissaient-ils moins vides que la dernière fois qu'elle l'avait vu dans une auberge il y a dix ans, à elle de comprendre de quoi ils pouvaient bien être remplis.

[Vlad]

Retsu tourna son regard vers Kei.

Il essayait de faire bonne figure mais la jeune femme ne put s'empêcher de saisir une impression de grande tristesse au fond de ses yeux. L'impression de vide n'avait pas disparue même si elle semblait moins criante que la dernière fois.

"Disons que lors de mon affectation sur le Mur, j'ai sympatisé avec certains membres du clan de la Grue. Combattre dos à dos, ça créé des liens..." fit-il.

"Du coup j'ai demandé à pouvoir être formé au sein du Tetsu Tsuru Ryu... Ca a été accepté et j'ai donc passé deux ans là-bas..." répondit-il laconiquement.

Ne pouvant soutenir le regard de la jeune femme, Retsu avait finalement baissé les yeux, fixant son attention sur le bracelet qu'elle portait.

Je ne comprends pas... se dit-il avant de se reporter sur sa tasse.

[Hida Koan]

Je vais vite hein désolée mais c'est parce que les petits bouts qui concernent les autres, je les écris un peu avant... et puis surtout je me suis rendue compte qu'ils ne t'avaient parlé que de leur vie "pro" alors qu'ils ont sûrement envie de dire le reste (au moins Hirozaku avec ses enfants parfaits )

"Faudra nous raconter ça un jour" lança-t-elle poliment.

La jeune femme arrivait enfin à se détendre un peu, l'alcool devait commencer à faire effet. Finalement c'était agréable qu'il soit revenu, même s'il lui agitait sous le nez ses yeux tristes qui lui fendaient le cœur. Il avait vraiment du voir des horreurs sur le Mur. Elle l'avait écouté un peu distraitement, entendre sa voix lui suffisait pour l'instant. Elle l'avait aimé comme jamais. "Avait ?" Elle fit taire sa conscience. Mais il avait aussi été son ami. Ce serait sûrement difficilement supportable de le voir plus souvent, horriblement compliqué de ne pas le toucher. Elle soupçonnait qu'en ce cas tout serait perdu... et qu'elle lui balancerait tout à la figure, ce qui serait un peu violent après dix ans de silence. Il se rendrait bien vite compte des travers qu'elle avait développé et supporterait encore moins de l'avoir aimé un jour. Et pis encore qu'elle ait porté son enfant, ne serait-ce que quelques semaines. Elle se dégoutait bien assez elle-même, pour arriver à imaginer à quel point, lui, pourrait la trouver immonde. Sans compter la faiblesse qui l'avait poussé à rompre avec lui de si sale manière, alors qu'elle aurait très bien pu s'élever contre sa mère, si elle avait été assez courageuse.
Mais il était quand même là. Ça ne redeviendrait sûrement jamais comme avant que ce soit leur amitié ou le reste mais elle finit par se rendre compte que ça faisait dix ans qu'elle n'attendait que son retour. Au moins pouvait-elle faire un effort pour qu'ils entretiennent un semblant de relation d'amitié normal.

Hirozaku coupa le fil de ses pensées et meubla le silence qui commençait à s'installer.

- Sinon je me suis marié figure-toi et j'ai deux enfants extraordinaires. Kenjiro apprend au Sunda Mizu Ryu et Kamihime est dans ma famille. Je t'inviterai à la maison sous peu, tu connaitras tout le monde, lança Hirozaku ravi.

Kamodo ronchonna un peu et avoua:

- Je préfère quant à moi me dédier complètement à mes fonctions. Un guerrier ne doit pas se laisser distraire... Mais la foi peut aider, je vais souvent au temple.

- Et bien moi, c'est tout nouveau mais les tractations ont l'air de bien se passer ! clama Shigueru, J'espère bien être marié d'ici la fin de l'année, une gentille et jolie fille, une Yasuki. Ses parents vendent des fleurs... Enfin de l'art... De l'ikebana quoi.

C'était étrange d'imaginer le grand bushi lié à une petite fleuriste, mais bon... Ce seraient les clients qui seraient surpris si, quand le grand âge viendrait, ils se retrouvaient face à une montagne de muscles en train de faire de l'ikebana avec ses grandes mains calleuses. Shigueru se tourna vers Kei, la mine réjouie. C'est celui que les exploits de la jeune gunso avait le moins dérangé de toute la bande. Il la voyait tellement comme un homme que le fait qu'elle multiplie les conquêtes ne lui posait strictement pas le moindre souci. Il aurait presque été fier d'elle, comme quand on se félicite, adolescent, de toutes les filles qu'on a réussi à trainer dans son lit. Il faut dire aussi que tout le monde connaissait les membres de la promo de l'Oni, et savait qu'ils étaient amis. Il ne traversait l'esprit de personne de persifler sur Kei quand Shigueru était dans les parages, on ne savait pas ce qui pouvait se passer. Une mandale perdue et on se faisait décrocher la machoire ou broyer le crâne à coups de marteau de guerre... Ca ne servait à rien de prendre autant de risques. Kei remua un peu, semblant mal à l'aise. La tournure de la conversation prenait un angle qui ne lui plaisait pas vraiment.

- Moi, rien.

Shigueru pouffa mais arrêta de suite, levant les mains en signe de rédition, sous le regard noir de la jeune femme.

- Si. J'ai deux neveux. Mes parents ont déménagé et mon frère... Enfin Utagawa, tu te rappelles? Il habite à la forge avec sa femme et ses deux fils. Je passe souvent les voir. Ils sont mignons.

Elle s'arrêta là, ça suffisait bien. Elle n'allait pas lui lister les noms de ceux avec qui elle avait eu une aventure. Elle n'en avait aucune envie. Et tu n'aurais pas le temps, on ne couche pas là cette nuit se blessa-t-elle elle-même.

- Et toi? ajouta-t-elle un peu plus contrariée qu'elle n'aurait du.

[Vlad]

"Moi ?? Hé bien comme toi... Rien..."

Il finit sa phrase à mi-voix.

Rien. Voilà ce qu'il avait toujours été et ce qu'il était toujours maintenant. Rien...

Il n'eut pas le temps de reprendre son souffle que Shigeru se penchait par dessus la table pour lui donner une tape sur l'épaule.

"Rien ?? Tu déconnes ?? T'as bien dû chopper une petite sur le Mur, non ?? Tu sais bien l'isolement, la peur de mourir, et tout ça !!"

Retsu n'eu pas le temps de bafouiller une réponse que Shigeru poursuivait.

"Ou même chez les Daidoji... T'as pas une petite fiancée du clan de la grue qui attends sagement que tu l'épouses ??"

Retsu se rembrunit avant de hocher négativement de la tête.

"Non. Rien."

[Hida Koan]

Shigueru arbora une mine contrite. Kei releva la tête, contente. C'était méchant d'être heureux du malheur des autres mais là elle ne pouvait pas s'en empêcher elle était vraiment contente. Elle enchaîna le ton beaucoup plus enjoué qu'à n'importe quel moment de la matinée :

- En tous cas j'ai vu que t'avais fait des progrès phénoménaux. Quand je t'ai entendu nous appelé "les gars" au lieu de tes circonvolutions compliquées, j'en croyais pas mes oreilles. C'est les Grues qui t'ont rafistolés l'estime de soi?

[Vlad]

"Pardon ??" fit Retsu en se tournant vers la jeune femme.

[Hida Koan]

- Bah... T'as bien appelé Hirozaku, Shigueru et Kamodo "les gars" non? tu t'es pas fendu des protocolaires dono, tono, tenno ou je ne sais quelle autre marque de soumission bizarre

- On dit respect, Kei, c'est respect le mot que tu cherches, dit Hirozaku

- Oui bon et bien c'est à peu près la même chose, dit-elle en écartant la remarque de la main, en tous cas voilà, ça à l'air d'aller mieux... Enfin... de ce côté là, ça à l'air pas mail... La confiance en soi... Bref... Je me demandais d'où ça t'était venu.

ça finissait beaucoup plus piteusement que l'entrain avec lequel elle avait commencé.