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par matsu aiko » 24 sept. 2010, 23:14
L’impératrice tapotait son éventail de ses longs ongles nacrés d’or, clair signe d’impatience qui fit frémir son entourage. Cela faisait plus de vingt minutes qu’elle avait donné ses instructions, et le général n’était toujours pas là.
Refermant son éventail d’un coup sec, elle se tourna vers le grand chambellan.
- Hiroshi-san, allez me chercher Matsu Masashige-san, je vous prie, trancha-t-elle.
L’homme avala sa salive et s’inclina. Mieux valait ne rien dire quand elle était de cette humeur. Il lui faudrait prendre une solide escorte.
Après l’étrange visite de son second, l'attente recommença. Masashige eut le temps de boire une nouvelle tasse de thé. Mais il n'ignorait pas que même les Ministres attendaient avant de voir l'Empereur ou l'Impératrice.
Il fut donc en fait assez surpris que peu de temps après, des gardes impériaux apparaissent à la porte, lui annonçant que Hantei Kokiden-hime allait le recevoir, et lui demandant de bien vouloir leur remettre ses sabres. Il acquiesça, demandant à ce qu'ils soient remis à son second, Kakita Konoe.
Dix - non, douze gardes - compta Masashige. D'une nervosité notable, qui plus est. Ce n'était pas qu'une escorte d'honneur. Pour un peu, on aurait dit qu'ils accompagnaient un criminel.
Ils parcoururent ensemble les longs couloirs et arrivèrent à la salle d'audience.
Le message était clair. Ce n'était pas la mère du Prince Aîné, la femme qui lui avait demandé de veiller sur son fils, qui le recevait, mais l'Impératrice, celle qui avait droit de vie et de mort sur le Grand Intérieur.
Il entra, les gardes sur ses talons. L'Impératrice était assise sur une estrade, fastueusement vêtue comme à son habitude, sa garde personnelle derrière elle.
Sur le côté, vigilant, se tenait Daidoji Ryoma, presque invisible dans l'ombre.
Masashige avait eu le temps de se remettre de ses émotions et de réfléchir aux multiples directions que pouvait prendre cette entrevue. Il savait qu'il n'avait pas le droit à l'erreur. Il s'était passé quelque chose de grave hier soir et la vie du Palais semblait être sens dessus dessous, au point de perturber son fidèle second, Kakita Konoe. Il salua très cérémonieusement l'Impératrice Kokiden malgré son air grave et se tient bien droit, les épaules en arrière dans une position de guerrier. Il ne désirait qu'une chose, plonger son regard dans celui de l'Impératrice pour y chercher...pour y chercher quoi ? se demanda-t-il. Il savait à cet instant qu'Hantei Kokiden lui jetait un regard de glace...Il décida donc de fixer le sol à mi-chemin entre lui et l’épouse de l'Empereur.
- Matsu Masashige-san. Expliquez-moi à quoi vous pensiez en vous présentant au Daidari ce matin après avoir été suspendu de vos fonctions ?
La mâchoire de Masashige se décrocha. "Suspendu de vos fonctions ?!" était-ce bien ce que l'Impératrice venait de lui dire. Le Général y voyait clair, ainsi tout s'expliquait...
L'air estomaqué de son interlocuteur apporta à Kokiden la réponse qu'elle recherchait. Comme elle le pensait, il y avait bien anguille sous roche.
Il s'inclina.
- Pardonnez-moi votre Altesse, je ne comprends pas. Je suis suspendu de mes fonctions ? A quel titre ?
La sincérité de ses questions n'était pas feinte.
L'Impératrice fit un mouvement de son éventail. Les gardes impériaux reculèrent.
Elle entama d'une voix douce et égale.
- Hier soir, à l'heure du Boeuf, Matsu Masashige s'est présenté aux appartements du Ministre de Droite. Suite à ses propos insultants, celui-ci l'a suspendu de ses fonctions en présence de Seppun Shingen. Ce dernier l'a raccompagné à sa demeure, en dehors du Dairi. Les fonctions de général de Droite ont été confiées pour l'instant à Kakita Konoe.
Pour éviter tout signe de tremblement, Masashige mit ses mains sur ses genoux.
- Je vous assure, votre Altesse, que moi, Matsu Masashige, ne me suis pas entretenu avec votre père le Ministre de la Droite et que Seppun Shingen-sama ne m'a point raccompagné chez moi hier soir puisqu'à l'heure du Boeuf, j'étais en compagnie de Miya Tsuyu-san dans mes appartements. De plus je m'étonne que tous ici puissent croire qu'à un seul moment je puisse insulter Monseigneur le Ministre de la Droite, moi qui suis son Général et plus fidèle serviteur !
L'Impératrice le toisa d'un regard de glace.
- Peut-être, en effet. Certains des propos qui m'ont été rapportés ne sont pas cohérents avec la conduite d'un serviteur dévoué de la Droite. Et peut-être la personne qui me parle en ce moment n'est pas le vrai Masashige.
Instinctivement, la main du Général se porta à son obi. Seul le seppuku pouvait laver son nom de cette honte.
Mais il n’avait pas son wakizashi.
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matsu aiko le 02 oct. 2010, 23:04, modifié 1 fois.