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par Soshi Yabu » 23 mars 2009, 19:45
Non, en fait, on s'en fout de ma deck list, le deck ne fonctionne pas comme tel. Mais vous découvrirez dans la nouvelle qui suit les cartes que j'ai utilisé (nouvelle écrite pour le concours deck à tème du koteï)
JUNSHIN
« Savez vous donc ce que les scorpions nomment Junshin, Ikoma-san ? » Le magistrat impérial servait le thé à son invité, tout en alimentant la conversation.
« Soshi Yabu-san, il me semble que c’est ainsi que chez vous, l’on désigne les samouraïs qui suivent la voie de l’honneur. » Le courtisan Lion mesurait chacun de ses mots afin qu’ils ne soient pas douteux.
« C’est bien cela. Ceux qui, comme moi, sont accusés de ne pas suivre les traditions, comme celle de porter un masque. De ne pas suivre la promesse faite par Bayushi-okami à Hanteï-okami. Vous dérouterais-je moins si je portais un masque grimaçant, Ikoma-san ?
_ Non point. Mais il est vrai que vous faites sensation, à la Cour, lorsque vous y êtes invités.
_ Et pourtant, notre grand Daimyo, feu Bayushi Yojiro-sama, était qualifié comme tel, durant sa jeunesse. Encore qu’il me semble que votre clan le surnommait lui le « scorpion honorable ». Une belle marque d’attention, venant de modèles en la matière.
_ le clan du Lion s’efforce seulement d’être le meilleur des exemples à suivre, Soshi-san.
_ Il est vrai. Voudriez vous apprendre comment ais-je vécu, malgré cette marque supposée d’infamie ?
_ Ma foi, si vous le désirez, je vous écouterai, ce thé est tout simplement excellent, et les coussins confortables. »
Le Scorpion sans masque hocha la tête et sourit. Ils se trouvaient dans de beaux appartements de la cité impériale, peu après que l’Impératrice Iweko 1ère eut été bénie par les Cieux. Un autel à Fukurokujin tronait sur un pan de mur, des fleurs de chrysanthème égayant la place, et semblait particulièrement usité. Tout allait au mieux, et l’ambiance des lieux était d’une grande sérénité.
« Fort bien. Voici donc presque vingt-sept années que je suis né, en 1143, sur les terres de la famille Soshi. Mon père était lui-même un Junshin. Ou du moins, c’est ainsi qu’on le qualifiait.
N’ayant guère de talent apparent pour converser avec les kamis, mon père m’a fait prendre une voie fort prisée, dans ma famille, celle de la magistrature.
_ On dit que vous êtes de la lignée du grand Soshi Seibankan, glissa le Lion en profitant d’une pause du Scorpion. Celui que l’on considère comme le fondateur des lois impériales.
_ Cela est vrai. Autant vous dire que la bibliothèque familiale regorgeait de traités de droit, de commentaires de lois, et autres livres tout aussi passionnants. Notez que je ne regrette rien. Comment regretter de suivre la voie d’un aussi illustre ancêtre, d’honorer ainsi mes ancêtres ?
La réputation de mon père me suivit en permanence. Son éducation aussi, ce qui avait autrement plus d’importance. L’Honneur fût mon guide, en toutes circonstances, et jamais je n’ai dévié de ce chemin. C’est ainsi que je suis devenu Magistrat du clan du Scorpion, peu après mon gempukku. Bien entendu, je ne fûs pas assigné à des missions très intéressantes, à cette époque. Mon jeune âge. Et cette fameuse réputation… Hors de question de me confier les dossiers les moins propres. Sur les terres de la famille Rokugo, vassale des Bayushi, je ne vis rien susceptible d’attirer la Justice du clan.
_ Pourtant, cette famille a une réputation des plus détestables. Cela est su même de nous, c’est dire…
_ Vous avez raison. Mais depuis, j’ai appris à voir, pourrais-je dire. Ma jeunesse s’accompagnait d’un certain aveuglement, inutile de le nier. Ces choses-là, je n’ai pas su les voir. Mais, par contre, cela m’a permis de me faire remarquer. Un autre homme, Junshin, lui aussi, a souhaité voir mes talents à son service. Bayushi Norachai était un tout jeune membre des Magistrats d’Emeraude, mais surtout, il était le fils de Bayushi Yojiro-sama. Imaginez quel grand honneur ce fût pour mois, jeune Scorpion, jeune magistrat, que de me voir au service d’un tel homme, au sein de la magistrature impériale.
_ Etiez-vous déjà à son service lorsque vous rejoignîtes Ryoko Owari Toshi ?
_ Vous êtes bien renseigné, Ikoma-san. J’ai été appelé tandis qu’il reformait son équipe en vue de rejoindre cette cité. Bayushi Kosugi, fort connu maintenant, était aussi de son service. Je ne m’étais jamais rendu, jusque là, dans ce lieu. Je connaissais la réputation de cette grande ville, de ses maisons de geisha, de son île de la larme… Mais il m’a semblé juste de ne pas la juger sur sa réputation. Question d’habitude, sans doute.
Nous étions en terres scorpion, mais le seigneur magistrat Bayushi Norachai-sama n’était pas traité comme les autres. Cela se sentait à chaque fois que nous nous rendions à la Cour du Gouverneur de la cité. Nous n’étions pas vraiment de la famille. Mais peut-être était-ce pour cela qu’il avait été nommé en un tel lieu par Yasuki Hachi-sama, le Champion d’Emeraude. Il ne manquait pas d’entrer dans la plus juste fureur lorsqu’il découvrait que les siens lui avaient menti.
_ Et avez-vous fréquenté la Cour du futur Hanteï III ?
_ Non, je n’ai pas eu cette chance. Peut-être Norachai-sama avait-il cette opportunité, mais je n’étais qu’un yoriki. D’Emeraude, certes, mais un yoriki tout de même.
C’est sans doute à Ryoko Owari Toshi, que j’ai appris le plus à la fois sur mon clan, sur ma fonction, et sur ma position personnelle. Il ne fait pas bon, dans la cité des mensonges, être Junshin. Les vexations sont nombreuses, les portes se ferment, et vous en venez presque à vous prendre pour un étranger. Cependant, les messages d’encouragement de Bayushi Yojiro-sama, ainsi que ceux de Yasuki Hachi-sama, dont nous faisait part notre maître, nous ont permis de tenir dans ces désagréables circonstances. »
Soshi Yabu se leva tranquillement et continua à parler tout en cheminant autour de la table.
« Je crois que l’on peut dire qu’ensuite, je dois tout au seigneur Bayushi Norachai-sama. C’est sans doute grâce à lui, que j’ai été nommé Magistrat d’Emeraude quelques années après cette période. Je sais, vous alliez me dire, Ikoma-san, que l’on prétend que c’est une faveur impériale, qui en est à l’origine. Mais ce sont là des flatteries. Le Champion d’Emeraude était un proche de Norachai-sama, et j’ai pu ainsi le côtoyer quelque peu. C’est l’explication la plus évidente. Donc, j’ai été envoyé pour restaurer l’ordre sur les terres Yasuki. Enfin, dans un petit coin, de ces terres. La paix du Shogun ne réglait rien. Les armées de Kaneka-sama permettaient juste que les évènements n’aient pas de conséquences trop désastreuses. Dans mon petit coin perdu, j’ai au moins réussi à ce qu’un semblant d’ordre impérial demeure. Je n’avais en tout et pour qu’un assistant du clan du Moineau, un Suzume du nom de Ito, et une dizaine de Doshin pour remplir mon devoir. Mais heureusement, la force de l’honneur, de la vertu, et surtout notre volonté de ne pas commettre d’indélicatesses politiques, a permis de rallier quelques personnes influentes à notre cause. Notre discours apaisant pris toute sa valeur, surtout que nous, n’étions point dotés d’une armée vorace et ravageuse pour le faire valoir. »
Soshi Yabu s’arrêta de parler pour guetter une réaction de son interlocuteur, qui ne vint pas, alors il continua.
« C’est après cette difficile mission que j’ai été invité prendre un poste plus calme, mais plus intéressant aussi, Shiro Akodo. C’est là que nous nous sommes rencontrés, d’ailleurs, si je ne me trompe pas. Il y avait là déjà un yoriki impérial, Soshi Idaurin, que j’ai été particulièrement ravi de trouver à cette place. Il a su m’instruire de toutes les finesses de ce si important palais, et je n’ai même pas eu à trop redire de ses valeurs morales. Et puis je connaissais ses compétences, qui ne sont pas celles d’un Kitsuki, mais dont je n’ai personnellement pas à me plaindre. Trop peu de Soshis fréquentent les Cours des autres clans. Surtout, cette période m’a permis de mieux comprendre cette vertu que je me prétendais porter, l’Honneur. J’ai pu me rendre en pèlerinage sur la tombe d’Akodo-Okami. Ce n’était pas un voyage aisé, mais je ne regrette pas de l’avoir fait, les pèlerinages ne sont pas fait pour se pratiquer sur des coussins moelleux. J’y ai repris de la force, de la foi. Il n’était pas question de renier le kami fondateur de mon clan, mais plutôt de retrouver le second de mes deux parents. Cela doit être étrange à entendre, pour un membre du clan du Lion, et encore plus venant d’un membre de celui du Scorpion. Et pourtant… Et pourtant… L’exemple du sacrifice d’Akodo-Okami n’est-il pas universel ? Quelle plus belle preuve d’honneur, que de mourir pour défendre ceux que vous aimez ? Il est l’exemple même de la façon dont un samouraï peut envisager sa mort. Ce fût pour moi comme être défait par la vérité. Comme si les bases d’un nouveau mur, indestructible, avait été forgées. Les doutes, qui parfois avaient pus s’accumuler en moi, furent réduits en cendre par l’aura de ce lieu. »
Le magistrat fit une nouvelle pause, prit une fiole dans son obi, bu une rasade d’eau, et replaça le tout à sa place.
« Je ne vous en propose pas, Ikoma-san, je doute que vous ayez plus soif que moi.
Où en étais-je ? Ah oui, Shiro Akodo. Je me souviens de notre première rencontre, Ikoma-san. C’est en cette occasion que j’ai regretté de ne point avoir reçu de formation au combat. Je vous pensais courtisan, comme moi, et c’est pour cela que j’ai accepté ce duel impromptu que vous me lançâtes. Non un duel de courtisan, mais un défi de guerrier. J’ai perdu, magistralement. Toutefois, nos échanges de civilités suivants furent bien plus empreints de courtoisie. Et je ne regrette pas ma douleur de ce jour.
D’autant que nous nous retrouvâmes ici, à Toshi Ranbo, siège du pouvoir de la famille Toturi, quelques années plus tard. J’y fûs invité à la demande de Shosuro Maru-sama, qui cherchait un connaisseur des lois pour l’accompagner en ces lieux. J’ai longuement réfléchi, avant d’accepter. On ne quitte pas la Magistrature d’Emeraude comme cela, surtout après une carrière aussi bien menée que la mienne. Mais pourtant, j’ai choisi de la rejoindre. Sans doute le besoin de me sentir plus Scorpion, après m’être senti Lion. Cette femme, lorsqu’elle était encore humaine, était déjà étonnante. Il n’était point étonnant que le seigneur Bayushi Paneki ait fait d’elle une femme de premier plan. Son yojimbo, Bayushi Muhito, était lui aussi étonnant. Son amour pour une Grue me fit écrire de fort beaux poèmes, dont je vous fais la grâce en ce moment, pour ne point offusquer la vieille inimitié entre vos deux clans. Il a été étonnant de les voir devenir des champions de Vertu, tous deux. Cette expérience les a transformés.
A vous voir, Ikoma-san, je sens que vous brûlez de savoir qui est Bayushi Nomen, notre célèbre courtisan. Et vous brûlez de savoir si la Voix d’Obsidienne sait elle-même qui il peut être. Mais non, je ne vous ferai pas cette révélation. Laissez nous conserver quelques secrets, lorsqu’ils permettent de s’amuser à la Cour. Qui sait, peut-être commettra-t-elle un jour quelque maladresse qui puisse vous donner la réponse… Et si l’un de vous autres, courtisans, parvient à lui attribuer une faute, nous en rirons ensemble.
J’y penses, j’ai disserté, longuement, mais plus tellement sur les Junshins, ne parlant que de moi. Sachez donc que nous avons tout de même un poids en particulier sur les épaules. Le dojo du Voile du Mensonge, s’assure de notre loyauté envers le clan, en nous demandant régulièrement de soutenir des actions déshonorantes, afin de nous mettre en porte à faux par rapport à nos valeurs. Parfois même, cela implique de regarder se mourir un ami fidèle… Je pense que le poison placé dans votre thé a largement fait effet, et que je commence à parler pour moi seul.
Serviteurs ! Appelez donc Bayushi Arunsa et Bayushi Hirose, qu’ils viennent remplir leur office. »
Lorsque Soshi Yabu eut baissé la voix, un homme vêtu de manière humble apparu de derrière le panneau shoji, dans son dos. Il s’inclina vers le magistrat.
« Merci seigneur, d’avoir pris part à cette mission. Je pense que mon dojo sera satisfait de son déroulement.
_ Je ne crois pas, non. Je pense qu’ils seront très peu satisfaits de votre réussite partielle, mais qu’ils sauront passer outre cette déception.
_ Ma réussite partielle seigneur ? »
Soshi Yabu se tourna et dans un éclair d’acier, sortit son wakizashi.
« Oui, il est temps pour moi de mettre fin au déshonneur de ta mission. Rassures-toi, tu ne souffriras pas aussi longtemps que mon ami que tu viens d’empoisonner. Je suis doté d’une certaine compassion, pour ma part.»
« Repose ta lame, courtisan, » dit le ninja. « Tu n’es pas aussi habile que cela au maniement des armes. Je t’ai bien écouté pendant que tu parlais. Et tu n’es pas un traître au clan, n’est-ce pas ?
_ Non, et c’est bien pour cela que cette lame Tsi a attendu que tu ais rempli ton office, avant de rendre justice. »
Celui qui n’était encore qu’étudiant en ninjutsu commença à se mettre en garde, mais il n’y eut qu’une première et dernière frappe. Celle de l’acier béni qui vint s’enfoncer dans le corps de celui qui n’avait pas encore passé son gempukku, et qui ne le verrait jamais advenir.
« Tandis que tu te meures, sache que je servirai toujours la cause de la Justice Impériale.
Je ne vends pas mon honneur, même pour mon propre clan. Tu as oublié, ce qu’était un Junshin. Tu ne referas plus cette erreur. »