[2.14-all] Des profondeurs au Tengoku

[Hida Koan]

Kei tourna encore dans sa tête les phrases incompréhensibles du prisonnier mais décidément rien ne venait... Elle réagit à la proposition de Retsu.

"Peut-être. Bien, emmenez-le au palais du Conseil**. Veillez à ce qu'il ne s'échappe pas... de quelque manière que ce soit." dit-elle en se tournant vers leurs hommes.

Ils étaient en plein dans l'heure du Bœuf, et elle devait encore retourner chez son frère. Ils pourraient sûrement retourner voir le prisonnier demain, la nuit leur porterait peut-être conseil.

** je ne sais pas où on interroge les gens, où il y a des geôles (je sais qu'à la magistrature il n'y en a pas mais c'est à peu près tout... Si je dois changer d'endroit dites le moi. Kei mentionne "le bon endroit en tous cas")

[Vlad]

Retsu regarda les hommes emmener le prisonnier puis soupira.

"Je doute qu'il puisse nous apprendre grand chose..." fit-il à demi-voix.

[Hida Koan]

" Peut-être que demain, le choc passé il sera plus bavard... Ou plus clair plutôt."

Elle se dirigea vers la porte pour sortir dans la cour.

"C'est quoi cette histoire de nikumisu?" ça lui disait quelque chose, mais vaguement.

[Vlad]

Retsu la suivi, comme il en avait l'habitude.

"Il s'agit d'une créature de l'Outremonde... Une vraie saloperie..."

"Ce sont des sortes de vers, grands comme ton index... Ils se cachent dans les anfractuosités, sous les cailloux ou dans les troncs des arbres..."

"Quand ils te mordent, ils cherchent ensuite à se glisser sous ta peau pour dévorer peu à peu ta chair... Ils se frayent lentement un chemin jusqu'au cœur de leur victime..."

"J'ai déjà été mordu par une de ces saleté une fois... Ça fait sacrément mal... Heureusement j'ai pu l'écraser contre une pierre avant qu'elle ne rentre dans la plaie..."

[Hida Koan]

Ah oui. Ça lui revint, les cours sur les créatures de l'Outremonde remontaient à loin, et sa pratique était inexistante ou presque.

" C'est la journée dégueulasse aujourd'hui." marmonna Kei en faisant une horrible grimace.

" Et bien... Je suis sûre que tu peux garder le reste de tes expériences pour toi aujourd'hui. Une autre fois ? Gardes-en un peu pour les autres jours d'accord ?"

Elle visualisa un horrible ver, avec des dents, s'infiltrer sous sa peau et réprima un frisson. "Mais c'est vraiment répugnant... Du coup je suppose que ce n'est qu'un nom, pas vraiment plus. Quelqu'un qui trouve que certains dignitaires sont pourris jusqu'à la moelle. Je ne sais pas. Je n'ai pas compris grand chose à ce qu'il a dit."

Elle soupira de frustration. Elle avait cru que ça pourrait avancer ce soir, et finalement pas tant que ça.

[Vlad]

"Mouais" fit Retsu en guise de réponse.

"Ce n'est pas une bonne journée..." fit-il avec un sourire en coin.

"Je pense qu'effectivement ils doivent penser que les dirigeants de Sunda Mizu Mura sont corrompus... C'est pour ça qu'ils laissent des papiers avec les vertus qu'ils pensent manquer à leur victime..."

Il fit un regard en coin à sa camarade.

"Si on me retrouve un jour avec un papier "virilité" déposé à côté de moi, je pense que l'on ne te suspecteras même pas, Kei-chan..."

[Hida Koan]

Elle sourit à la boutade et pensa à des choses vraiment inappropriées.

" Ce n'est pas une vertu, il me semble... Ça devrait ! Mais ce n'en est pas une. Je ne serai jamais hors de tout soupçon malheureusement."

Au lieu de se diriger vers le bâtiment, elle se dirigea vers le portail. Elle avait envie d'y aller dans un sens, dans l'autre pas du tout... Elle n'avait pas le choix de toutes façons, elle avait dit à son frère qu'elle rentrerait. S'il ne la trouvait pas là-bas au réveil, il s'inquiéterait.

[Vlad]

Retsu fut surpris en la voyant se diriger vers la sortie du dojo mais il l'accompagna jusqu'au portail sans rien dire.
Il était évident qu'elle allait partir mais pour aller où ?
Elle semblait sereine, pas à bout de nerfs comme elle avait pu être quand ils s'étaient "retrouvés"...

"Y a-t-il des choses que tu veuilles que je gère en ton absence, Kei-chan ??" lui demanda-t-il.

[Hida Koan]

"Non, non c'est bon. Je reviens demain matin, je vais juste passer la nuit ailleurs. Je ne pars pas pour toujours, hein !"

[Vlad]

"D'accord" fit Retsu avec un sourire.

"Passe une bonne nuit, Kei-chan."

[Hida Koan]

"Bonne nuit" répondit-elle sobrement après avoir cogité de longues secondes.

Elle se pressa un peu sur le chemin, ressassant tous les évènements de la journée, essayant de se focaliser sur ceux du soir. Quand elle passa devant le quartier nobles, les hommes passaient tout juste la porte avec le prisonnier. Elle fit un signe de la main aux gardes mais ne s'arrêta pas. Elle croisa une patrouille de la Garde Grise non loin de la place des forges. Ils reconnurent un Garde des Eaux et ne lui firent aucun ennui.

Finalement elle aurait voulu ne pas venir seule ici. Pourtant si elle avait demandé à son frère de venir cette nuit c'était pour réfléchir. Quand elle avait commencé à avoir plus chaud qu'elle n'aurait du, bien plus chaud qu'elle ne l'aurait voulu, elle s'était presque vu demander à Retsu de l'accompagner. Elle qui voulait lui faire payer son comportement de la journée, c'était retrouvée coincée entre le marteau et l'enclume : rester avec lui ou tenir sa décision. Elle avait promis à son frère de revenir alors elle était revenue, sans lui, comme prévu.

Elle mit la clef dans la porte et tourna, en essayant de faire le moins de bruit possible. Il était tard, très tard, son frère et sa belle-soeur étaient déjà couchés, aucune lumière ne filtrait sous la porte. Elle jura tout bas en passant derrière le battant qui racla par terre. Elle ne voulait pas se cogner partout dans la boutique et faire tomber des objets, ce qui ne manquerait pas de réveiller tout le monde. Elle se dirigea finalement dans la pièce sombre comme si elle y voyait clair comme en plein jour. Elle attrappa une bougie, l'alluma et la posa sur le comptoir. Avec celle-ci, Kei embrasa un petit cône d'encens dans une coupelle, qu'elle voulut aller poser près du futon que Utagawa et Akiko auraient du lui installer. Elle ne trouva rien et reposa donc ce qu'elle avait en main sur le comptoir. Elle entendit une voix grave chuchoter depuis le premier étage "On t'a mis le futon dans la forge finalement. On avait peur que tu rentres tard et qu'on soit forcés de ne pas ouvrir le magasin demain matin si tu dormais en plein milieu de la pièce. J'ai fini de travailler il n'y a pas si longtemps alors laisse un peu ouvert sinon tu vas mourir de chaud. Bonne nuit ma soeur."

Kei souffla la bougie, et fit glisser le shoji qui donnait sur la cour. Elle retourna près de la porte d'entrée, referma à clef et posa la clef sur le comptoir. Elle était contente de dormir dans la forge. Elle l'avait fait de nombreuses fois, enfant, surtout l'hiver... Il faisait plus chaud là-dedans que dans la maison. Elle traversa la cour, passa près du baquet de bain qui était encore là, rempli d'eau froide et ouvrit l'atelier. La chaleur lui sauta au visage. Utagawa avait fait un peu le ménage et passé un coup de balai avant de poser le futon par terre. Kei fit le tour de la pièce d'un regard, une lueur rougeoyante éclairait cet endroit qu'elle connaissait si bien. Une petite marmite en fonte était posée en haut du fourneau, promesse tenue de sa belle-sœur. Elle mit une bonne dizaine de minutes à retirer son armure et autant à la poser correctement sur l'établi. Elle ferma finalement la porte de l'atelier et se déshabilla, elle voulait avoir chaud cette nuit. Elle attrapa le récipient avec un gant de son frère et s'assit sur le futon. Elle avait oublié les baguettes sur la petite table, elle mangea avec les doigts : la lassitude de toute cette journée l'avait finalement emporté. Elle avait oublié le baume au dojo, elle espéra ne pas le regretter demain.

Elle mit un long moment avant de trouver le sommeil, la tête pleine d'images tantôt affreuses, joyeuses, sérieuses ou légères. Elle se demandait bien ce qu'elle allait faire dans les semaines à venir, tant pour ces enquêtes compliquées que pour Retsu.

[Vlad]

Retsu eu un pincement au cœur et laissa malgré lui échapper un soupir en la voyant partir.
Après ce qu'il s'était passé dans l'après-midi, il se doutait bien qu'elle ne voudrait pas rester avec lui...

Elle n'était pas fâchée après lui... Il sentait plutôt qu'il l'avait déçue... Ce qui était sans doute bien pire...

Il se dirigea jusqu'à ses appartements d'un pas lent et fatigué. Il n'avait presque pas dormi, il ne tarderai pas à sombrer...

[Hida Koan]

Elle fut réveillée par son frère, très tôt, quand il vint ouvrir la porte de la forge.

"Tu t'es couchée à peine plus tard que moi alors il est bien l'heure de te lever."

Elle se cacha la tête sous les couvertures. Elle serait bien restée là toute la journée, ici personne ne penserait à venir la chercher. En plus la nuit ne l'avait pas réellement aidée. Les diverses enquêtes, qui semblaient de temps en temps se télescoper, étaient toujours un infâme pataquès; et ce qu'elle pensait de Retsu... Et bien, elle ne savait plus trop bien. Ce que lui avait au moins permis la journée d'hier c'était de sortir la tête de l'eau et de remettre dans l'ordre le monde réel. Coucher à tort et à travers ça d'accord. Euh... Tu es bien sûre de ce que tu dis ? Non, mais c'est une façon de parler seulement. Mais être avec le même homme, tous les soirs. Tous les jours même ! Sans se cacher... Ça ne pouvait pas continuer comme ça. On ne pouvait pas avoir un tel comportement et faire comme s'il ne se passait rien. Ça ne marchait pas comme ça, le monde normal. Elle s'était bien échinée ces quelques derniers jours à ne pas aborder le sujet, ni même à y penser vraiment. Mais ne pas laisser le problème vous effleurer l'esprit et le reléguer à "on verra plus tard" ne le faisait pas pour autant disparaître.

"Lève-toi marmotte. J'ai remis de l'eau chaude dans le bain." dit son frère tout près de sa tête.

Elle maugréa quelques minutes encore. Utagawa ralluma le fourneau. Oui, il fallait qu'elle décide ce qu'elle allait faire. Rien sinon, se laisser porter, c'est bien aussi, dit sa pernicieuse conscience. Non, il faut choisir. Elle s'assit sur le futon et repoussa la couverture pour se lever. Sinon tu n'as qu'à lui demander de se marier avec toi... Kei eu un petit rire sans joie, qui fit se retourner son frère. On est trois maintenant c'est ça ? Bonne conscience, mauvaise conscience et moi ? Elle se dirigea vers le baquet dans le froid matinal. Tu pourrais choisir demain alors si tu ne sais pas.

Son frère l'avait suivie.

"Tu sais Kei-chan..."

Elle se retourna. Oui, demain ce sera bien du coup, on n'est pas pressés. Utagawa la souleva de terre et finit sa phrase en la jetant dans le baquet

"... je n'ai pas vraiment remis d'eau chaude mais je pense que ça va te réveiller."

L'eau glacée lui mordit la peau, elle se redressa comme un ressort, debout dans la baignoire.

"Tu vas me le payer tu sais !" cria-t-elle alors qu'il essuyait une petite larme de rire au coin de son oeil.

" Arrête, tu vas réveiller les petits" répondit-il avec une excuse bidon. "On dirait un chien mouillé... Tu sens le chien mouillé d'ailleurs."

Elle se lava tant bien que mal, à l'eau gelée, en marmonnant des "Je vais attraper la mort tu seras bien content", "la vengeance est un plat qui se mange froid", "je te réserve un chien de ma chienne"... N'empêche qu'il avait eu le nez fin, elle était bien réveillée maintenant et il n'était pas tard du tout. Elle prit un thé, un peu de riz, avec son frère et sa belle-soeur, attendit que les petits se lèvent, puis après les avoir embrassés, repartit pour le dojo.

[Vlad]

Quand Kei arriva au dojo, Retsu était de faction au portail comme si il n'avait pas bougé depuis la veille.
Le regard perdu dans le vide, il affichait un air soucieux.

Lorsqu'il aperçu Kei son air renfrogné disparu et, quand la jeune femme parvint à sa hauteur, ce fut avec un sourire qu'il l'accueilli.

[Hida Koan]

Voyant Retsu à la porte elle s'accrocha à ses bonnes résolutions : ne rien faire du tout. Elle sourit en s'approchant.

" Tu as dormi là ou quoi ? " dit-elle en riant de manière un peu forcée.