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par Ding On » 23 nov. 2007, 09:56
Beowulf :
Enfin le retour à de la vraie fantasy (après les enfantins ratages Narnia ou Eragon), un retour aux sources d'une certaine façon puisque ce film est l'adaptation du poème épique du même nom, oeuvre phare de l'épopée anglo-saxonne et nordique dont Tolkien s'inspira entre autres pour son SdA.
Evacuons dès le début le débat sur la technique : Zemekicks est un de ces réalisateurs qui aiment à expérimenter, tester de nouvelles technologies, pousser le médium cinéma le plus loin possible. Ancien poulain de Spielberg, il a gardé de son mentor le goût du spectacle généreux et c'est sans doute la raison pour laquelle il a décidé d'utiliser la nvlle technique de la performance capture pour porter son Beowulf à l'écran. On le comprend rapidement au vu des images : faire ce film en live aurait assurément coûter le double, pour un résultat forcément pas aussi proche de ce que voulait le réalisateur.
Il ne faut pas plus de cinq minutes pour oublier totalement que l'on est en face d'images de synthèse. Dès que l'on est plongé dans l'ambiance, on n'y fait même plus attention : ce sont bien des acteurs que l'on a devant nous, et de nombreuses scènes donnent tout son sens au performance de performance capture. Bien qu'il reste qques passages faisant tiquer, l'ensemble est bluffant de photoréalisme. Pas seulement les visages ou les cheveux, mais les décors, les accessoires, les armes (les mailles paraissent réellement peser !), etc. Bref : nul doute que l'on est en face d'un film, un vrai, et pas juste une démo technique mise en scène par un roublard qui n'aurait rien à dire.
Bien qu'usant de quelques plans purement "épate", Zemekicks se refuse à laisser la technique prendre le pas sur le reste. Au final, la mise en scène reste très classique : tant mieux d'une certaine façon car les nbx dialogues ou scènes intimistes prouvent que les acteurs modélisés ne perdent en rien leur charisme, leur talent. Pas d'esbrouffe mais du solide, du carré, de l'immersif : servant à merveille l'ambiance de cette époque, de cette contrée. Et lorsque arrive l'action (l'attaque du Grendel, une brève bataille, un combat contre un dragon, etc.), le découpage est d'une lisibilité incroyable : tout est clair, le montage reste fluide, le spectacle en est assuré car on a droit à qques plans réellement impressionnants. Le combat contre le dragon est un morceau de bravoure tel qu'on est pas prêt d'en revoir de sitôt notamment.
Bref : toutes les craintes que l'on pouvait avoir du point de vue de la technique adoptée sont dissipées très rapidement. On sort de la salle avec la sensation d'avoir vu un vrai film, je le répète, et non une croûte numérique. C'est déjà un exploit en soi.
Mais ce n'est pas le seul.
Car à cette forme à la fois innovante et classique, s'associe un fond intelligent, un scénario très bien écrit (bien que trop court à mon goût), une atmosphère restituée à la perfection. Les parents qui pensaient emmener leurs enfants voir un Narnia bis sauce Pixar en seront pour leurs frais qd s'entonneront les chants paillards de Vikings avinés, que la violence leur éclatera au visage, que l'histoire s'assombrira peu à peu...
Beowulf n'est pas qu'une péllicule de fantasy, suivant servilement et pas à pas le Monomythe. C'est aussi et avant tout un récit sur la construction d'une légende et sa perpétuation malgré une réalité moins glorieuse, à une époque où les mythes païens vivent leurs derniers jours (ce qui est montré via l'arrivé du christianisme), où les hommes en cette période de transition ont plus que jamais besoin de héros même en sachant ceux-ci imparfaits et menteurs : seuls comptent les chants glorieux qui donnent de l'ardeur au ventre, qu'importe que la vérité soit plus nuancée.
Tous les personnages prennent donc leur place dans cette tragédie quasi antique, servis par les acteurs qui leur prêtent leurs traits et leur talent. Beowulf est ce jeune héros gouailleur prêt à tout pour marquer la légende et qui finira par en payer le prix. Rothgar est ce vieux roi, d'une autre époque, rattrapé par ses péchés et destiné à ne pas connaître le nveau monde. Le Grendel est la créature tragique à l'orgine de toute l'épopée, être pathétique sublimement transposé. Etc. Film d'acteurs et d'histoire bien avant d'être film à grand spectacle, c'est sans doute là la force de Beowulf : parvenir à instaurer l'esprit épique des anciennes légendes dans un récit comptant peu de scènes d'action et reposant essentiellement sur les dialogues (dits et non-dits). C'est l'essence même de l'épopée qui est restituée, sa confrontation avec le réel aboutissant à un goût de cendre et d'incertitude qd vient l'image finale...
Pour un quasi coup d'essai (Beowulf n'est que le 3ème film usant de la performance capture et le 1er qui ait des ambitions si réalistes), Zemekicks réalise à mon sens un coup de maître. Une oeuvre qui ira rejoindre Conan et la trilogie du Seigneur des Anneaux au panthéon des légendes de la fantasy cinématographique. Un film qui ne sacrifie jamais sur l'autel du spectacle ou de la prouesse technologique ses multiples niveaux de lecture. Alors certes, peut-être vieillira t'il à mesure que la performance capture s'affinera ; du moins son apparence. Mais son coeur même, son message et son âme ne prendront pas une ride : tel le Beowulf vieillissant mais saisissant son épée pour aller tuer un dragon.
Hitler, qui était beaucoup plus petit que Mannerheim (Mannerheim mesurait plus de 1,90 m), portait des talonnettes et avait demandé à ses photographes de trouver un angle favorable pour la photo officielle.
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