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par Pénombre » 06 déc. 2011, 14:31
Comme je suis ici en touriste, et que je ne suis plus du tout impliqué dans la vie de la Voix, et que je n'ai jamais fait partie du CA, je me vois mal donner des leçons ou faire part d'une expérience particulièrement valorisante. Ni de dire "celui là, il est bien, l'autre là on doit pas le garder".
Le fait est, et j'imagine que pour la majorité des adhérents ça doit être un peu pareil, que l'activité de l'association est relativement transparente, pour nous. C'est à dire qu'on sait ce qui est fait, mais pas forcément comment les gens qui l'ont fait s'y sont pris, les difficultés rencontrées, les imprévus ou les renoncements.
Notez bien que c'est inhérent à un fonctionnement associatif : on délègue à un comité le pouvoir de gérer le quotidien de l'association, et on remet tout à plat lors des AG.
Je dois avouer, en tant que touriste qui ne s'implique guère dans la vie de l'assoce, que j'aurais bien du mal à cautionner ou critiquer l'action de l'équipe qui anime l'association, parce que, justement, je ne m'implique pas dedans : je ne participe pas aux manifestations, je n'en monte pas non plus, je n'ai pas l'occasion de rencontrer régulièrement d'autres membres, etc. Et je peux raisonnablement supposer que la majorité d'entre nous, qui vous lisons, sommes dans ce cas.
Mais je peux parler d'un truc donc évoqué plusieurs fois ici : Sunda Mizu Mura.
Sunda a été un projet de longue haleine, initié par Akae, développé avec moi, et qui a également motivé plusieurs illustrateurs et un maquettiste et des relecteurs, de manière entièrement bénévole. La majorité, la quasi-totalité des personnes impliquées, ont été ou sont membres de l'association. Et le fait que certaines n'en soient pas n'est pas une tare en soi, mais une preuve de rayonnement. Parce que ces gens ne sont pas venus "pour voir", mais "pour faire" à temps perdu, par plaisir.
Akae a lancé Sunda il y a plus de cinq ans, et c'est Koan qui lui a proposé de l'intégrer pleinement dans l'activité de l'association. Afin de pousser le projet en avant, de lui donner plus de rayonnement, et de montrer également que c'était bien des gens membres de la Voix, (et avec Akae, c'est par la voix qu'on s'est connus d'ailleurs, lui et moi...) qui en étaient les acteurs. Là, on était en plein dans l'interface entre une association et ses membres.
Il y a déjà plus de deux ans, nous étions plein de zèle et prêts à en découdre, le projet avançait bien, toussa. Deux ans... et puis, et bien, on s'est dispersés, la vie réelle nous a entrainé dans d'autres directions, le projet s'est poursuivi en pointillets, s'est arrété, a repris, etc. Mais ni Koan, ni Akae ne l'ont abandonné. Ni l'association, ni l'initiateur de Sunda n'ont abandonné. Et à titre perso, je peux dire que j'ai suivi leur rythme, que j'ai fait avec eux comme je le pouvais quand je le pouvais, et je ne suis pas le seul.
Le résultat, c'est que maintenant, on est dans la dernière ligne droite. Malgré des hiatus, malgré des discussions, des divergences parfois, on est plus dans les affres de la création, mais dans les interrogations logistiques. Dans un avenir proche, nous tiendrons dans nos mains le résultat de tout ce parcours. Et en tant qu'auteur de jdr qui participe également à des projets professionnels, je peux dire que Sunda aura toujours pour moi une place à part, et bien plus d'importance que des trucs plus médiatisés (et tout aussi énormes à leur manière) auxquels j'ai participé. Parce que malgré tout, c'est à travers l'idée originale d'une personne, et la bonne volonté d'un groupe dont chaque membre avait autre chose à foutre de sa vie, qu'on va arriver au but.
Je ne suis pas un spécialiste de l'orga de manifs, donc, je ne peux rien dire en la matière. Mais question projets de création collective, je commence à en savoir assez pour pouvoir dire une chose : peu de gens imaginent à quel point un projet collectif vieux de cinq ans, initialement une affaire perso dont se sont emparés plusieurs autres personnes, peut en arriver au stade actuel sans que cela ait un caractère véritablement miraculeux. Et ça ne résulte pas d'une intervention divine, mais de l’intérêt de gens qui malgré d'autres envies, préoccupations, évènements, ont poursuivi à leur rythme et comme ils ont pu cette affaire, en dépit des blancs, des retards, des imprévus et des quiproquo.
Dans un âge d'or mythique et lointain, la Voix de Rokugan produisit deux ouvrages célèbres (Gozoku I et II) qui incitèrent certains ici à reprendre le flambeau. Dans un âge d'or moins mythique et moins lointain, la Voix de Rokugan organisa des concours de scénario, primés et jouissant d'une certaine audience.
Dans un âge d'or tout à fait réel et présent, la Voix propose à un prix défiant toute concurrence une somme astronomique de créations (nouvelles, scénarios, recueils) à ses adhérents. Et, si on prend le cas de Le Yan par exemple, ces créations sont réalisées bénévolement, à temps perdu, comme Sunda en fait.
Tout cela ne fut pas réalisé par les Grands Anciens dont les noms hantent les premiers numéros de membres de cette communauté, et qui auraient disparu pour laisser la place à une bande de branleurs vivant sur les décombres de l'âge d'or.
Ce que je veux dire par là, c'est que perso, je me fous pas mal de savoir qui a raison, tort, est coupable ou tout ça. Et je doute FORTEMENT que la majorité des membres de l'association s'en préoccupent. Ce que je sais, parce qu'il en va de même dans toutes les assoces quelle que soit leur thématique, c'est que l'on a toujours un noyau de gens qui veulent faire, un certain nombre de gens qui participent ponctuellement, et pas mal de gens qui sont membres mais qui n'ont pas l'intention - sauf cas exceptionnel qui les motive - de faire plus. Et bon, on est pas dans une association à but humanitaire, mais dans une assoce de promotion d'un loisir, donc, les histoires de responsabilité, de motivation et même de mauvaise conscience n'ont guère de pertinence, s'pas ?
Ce que je sais, donc, c'est que c'est parce que les gens qui forment le noyau dur ne baissent pas les bras qu'une association perdure, voire grandit. Et que s'il y a désaccords, ça ne peut donner que deux résultats :
- soit une majorité de gens capables d'agir et avec des idées se dégage, et l'assoce avance malgré les divergences, voire le mécontentement.
- soit cela ne se produit pas, et l'association périclite. Mais les divergences et le mécontentement, eux, sont quand même là.
Alors pour le dire plus clairement, soit les gens qui veulent bouger se parlent vraiment et débattent des véritables problèmes de fond : que faisons nous, comment, dans quelles perspectives, pourquoi. Soit cela est entremélé de déceptions, de rancoeurs, de règlements de compte et ça finit par perdre son sens.
Parce que, au final, quels que soient les torts des uns et/ou des autres, si on reste dans le registre de compter les points pour savoir qui est coupable de quoi, qui a commencé, qui a merdé à quel moment... on avance pas, on finit par se tirer dessus et au final, tout le monde perd.
Il est sans doute nécessaire qu'à un moment ou un autre certaines personnes aient une bonne discussion, en direct, sans personne autour, sans public qui ne connait qu'une partie de tout ça, et qu'elles soldent ce qui peut être soldé. Ou qu'elles constatent qu'elles ne peuvent y parvenir. Dans les deux cas, cela aura au moins le mérite de savoir jusqu'où il est possible d'aller ensemble, voire d'aller tout court.
Mais si on en reste dans le règlement de compte médiatisé, dans les procès et contre-procès, ce qu'on obtient du public, c'est pas la vérité, c'est pas la solution. Ce qu'on obtient, c'est que les gens encore intéressés se rapprochent de la personne qui leur plait le plus et que la majorité des gens attendent simplement de passer à autre chose.
Ce qu'on crée donc, c'est des factions, qui perpétuent les tensions, jusqu'à la conclusion inévitable : soit l'un des deux s'en va, soit l'association explose.
Et c'est très exactement ce vers quoi on se dirige, là. Et je me fous, personnellement, de savoir qui a commencé, qui entretient ça. Je dirais juste ceci : il n'est pas trop tard pour faire preuve de lucidité, tendre la main pour essayer de trouver UNE AUTRE solution que celles proposées, que la répétition d'échecs et d'antagonismes qui ne feront qu'accélérer les choses. Et si les choses arrivent à leur terme, on aura ça : des gens amers parce que directement mis en cause, et puis une majorité de spectateurs qui diront simplement "bah, c'est trop con, mais bon, la vie continue".
Et là, oui, tout le monde aura perdu.
Notez bien que ça ne me concerne même pas, hein. Mais bon, je connais quand même le passé de cette association. Je connais une partie des gens qui la portent à bout de bras, et je me dis juste : est ce qu'on est obligé d'en arriver là ? De répéter les mêmes engueulades, d'augmenter d'un côté le ras le bol et de l'autre la frustration, jusqu'à ce que ça pète une fois pour toutes ?
C'est à vous de trouver la réponse. Mais comprenez bien une chose : si la Voix sort de cette épreuve et rebondit dessus pour refondre son activité, de quelque manière que ce soit, ça ne sera pas un miracle, un coup du sort. Ca sera votre réussite. Parce que vous l'aurez initié, ou que vous aurez soutenu ceux qui l'auront initié. Ou même, parce que malgré votre désaccord, vous les aurez laissé faire.
Mais ça, ça veut dire laisser tomber la guerre. Maintenant. Tout de suite. Et ici, personne n'a besoin de vous voir le faire, personne n'a besoin de savoir ce que vous discuterez pour mettre un terme aux hostilités, d'une façon ou d'une autre. La seule question, c'est de savoir si ces hostilités vont se terminer parce que vous aurez agi, ou qu'elles vont continuer jusqu'à ce que quelqu'un s'en aille, ou même que tout le monde s'en aille.
Ce sont les conséquences de vos actes qui vont déterminer l'avenir de cette association. Et rien de plus.
Ca ne fait pas de vous les responsables de la motivation (ou de l'absence de motivation) du reste d'entre nous. Ca fait juste de vous ceux qui auront fait le maximum pour que le plus grand nombre de gens s'impliquent dans l'assoce. Et vous pouvez beaucoup dans ce domaine. Mais ne vous trompez pas de combat : vous n'êtes pas responsables des décisions, de l'inertie ou des motivations de chaque membre.
La seule chose dont vous êtes responsables, c'est de nous offrir autant d'opportunités, d'occasions, de moyens, que possible de prendre nos propres décisions. De nous prononcer, de nous impliquer, ou pas.
Et si nous le faisons, ou ne le faisons pas, ça n'est pas votre responsabilité. C'est la notre.
Il y a certainement beaucoup à faire pour mieux cerner les envies et attentes de toute la communauté. Mais il faut que vous compreniez bien ce que certains d'entre nous pensent : si vous n'y arrivez pas à chaque fois, ça n'est pas si gràve que cela. Tant que vous ne baissez pas les bras, même s'il y a des pauses, des hiatus, des erreurs, des désaccords, l'association vit. Et donc, des phases d'activité et de mobilisation plus visibles peuvent toujours succéder à des phases de repli, voire d'inertie. Si à certains moments vous "gardez le fort" en attendant l'occasion de le confier à autrui, ou l'occasion de mieux vous réinvestir, c'est tout à fait compréhensible. On est pas au CAC 40, même si on essaie de faire au mieux aussi souvent que possible, hein.
Mais personne, nulle part, jamais, n'a incité quelqu'un faire quelque chose de positif de sa vie en lui faisant un procès. Jamais. Et certainement pas dans le milieu associatif.