Ding On a écrit :Le principe de l'impro, c'est précisément de ne pas demander un très très gros travail, non ?
Pas forcément. Pour moi par ex, si je sais qu'un scénar' va me demander de bcp improviser de par son cadre relâché, je vais bosser 10 fois plus car j'aurai besoin de maîtriser chaque paramètre : les PNJ, le décor, le contexte, la chrono... J'aurai tendance à vraiment tt apprendre.
oui, c'est vrai, je ne voyais pas tout à fait l'impro ainsi, mais c'est une façon possible d'improviser. J'ai quand même l'impression (sans remettre en cause ta méthode) que l'intuition sera toujours plus efficace dans le domaine particulier de l'improvisation que la maîtrise (assez illusoire je pense) de tous les paramètres, et qu'au final se rendre disponible aux évènements plutôt que vouloir en contrôler les paramètres permet un résultat plus "naturel" (un peu comme pour un duel au sabre, quoi…

). Cela dit, même dans ce cas, je suis d'accord que pour improviser efficacement (et de façon indolore et invisible pour les joueurs), il faut bien connaître son univers, ses personnages… et les principes de la narration. L'intuition ne naît pas du néant, il faut la nourrir.
Mais je voulais surtt dire qu'adapter l'Ere du Vide à sa table de joueurs me semble infiniment plus chronophage que faire jouer une campagne vraiment écrite. Dans les deux cas, oui il y a travail d'adaptation mais j'ai tendance à penser qu'adapter des scénarios déjà bien rédigés (et testés !) demande bcp moins de travail que rendre jouable une simple chronologie d'évènements (et les supp' d'époque de L5A ne sont rien d'autre que cela) - dans laquelle je reste intimement persuadé que les auteurs n'ont prévu aucune place de 1er plan pour les PJ.
Je serais d'accord avec toi si l'Ère du Vide était le premier supplément de campagne publiée par L5R. Mais là ce n'est pas du tout le cas. La gamme avait à ce stade publié suffisamment de scénarios (je veux dire il y en avait quand même pour facilement plusieurs années de jeu intense avec tout les scénarios qui ont été publiés avant) donnant un exemple concret sur la façon de mettre les PJ au premier plan (y compris pendant des évènements d'une importance majeure pour l'Empire comme le Coup d'Etat du Scorpion, la reprise de Kenson Gakka par les Scorpions, la Guerre de l'Opium ou la bataille du Crépuscule de l'Honneur). A ce stade, un MJ n'a pas besoin d'être particulièrement audacieux pour adapter les mêmes principes à l'Ère du Vide… C'est aussi à ça que sert un scénario officiel : montrer comment jouer dans cet univers et quel type d'histoire on peut faire... Or presque tous les scénarios publiés (à l'exception donc, du 2eme scénario du Voile de l'Honneur, et peut-être du premier, mais c'est discutable parce qu'il quand même met les PJ devant un important dilemme) donnent aux PJ un rôle majeur de protagonistes, allant même jusqu'à les placer dans des situations où leurs choix semblent capables de modifier la situation de l'Empire dans son ensemble (Code du Bushido, Tombe de Iuchiban, Héritage des Guerriers). D'ailleurs la trilogie du "Clan du Lièvre" offre un bel exemple d'adaptation d'une storyline aux besoins d'une campagne en donnant aux PJ la possibilité de sauver le château du Clan du Lièvre ou pas - et il est expliqué par la suite comment, selon les cas, adapter la storyline officielle où Shiro Usagi est censé être détruit par Le Scorpion - c'est dans
Bells of the Dead et même, si je ne me trompe, dans le scénario du Livre du MJ 2eme édition.
Des personnages qui ont surmonté les difficultés des scénarios publiés pour acquérir Gloire et réputation, ce faisant, n'ont rien à envier (et même à mon avis dépassent en importance narrative) aux PNJ officiels. Après cela, en faire des héros destinés à sauver l'empire du complot de Fu Leng semble assez naturel, d'autant que les MJ ont tous les outils conceptuels sous la main, obtenus par les meilleurs systèmes pédagogiques qui soit : la pratique et l'exemple obtenus par une bonne quarantaine de parties (c'est ce qu'il faut pour jouer toutes les campagnes, mais cela varie selon les MJ j'appelle une partie un scénario qui se joue dans une durée comprise entre 8 et 40 heures, sachant que pour L5R la moyenne se situait vers 20). La plupart des scénarios pour la première édition sont en réalité des mini-campagnes. Code du Bushido par exemple représente en temps et en narration (et même en nombre de pages) l'équivalent de trois scénarios pour d'autres jeux (il m'a fallu au moins 50 heures de jeu pour arriver au bout).
Impliquer les personnage dans l'Ere du Vide n'est pas un saut conceptuel par rapport au fait de les impliquer en première ligne dans le Coup d'Etat du Scorpion, de les nommer à la tête d'une magistrature de la plus grande ville de l'Empire, ou de leur permettre d'arrêter un complot visant à plonger Rokugan dans une guerre sans merci. Donc, même si la méthode pour le faire est un peu courte dans l'Ère du Vide, il y a tous les autres scénarios auxquels se référer et qui donnent d'excellents exemples concrets et adaptables. Sortir l'Ère du Vide de son contexte, c'est donc risquer de tirer une conclusion disproportionnée. L5R a été pendant très longtemps "un jeu à scénarios", et la teneur générale de ces scénarios reste à mon avis la meilleure preuve qui soit que les auteurs de L5R estimaient que les PJ devaient être des protagonistes. Après, ceux qui ont pris le train en route, et n'ont pas bénéficié de ses exemples ont tout à fait le droit de ressentir le contraire, mais précisément parce qu'il y a eu un changement de direction (sachant quand même que ce changement de direction correspond plus ou moins au début de la publication des scénarios Living Rokugan qui prônent exactement la même philosophie "mettre les Pj au centre des évènements"), mais ce ressenti est, je le crains, fondé sur une vision incomplète de la gamme.
Une fois admis que les PJ peuvent sauver Rokugan d'une menace comme Iuchiban, l'Ombre ou l'Outremonde, une fois qu'on a compris concrètement comment un scénario pour L5R mettait les PJ au centre des enjeux, il n'est vraiment pas très compliqué (à condition qu'on ne soit pas allergique à ce genre d'écriture de campagne, très proche d'Orpheus, déjà cité) d'utiliser une trame comme celle de l'Ère du Vide, ainsi que les infos distillés dans tous les suppléments Way of pour faire des PJ ceux qui auront une chance d'empêcher Fu Leng de plonger l'Empire dans mille ans de ténèbres. Ou alors quelque chose m'échappe. Donc quand les auteurs de l'Ère du Vide proposent de changer la trame de la storyline en expliquant que les PJ peuvent eux-mêmes devenir les Tonnerres (c'est écrit en toute lettre p 127), même si l'explication pour le faire ne prend guère plus qu'un paragraphe, j'ai tendance à les prendre au sérieux et à me dire qu'ils n'ont pas perdu de vue le principal (ce n'est pas le seul endroit du supplément où est explicité que cette trame ne doit pas être utilisé pour mettre les PJ sur le banc de touche d'ailleurs). Ils ont juste une édition entière d'une vingtaine de scénarios première et deuxième édition confondues sur lesquels m'appuyer...
Après, savoir si c'est compliqué de le faire, c'est vraiment entièrement subjectif et c'est un autre problème. Pour moi, il m'apparaît de plus en plus que masteriser un scénario écrit et détaillé est en fait très compliqué. Ça demande un préparation minutieuse et je me souviens que bien souvent en masterisant de tels scénarios il a fallu que je passe énormément de temps à absorber des chronologies et des faits complexes pour ne pas envoyer mes joueurs sur de fausses pistes, et m'être mordu les doigts parce que j'avais oublié de mentionné un fait qui n'était pas bien mis en valeur par la maquette, ou qui m'était apparu comme mineur à la lecture alors qu'il avait un impact à terme dans le déroulement des évènements. Sans parler du fait que les joueurs peuvent parfois se plaindre d'avoir senti des contraintes importantes (et pas toujours justifiées) peser sur eux en cours de partie.
Ce genre de problème ne m'arrive jamais quand je me base sur des campagnes écrites de façon plus succinte et qui offrent avant tout une énergie foisonnante, composée de PNJ, de faits, de possibilités, sans entrer dans le détail de chaque scène, ni sur la façon dont je peux y introduire les joueurs (sans parler du fait que de telles campagnes ne demandent pas de faire entrer un carré dans un rond, quand un PJ est membre d'un Clan ou d'une faction - ronin, Scorpion, kolat - qui n'est à l'évidence juste pas prévu du tout par l'auteur).
J'ajoute au passage que, même s'il m'arrive de regretter que l'Ère du Vide ne soit pas plus développée, je n'imagine pas forcément un développement sous la forme d'une campagne façon "L'Ennemi Intérieur". J'aurais aimé une grosse boite de campagne du genre Otosan Uchi : trois bouquins avec pleins de Pnj, de lieux importants, de "flavor text", de développement sur les factions en présences et les modifications qu'elles subissent durant cette période, les batailles importantes détaillées - comme Beiden - avec des plans (je ne sais pas faire un plan et c'est toujours plus sympa pour donner une idée concrète, donc j'aime en trouver en jeu) et un narratif type "le Dard du Scorpion" qui laisse énormément de place à l'improvisation et permette au Mj de trouver lui-même les moyens d'impliquer ses joueurs. Le Dard du Scorpion (je le répète, mon préféré de la gamme : j'ai été absolument renversé par la créativité qu'il permettait, la variété des situations présentées, la liberté totale qu'il offrait et l'idée que je trouve géniale des trois points de vues) est d'ailleurs à mon sens celui qui offre la meilleure transition possible pour passer à un type de Mastering différent, plus adapté à "l'Ère du Vide" et à l'épopée. Maintenant, en l'absence d'un tel supplément, je fais avec ce que j'ai et, pour être précisément en train d'aborder cette partie de ma campagne, il m'apparaît clairement que ça me demande moins de travail que de masteriser un scénario type Code du Bushido (que j'aime vraiment beaucoup, soyons clair). Il suffit de se poser les bonnes questions (comment emmener mes personnage à Beiden ? Comment les impliquer avec le faux Hoturi ? etc.). Je ne cherche à convaincre personne que c'est la bonne façon de jouer, j'en conclus simplement que ce type de trame est très adapté à ma personnalité et que je fais partie des MJ qui préfèrent cela à un scénario qui décrit comment aller du point A au point B et impose des motivations aux joueurs.
Je précise qu'ici je n'attaque pas ton ressenti : je comprends très bien qu'on puisse préférer des scénarios carrés et détaillés. J'ai rencontré autant de MJ qui pratiquaient l'improvisation libre sur une trame simple (genre DFF, instantanés Casus ou suggestion en deux lignes à la White Wolf) et étaient mal à l'aise avec des scénarios préétablis (au point qu'ils finissent toujours par les transformer pour les rendre méconnaissables) que de MJ qui aimaient jouer des aventures carrées et s'occuper en partie de la façon dont ils allaient mieux immerger les PJ dans l'aventure, en se libérant de la tâche parfois ingrate d'avoir à improviser ce qui allait se passer après en fonction des choix des PJ et des éléments mis en place. Et je ne saurais dire qu'une catégorie est "meilleure" ou plus souhaitable que l'autre. Mais ce ressenti te fait à mon avis tirer une conclusion erronée sur le fait que L5R ne permet pas de faire des PJ les protagonistes de la storyline et que les auteurs ne l'envisageaient même pas. Ils l'envisagent (c'est pas moi qui l'invente, c'est dans le supplément lui-même), ils l'expliquent et ils ont montré concrètement et sans ambiguïté avant ce supplément que c'était possible et comment c'était possible. Donc le fait qu'ils soient succincts dans un tel cas, ne permet objectivement pas d'en tirer la conclusion que tu en tires.
L'intérêt de l'Ere du Vide (même si sa réalisation laisse parfois à désirer) est d'offrir aux MJ la possibilité de mettre ses PJ au centre de la trame qui clôt tout ce qui a été bâti avant dans les publications et particulièrement les scénarios de première et deuxième édition (à l'exception de la Voie de l'Ombre, qui est un cas à part). C'est non seulement déclaré par les auteurs mais c'est appuyé par toute la ligne éditoriale qui précède sa publication... Le fait que l'Ère du Vide ne soit en lui-même qu'une chronologie (avec un scénario, tout de même, et pas mal de PNJ et DFF) ne constitue pas une preuve du contraire, c'est juste un choix éditorial "pragmatique" (mot souvent utilisé pour justifier qu'un choix soit loin d'être soit le meilleur possible, ni le plus souhaitable pour les joueurs de longue date), probablement parce qu'il était moins cher en développement et permettait une clôture nette, bon marché, et plus rapide de la gamme de l'époque "classique" avant de passer (malheureusement IMHO) à l'édition hybride et de sauter directement à l'époque des 4 Vents (sauf erreur de ma part). Je regrette ce choix, mais il ne remet pas pour autant en cause une intention des auteurs quand ils disent "Les PJ sont des héros, pas des spectateurs passifs", "Bien que cet ouvrage s'efforce de rappeler les évènements officiels du jeu, n'hésitez pas à les modifier si votre campagne l'exige." "Peut-être est-il possible que certains PJ issus de la bonne lignée puissent eux-mêmes devenir des Tonnerres", parce que l'Ère du Vide n'est jamais que l'aboutissement d'une gamme tout entière et qu'il faut le lire dans le prolongement de celle-ci.