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par Seppun Kurohito » 02 août 2005, 23:19
[Shosuro Ukiko & Shosuro Kagero]
La curieuse troupe était attablée dans l'auberge, attendant d'être servie.
Même au plus fort de sa cohésion, Kagero et Ukiko prenaient toujours leur repas séparés du reste de la troupe, sorte d'isolement qui en des temps difficiles avait cimenté leur complicité et leur compréhension de l'autre. Comme une introspection partagée, ils pouvaient mutuellement sentir quand l'autre allait mal, était triste, quand quelque chose venait briser l'harmonie qu'il y avait entre eux.
Parfois pourtant cet échange pouvait tourner à la dispute certains jour où Ukiko supportait moins la sollicitude aimante de Kagero. Parfois c'était lui qui ne le supportait pas . Au gré de leurs humeurs, ils ne pouvaient cependant pas s'empêcher d'aller vers l'autre et d'essayer de l'aider, ils avaient traversé tellement de choses unis de cette manière. Leur gémellité était comme un lien que seule la mort pouvait trancher, encore qu'on eut pu en douter.
Ce jour-là était un de ces jour, Kagero le sentait. Maintenant assise, Ukiko était silencieuse et rêvassait alors que Kagoro le savait, elle aurait plutôt eu tendance à réviser toutes les phases des spectacles à venir. Il voulait l'extraire de cette morosité mais comment s'y prendre ? Tantôt joyeuse, maintenant silencieuse, la pression qui avait été sur eux ces dernières semaines dans la Capitale y était certainement pour quelque chose. Mais comment faire ?
Kagero tenta d'aborder légèrement le sujet, se tournant presque imperceptiblement vers la porte qu'il venait de franchir, et par delà la route qu'ils empruntaient il lança :
- Si nous continuons sur le rythme présent, le somptueux palais de la famille Doji s'offrira à nos yeux avant la fin de la journée. Tu auras là matière à rêvasser pendant des heures ma chère soeur, à moins que tu n'ais déjà un sujet plus intéressant auquel tu consacres tes pensées ?
Se tournant à nouveau vers sa chère Ukiko, il tenta de lire dans le regard de celle-ci le moindre changement. Bien sûr il n'y découvrit rien : sa jumelle comme lui-même étaient passés maître dans l'art du théâtre, et leurs émotions étaient domptées, du moins en de pareilles circonstances.
Et comme toujours en pareilles circonstances, elle prit sa remarque à contre-pied preuve de sa fatigue et de sa tension :
- Tu aimerais bien savoir à quoi je rêvasse n'est-ce pas ? Ce mystère là mon masque te le cache encore !
Quand elle agissait comme cela par défi et l'attaquait de front, il s'avait qu'un homme l'avait encore fait souffrir ou déçue alors curieusement elle s'attaquait à lui, celui auquel elle devait comparer tous les autres. Celui dont elle était le plus proche mais qui ne serait jamais que son frère. Dans
ses yeux dansait une petite flamme de rébellion, rébellion contre ce lien si serré et pourtant si vital.
Devait-il la provoquer pour que l'émotion sorte une bonne fois pour toute ou jouer profil bas ? Il avait une tendance à utiliser généralement la première méthode, plus rapide, elle était comme un orage qui éclate puis s'en va laissant un paysage serein. Mais faire cela lui faisait mal, il était sûr cependant que ce diplomate du clan de la Licorne y était pour quelque chose.
Son sourcil se leva, interrogateur. Kagero chercha à plonger son regard dans celui de sa soeur, sondant sa peine, sondant sa douleur. Et recherchant le coupable...
Posté le 12-12-2002 à 13:38:51 - Les Masques de Nôh