J'avais mis de coté ton intervention faute de temps pour la traiter au moment et compte tenu de sa relative complexité. Toutes mes excuses pour le délai de réponse.
Soshi Noami a écrit :le problème ne viendrait-il pas que, si je ne me trompe, le bushido et l'honneur ont été développé durant une période de paix ou finalement les bushis n'avaient rien d'autres à faire qu'à se tripoter la nouille et trouver un moyen de justifier leurs prévalence sur la société civile alors que l'environnement de Rokugan est loin d'être pacifier et est plus ou moins dans un état de guerre constante. D'ailleurs, vu la storyline depuis le SCC, les notions de bushido et d'honneur ont dû être mises à mal par tout ce qu'il a été nécessaire de faire ne serait-ce que pour survivre.
Effectivement, le Bushido à proprement parler, c'est à dire des écrits formalisant des règles de conduite de la classe des buke, date d'Edo, période de paix.
Mais ce n'est pas parce que les écrits sur le bushido datent d'Edo, que le terme même "bushido" a été inventé à cette période, qu'il n'éxistait pas tout un ensemble de pratiques, de "code", d'attentes, d'habitudes, de coutumes propres aux membres de la classe buke antérieurement, aux périodes où les membres de la caste buke étaient "ceux qui font la guerre".
Selon l'époque avec un pouvoir central plus ou moins fort ou des seigneurs locaux autonomes, chaque maison guerrière, chaque seigneur a ses propres lois. Il est délicat de dégager une généralité pour l'ensemble de Japon mais l'on peut affirmer que l'ensemble de la classe martiale possédait une "culture guerrière" plus ou moins forte et homogène.
S'agissant d'éléments non matériels, abstraits, une "culture martiale" à des époques où finalement on manque d'informations sûres et surtout valables à l'ensemble du Japon, cela est difficile à évaluer et à mesurer autrement que par un ensemble d'exemples choisis de façon arbitraire par des historiens mais il existe tout un ensemble de pratiques , dont notamment le seppuku, de termes spécifiques tels le suicide de protestation (
kanshi) ou le suicide d'accompagnement (
junshi) dont les exemples abondent sur les périodes de Kamakura à Sengoku même (même si l'on peut considérer que cette période est en déliquessence par rapport à ces valeurs martiales mais bon je digresse).
Ces précautions oratoires étant prises, dès lors qu'un ensemble plus ou moins important d'individus choisis ne s'ouvrent pas le ventre juste pour des problèmes d'appendicite ou pour du flan (ah ah), il m'apparaît indéniable qu'un certain nombre de ces personnes avaient des valeurs morales martiales les poussant à de telles extrémités en pleine période de guerre et qu'un code martial et une culture plus ou moins formalisés et plus ou moins partagés existait.
Un autre élément est que le Japon est une culture fortement marqué par l'acte. Inutile donc de passer par l'abstrait d'un écrit pour écrire la voix du guerrier, la voix du guerrier s'écrit tous les jours dans le sang, elle se vit réellement à ces époques de guerre. Chaque acte individuel des guerriers contribue à écrire ce code, ensemble non concerté de conduites individuelles.
Mais le mieux sur cette question de savoir si il existait ou non un "bushido" (même si le terme n'éxistait pas, les valeurs martiales que l'on peut mettre derrière faute d'autre terme que "règles des maisons nobles" dont j'ai oublié le nom en Japonais et qui ne parle pas à grand monde de toute façon mais si Akaguma passe par là il le donnera d'un claquement de doigt) antérieurement à Edo est de se forger sa propre opinion en lisant des bouquins. Je ne peux que te conseiller celle de "la mort volontaire au Japon" de Maurice Pinguet. Un régal à mes yeux.
Ensuite, sur le caractère "endoctrinement" ou "justification d'une position supérieure" de la caste martiale du bushido sous Edo, c'est un autre débat.
Juste que je partage totalement ton point de vue sur le fait qu'il faut toujours poser des valeurs morales par rapport au contexte de sa société.
En l'occurence, Edo est une paix quasi absolue, le rapport guerrier / seigneur est donc par conséquent fortement biaisé.
Aussi, le bushido d'Edo n'est qu'un ensemble d'écrits de différents auteurs donnant leur avis sur la société martiale. En aucun cas, elles n'ont valeur normative, elle ne constitue que l'avis de l'auteur qu'il convient là aussi de remettre dans son contexte (notamment je pense à l'hagakure).
Soshi Noami a écrit :IMHO, l'honneur et le bushido sont des idéaux qui ne font pas le poids face à la réalité qui, elle, nécessite beaucoup de compromissions. Ceci rends cependant d'autant plus rare et précieux chaque acte commis en concordance avec ces idéaux et qui fait qu'ils n'en devienent que plus méritants.
Pour reprendre l'exemple des 47 ronins, ils devaient être à 0.5 ou 1.5 d'honneur et ce qui est célébré à travers eux, c'est plus leur indéfectible loyauté à feu leur daimyo, imho.
De mon point de vue, ceci est subjectif, dépend de ses propres conceptions et perceptions et contribue à construire son propre Rokugan.
En cela la discussion est intéressante pour chacun parce que l'on prend du recul et l'on se définit des principes qui aide à répondre aux éventuelles questions et résolution complexe qui se posent à travers les conséquences.
L'important est d'avoir une conception que l'on arrive à partager avec ses joueurs, rien d'autre.
A suivre, j'éditerai ce message à partir d'ici. Toutes mes excuses pour la lisibilité.
EDIT
C'est clair que si l'on pose comme "idéal" que les samuraï honorables doivent faire la guerre comme des paladins, c'est à dire comme un fantasme de la guerre qui n'a jamais existé, alors oui les idéaux ne font pas le poids ...
Tout dépend donc de la "réalité" que l'on veut voir et jouer, je ne vois pas la même "réalité" que toi. A chacun sa réalité très subjective.
C'est clair pour moi qu'une société qui pose comme principe que la guerre doit se fait de façon "paladinesque" impossible alors que c'est tout le contraire qui se passe dans les faits est une société "incohérente".
Certains penseront que ça rentre tout à fait dans le cadre d'une société d'"apparence" et trouveront cela tout à fait cohérent. Chacun ses gouts.
Personnellement, j'ai une conception proche (similaire ?) à celle de Dairya, l'honneur et le bushido sont une façon d'être et d'agir dans un monde japonisant ("l'énorme, le lointain et le si mystèrieux pays de la morale - de la morale qui a vraiment existé et qui a été véritablement vécue") et non pas un idéal impossible à atteindre dans un monde d'"apparence", qui amène à des impasses et où il faudra nécessairement choisir entre vivre ou être honorable.
Rapidement pour moi, les 47 ronin sont perçus comme des parengons d'honneur.
Ce n'est pas parce que les ruses et procédés qu'ils ont utilisés sont condamnables à nos yeux occidentaux qu'ils sont perçus ainsi au Japon.
Par exemple, le radical hagakure ne reproche pas leur usage de manoeuvres détournées mais seulement que leur victime aurait pu mourir précédemment de façon accidentelle et donc ne pas pouvoir accomplir leur vengeance. L'important n'est pas de se venger pour l'auteur de l'hagakure, l'important est de mourir.
Non, que le meurtre de leur ennemi se fasse par un duel ou par des moyens sordides, c'est égal dans cette mentalité. Ce n'est que l'application de l'art de la guerre.
Ce qui rend leur vengeance "noble", "honorable", c'est d'avoir assumé les conséqueces de leur vendetta (
kakakiuchi) illégale en se rendant aux autorités et en sachant pertinemment qu'ils allaient mourir.