(humour) Uikku, la naissance d'une légende

Ce Forum est dédié à être un recueil pour les histoires que les Forumistes rédigent dans le monde de L5R.

Modérateurs : Magistrats de Jade, Historiens de la Shinri

Togashi Dôgen

(humour) Uikku, la naissance d'une légende

Message par Togashi Dôgen » 03 déc. 2010, 09:25

Uikku, la naissance d’une légende
une nouvelle philosophique par Togashi Dôgen


Il était une fois, à l'aube de l'Empire, dans une petite famille de paysan du nord de Rokugan : le cri d'une naissance. Pendant 13 mois - au lieu de 9 - la grossesse avait duré, si bien que dans les alentours de la hutte familiale les autochtones avaient commencés à jaser, car dans les temps anciens, les superstitions étaient vivaces, nul n'y échappait. Mais le 13 étant à la fois nombre de la Mort et de la Régénération, selon le sage ermite qui vivait près du village, la famille ne savait quel point de vu adopter : un signe des Fortunes, c'est certain. Mais que pouvait-il bien signifier ? Le bonheur des comères, seul était son effet pour l'heure, la famille quant à elle était en proie aux plus vives inquiétudes.

Lorsqu'enfin arriva l'heure de la délivrance, la jeune maman fût entourrée par les soins, plus attentifs que jamais, de son époux et de sa belle-mère. Et bientôt, ô joie ! le cri d'une naissance tant attendue enfin leur parvient, tandis que la sage-femme du village extrait la petite chose toute fripée de la matrice de sa mère. Mais stupeur le saisit, lorsque le couple contemple son fruit, à la vue de ses blancs cheveux la surprise naquit. Et ses pupilles rouges qui observaient le monde d'un regard nouveau, et ses petites mains et ses petits pieds fermes, qui se débattent dans l'air du matin, à sa vue ils restent coi. Hormis cela, il pousse des cris et se débat, rote et urine comme tout petit bébé qui se respecte (et qui veut emmerder ses parents). Mais lorsqu'enfin il s'appaise, le silence s'installe. Seul la vielle sage-femme le rompt enfin : "C'est un beau nourisson" déclare-t-elle avec un sourire édenté, et elle parvint à relâcher la pression, suffisament pour que l'époux sorte une bouteille de son meilleur vin de riz, prudemment dissimulée sous une planche de la maison.

Ouvrant la bouteille, il trinque avec ses amis et voisins, jusqu'au soir, où les deux époux contemplent leur premier enfant avec tendresse. Ivre de joie, le père contemple sa progéniture, et il dit :

-Je me demande quel sera le mot qu'il prononcera en premier. Sera-t-il point "oyaji" (père) ? Sera-t-il point "oka-san" (mère) ?
-Je ne saurais dire, répond la jeune maman, cet enfant nous as déjà tant surpris, que je ne le serais qu'à moitié s'il nous citait le Tao de Shinsei.
-Qui cela ? Demanda le paysan, peu au fait des avancées de l'Histoire, en ces temps où la Légende n'était pas encore tout à fait formée.
-Tu sais, ce vieil ermite qui a discuté avec Sa Majesté à Otosan-Uchi, et qui l'a aidé à vaincre son frère qui assaillait les pères de nos pères, depuis le Sud de l'Empire, avec l'aide des 7 Héros (à l'époque, le terme de Tonnerre n'était pas non-plus d'usage répendu, et longtemps encore on oscilla entre "Les Sept Légendaires", "Les Sept Samouraïs", "Les Sept Pourfendeurs du Mal", "Les Sept Sauveurs" et même les "Sept Cornéliens", par référence à la Corneille de Shinsei).
-Ah ouais, celui-là... Des histoires de bonne-femme, comme si un simple mortel pouvait être aussi sage que les dieux, dès la jeunesse, dès l'enfance même !
-Comme si c'était possible, défendit vaillament la jeune femme, de demeurer 13 mois en couche plutôt que 9 !
-Ah ouais, c'est pas faux ça, répondit le mari en se grattant le museau. Cherchons plutôt un nom à lui donner.
-Et si on l'appellait Shinsei, tient ? En l'honneur du grand sage ? Proposa la femme.
-Nan, ça ferait cliché. Et arrogant en plus, ce coup-ci les voisins nous rateraient pas. Et si on l'appellait plutôt Uikku ?"

Et ainsi naquit le pas encore célèbre Uikku, nommé d'un nom sorti d'on ne sait où. Une année passa, puis une autre et encore une autre, mais le petit Uikku ne parlait toujours pas, malgré les efforts arriérés des deux parents, nuits et jours penchés sur lui en essayant de lui inculquer les mots tant attendus, jusqu'à ce qu'il vienne à un âge où, bien qu'il soit capable de marcher, il n'avait prononcer aucun mot. Un jour, sous le coup de l'exaspération, alors que les parents avaient but de l'alcool à la fête du village, le père s'écria vivement :

"Ais-je engendré un fils muet, par cette naissance anormale ? Qu’allons nous devenir, s’il apporte la malchance sous nôtre toît ?!" Lors donc, qu'elle fût sa surprise lorsqu'une réponse se fît entendre dans la chaumière, et la voix était profonde et sentencieuse bien qu'aigu et juvénile, car on sentait qu'elle n'avait pas encore muée, et elle dit :

"Où que tu cours, où que tu fuis, tu ne sortiras jamais de la Paume de Dainichi." (Saiyuki, passage célèbre)

La colère dissipée laisse place à la stupeur, et la mère désigne sa progéniture en tremblant.

"Foutaises, femme ! Ca ne peut pas être lui."

Mais sceptique, il observe longuement le visage de sa progéniture. Est-ce un rêve, une illusion ? Uikku les regardent en souriant et en bafouillant comme le font les banbins normaux. Déjà ils pensent à abandonner ce petit enfant à quelqu'un de plus compétent, avant que le malheur ne s'abatte sur le village. Alors que par cette observation mintieuse ils semblent enfin rassurés, la voix retentit de nouveau :

"Celui qui sait parler gardes ses paroles." (tao te king)

La légende de Uikku était née.



********


Vingt-Septième article du Classique de la Voie et de la Vertu, par Lao-zi.

Celui qui sait marcher ne laisse pas de traces.
Celui qui sait parler gardes ses paroles.
Celui qui sait compter n'a pas de boulier.
Celui qui sait garder n'a que faire de verrous et de clefs.

Celui qui sait lier n'a pas besoin de liens, et nul ne peut défaire les noeuds qu'il a serrés.

Ainsi, le Sage se dédie au secours des hommes. Il n'en rejette aucun.
Il veille à préserver les êtres sans en excepter aucun.

Il est dans la lumière, tout plein de soleil.
Le Sage est le maître de celui qui ne l'est pas, et ce dernier est la matière sur laquelle il agit.
Ainsi, ils ont besoin l'un de l'autre.

Voilà une vérité. Une vérité subtile.
Car tout ce qui est essentiel pour l'homme, tout ce qui lui est indispensable, reste une énigme.
C'est l'inconnu pour lequel on lutte et on travaille.

C'est l'inconnu qui nous donne la force de vivre, la force d'espérer, la force de croire.
Car ce que l'homme veut savoir lui reste inconnu. A jamais.

Répondre