[Nouvelle] Kitoku

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[Nouvelle] Kitoku

Message par Hida Koan » 26 mai 2006, 18:41

La barque est bien loin quand je me relève. Il faut que je marche, il faut que je parte. Le soleil est bas dans le ciel. Le vent souffle. L'écume me lèche encore les pieds.

[...]

Le rivage est bien loin quand je me réveille. Il faut que je marche, il faut que je parte. La lune décroit dans le ciel. L'air est froid. Les rochers me meurtrissent encore le dos.

[...]

La plaine est bien loin quand je me retourne. Il faut que je marche, il faut que je parte. Les nuages filent dans le ciel. La neige est mordante. Les arbres m'emplissent encore la vue.

[...]

La montagne est bien loin quand je me perds. Il faut que je marche, il faut que je parte. Les étoiles étincellent dans le ciel. La terre est sèche. La poussière m'irrite encore les yeux.

[...]

Le palais est bien loin quand je le regarde. Il faut que je marche, il faut que je parte. Les gouttes fusent dans le ciel. La pluie est glacée. L'eau m'imbibe encore l'esprit.

[...]

La raison est bien loin quand je tombe au sol. Il faut que je marche, il faut que je parte. La nuit avance dans le ciel. L'herbe est douce. Le chant des ombres me nourrit encore le coeur.

[...]

Je suis seule et je meurs. Seras-tu là mon frère, mon esprit, mon âme-soeur? Les échos du monde s'évanouissent. Je glisse dans le néant. Silence.
Dernière modification par Hida Koan le 30 mai 2006, 08:57, modifié 1 fois.
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Message par Hida Koan » 26 mai 2006, 20:41

La lumière est vive. L'eau est froide. Il me tient dans ses bras et je ne fais rien. Ma vision se brouille. Le souffle me manque. Je me noies. Non. Il me sort la tête de l'eau. Comme un tas de linge souillé il me pose sur le sol. Il me giffle. J'ouvre les yeux et je vois son visage. Il est vieux, il est sale et ses dents sont gâtées. Il pue. Ses cheveux sont gras, ils collent sur son front. L'homme est trempé de la tête aux pieds, comme moi.

J'essaie de parler mais ma gorge me fait souffrir. "Ne parle pas" me dit-il "Tu es restée seule trop longtemps, ta gorge est cassée, elle marche plus." Il me fouille et je ne fais rien, je ne peux pas. Il semble irrité de ne rien trouver. Il me charge sur son dos et m'emmène. Il peine à me porter, ses muscles sont trop usés par le temps. Je suis du regard ses sandales sur le sentier. Des cailloux gris, de la poussière crasseuse, voilà ce que je vois, et une vue plongeante sur ses maigres mollets. Mes mains tapent sur l'arrière de ses genoux, je suis une poupée de chiffon. Je ne suis qu'une poupée de chiffon: je ne sais pas qui je suis.

Le sol se retourne et je suis par terre. Nous venons de passer sur un sol plus rouge. Je suis dans sa cabane. L'encadrement de la porte me montre un bout de ciel gris et un paysage vert. Mes vêtements gouttent sur le sol, les siens aussi. Il fait moins peur que tout à l'heure, je sors des voiles de l'engourdissement. Premier humain depuis longtemps, ça me fait bizarre de voir un homme. Je n'ai pas du en voir beaucoup ces derniers temps.

Il sort de la viande sèche d'un torchon et un bout de fromage. Une chèvre passe devant la porte. "Mange". La lanière est trop dure je la recrache. Il s'approche, la ramasse et me l'enfonce au fond de la gorge. "Mange. J'ai dit." Je déglutit avec effort et prends le bout de fromage dans la bouche avant une autre agression. Il se recule, l'air satisfait. Il s'assied à terre et commence à tailler une figurine de bois.

Je n'ai pas bougé du coin de la pièce. J'ai mal à l'estomac d'avoir mangé. Il me regarde de temps en temps pour voir si je fuis. Je ne sais toujours pas qui je suis.
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Message par Hida Koan » 29 mai 2006, 22:17

J'ai dormi toute la fin du jour et une partie de la nuit. J'ai une grosse toile de lin sur les épaules. Je sors sur le devant de la cabane, le vieux ne m'a pas entendu. La nuit est claire et tiède, ce doit être l'été. Il y a beaucoup d'étoiles dans le ciel mais je ne peux en nommer aucune, ai-je même jamais connu leurs places? Un petit vent fait bouger l'herbe sur le sol de la clairière. La chèvre dort et son ronflement trouble à peine le bruit des arbres. De l'extérieur l'abri du vieux est petit, il parait solide. Un tas de bois commence à être fait sous une soupente: le vieux est prévoyant.

Je reconnais le chemin caillouteux alors je le prends, je vais retourner à la rivière. Mes pas me portent lentement jusqu'à l'eau froide. La montagne ne doit pas être loin: l'eau est très claire et sa température me donne la chair de poule. Assise sur un rocher, les jambes à moitié dans le torrent gelé, je regarde la nuit s'envoler. Les oiseaux commencent à s'éveiller, ils sont petits et colorés, j'ai l'impression de n'en avoir jamais vu. Mon esprit me joue surement des tours.

Mes mains sont fines mais pleines d'écorchures, mes pieds ont simplement l'air d'avoir beaucoup marché, ils ne m'apprendront rien sur moi. Précautionneusement je me déshabille. Je ne suis pas vraiment blessée, j'ai quelques contusions mais je n'ai pas très mal. Je plonge mes vêtements dans la rivière: ils sont rouge. J'essaie d'en ôter le sable et la terre. Le soleil se lève et je me regarde dans le miroir de l'eau: je suis jolie. Je m'enroule dans la couverture rugueuse et sous les premiers rayons du jour retourne vers la cabane.

En passant près d'un arbre j'étends mes habits. Le petit vieux est sur le pas de la porte. Il me regarde, il regarde mes vêtements. Je me retourne: on dirait un scorpion peint dessus... Mais je ne sais pas ce que ça veut dire, je ne sais toujours pas qui je suis.
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Message par Hida Koan » 05 juin 2006, 18:21

Les jours passent. De temps en temps le vieux me demande de traire la chèvre ou de ramasser des baies. Hier il m'a montré comment m'occupper d'un jardin, il fait pousser des légumes qui agrémentent les soupes. Je ne sais pas son nom, en a-t-il même un? Il ne connait pas le mien et moi non plus... Cela rétablit peut-être un certain équilibre. Il part quelques heures le jour et revient avec du petit gibier, je crois qu'il pose des collets dans la forêt. Je m'ennuie un peu mais tout me parait étranger alors les découvertes sont nombreuses et brisent la monotonie du temps. Seules les plantes paraissent se souvenir de moi et moi aussi. Il y en a plein ici. Beaucoup sont différentes et certaines me racontent leurs secrets.

Ma voix revient petit à petit. Je sais que je peux émettre des sons, je le fais devant la rivière quand je suis seule. Je lui parle, elle me connait, elle me voit tous les jours. Mais je ne parle pas au vieux. Je n'ai rien à dire. Il m'a entendu une fois je crois mais il ne me l'a pas fait remarquer. Des fois il marmonne tout seul, il dit que ma compagnie ressemble à celle d'un mort... Sauf que je mange finit-il toujours par ajouter.

Ce soir nous dînons de viande fraiche grillée sur le feu de bois. "Peut-être pourras-tu nous ramener du poisson demain?", "Peut-être" Répondis-je. C'est tout ce que nous nous disons. La nuit enveloppe le monde de son sombre manteau. Je regarde les étoiles, j'ai fini de manger. Il rentre dans la cabane et comme à son habitude s'assied dans un coin pour tailler une pièce de bois. De longues minutes plus tard, il lance à terre la couverture miteuse qu'il possède. "Si tu dors dehors prend ça. Ne va pas attrapper la mort, Kitoku." Je la ramasse et la traine près du feu. Je m'endors dans un tissu rugueux et épais tout en observant le ciel.

Kitoku, Agonie. C'est un nom bien choisi.
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Message par Hida Koan » 05 juin 2006, 21:39

Le ciel est d'un bleu profond. Certains jours il est gris comme l'acier. Il fait de plus en plus chaud. Shirokuro, la chèvre, supporte mal les températures élevées. C'est le début de l'été on dirait, les orages vont bientôt arriver. D'un jour sur l'autre le niveau de la rivière varie. C'est plus facile pour les poissons quand cette dernière est basse. J'en ramène régulièrement maintenant, depuis presqu'une semaine. Je crois que le vieux devait le faire tout seul, avant, quand je n'étais pas là. Mais il me rend importante en me laissant le faire. C'est bien.

Je ramasse encore des plantes, je les fais sécher. Des fois après plusieurs jours à me narguer sans rien dire, elles me chuchotent doucement leurs mystères. Alors je les garde précieusement dans des petites bourses de peau de lapin. J'en ai une dizaine maintenant. Je vais de plus en plus loin dans la forêt pour en trouver d'autres. Quand je les ramène, le vieux me regarde mais ne me demande jamais ce que je fais. Souvent je ne sais pas moi même... Nous ne parlons toujours pas. Sauf pour les mots informatifs dont il n'est pas avare "Prend ça", "Met ça là", "Couche toi et dors", "Mange".

Je crois qu'il est là depuis longtemps. Je l'entend bougonner tout seul des fois. Il parle de choses mauvaises et de l'homme perverti. Il a du souffrir. Heureusement l'âge commence à effacer les souvenirs douloureux. Bénédiction de l'oubli, comme moi. Il dit qu'il est heureux ici, il pleure simplement son corps de jeune homme, trop vite bridé par l'isolement d'après lui. Mais chaque fois qu'il s'approche je ferme le yeux et respire bruyamment. Je ne veux pas qu'il sache que j'essaie d'entendre ses secrets sous sa carapace de regrets.

Ce soir après le repas, j'emmène la vaisselle de bois et je la fais, comme tous les soirs. Quand je reviens il taille encore quelque chose. Je m'assois et je trace des signes sur le sol. J'écris. Tout n'est pas revenu mais je connais plein de choses que lui a déjà oublié. Il n'a rien à lire. Je vais lentement dans mon ré-apprentissage. Il me lance un objet. C'est une femme sculptée. Une petite bonne femme toute ronde. Il l'a fait pour moi. C'est agréable.
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Message par Hida Koan » 18 juin 2006, 15:35

C'est la fin de l'été. Je vais mieux, j'ai repris du poids et des forces. Le vieux n'a pas trop souffert de la chaleur. La chèvre non plus avec du recul: elle est toujours là finalement. Ma collection d'herbes prend toute une étagère. J'en conserve certaines qui sont toujours enfermées dans un certain mutisme. Mais je le sais, un jour elles me diront à quoi elles servent. Il y a quelques jours le vieux a commencé à s'y intéresser finalement. Je lui ai montré celles qui guérissaient. Les autres ne sont pas très utiles pour nous.

Les paroles que nous échangeons sont plus construites, mais aucune ne m'étreint encore le coeur ou les tripes: cela reste très superficiel. J'ai plusieurs écorces de bouleau séchées et je peux écrire dessus avec un bâton brûlé. L'écriture semble être bien revenue mais je en sais pas quoi rédiger: mes souvenirs sont toujours flous, voire absents. Certaines choses me reviennent, je crois que j'ai un frère, je vois son visage au crépuscule mais son nom m'est encore dissimulé.

Ce matin l'air est plus frais, les feuilles des arbres commencent à brunir. Je me dirige vers la rivière comme tous les jours. Sur le sentier j'entend le pas arythmique du vieux. Il me suit. Je m'assois sur la pierre plate qui surplombe l'eau claire et je me repose. "Tu médites Kitoku?" Je ne me retourne pas "Je crois" répondis-je. L'aube est là, le soleil s'élève lentement au-dessus de l'horizon. Je vois le vieux qui trace six traits verticaux dans le sable. "Je m'appelle Turakamu." Il écrit des mots et forme des colonnes. "Il y a sept clans majeurs dans l'Empire. Regarde." Je m'approche de lui et fixe les écritures. "Celui-là est le tien." Il tend son doigt décharné vers des kanji formant le mot Scorpion. Et il commence à raconter une très longue histoire.
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Message par Hida Koan » 02 juil. 2006, 00:36

J'ai décidé de partir. Il m'en a trop dit, il ne m'en a pas dit assez, je ne sais plus, je veux savoir, je ne le veux pas. Des visages me sont revenus pendant qu'il me racontait son histoire décousue. Je ne sais pas qui ils sont, ils me sont aussi inconnus que je le suis moi-même. Turakamu semble avoir la mémoire comme une passoire. Son récit était plein d'incohérences. Même le temps n'est pas linéaire derrière ses mots. J'ai pris mon kimono, mes herbes et ma petite figurine. J'ai dit au revoir à Shirokuro. Il faut que je marche, il faut que je parte.

Je chemine vers le sud. En milieu de matinée je m'arrête. Je suis partie si vite avant l'aube et après son récit que je n'en ai pas dormi. Je m'allonge dans un bosquet d'arbres fins et je pose la tête sur mon sac. Le sommeil me prend. Le soleil est haut dans le ciel que je m'éveille. Je m'époussète et reprend la route tranquillement. J'ai perdu tellement de temps que je ne vois pas l'intérêt de courir pour essayer de le rattraper. Et qui sait ce que je vais trouver dans l'Empire? Je ne sais même pas où aller.

Plus tard alors que l'astre du jour commence sa trajectoire descendante, j'entends des pas précipités et des respirations saccadées. Sans paniquer je me retourne, qu'ai-je à craindre dans cette forêt qui ne ferait pas le bruit d'un ours? Je vois l'ombre de Turakamu se dessiner sur le chemin. Il traine la chèvre. "Kitoku! Kitoku, ne me laisse pas!" Shirokuro a les flancs luisants de sueur. "Tu n'aurais pas du la faire courir. Elle est trop vieille pour ça." lui dis-je plus méchamment que je ne l'aurais souhaité. "Et toi aussi".

Turakamu reprend son souffle. Il sourit. Je souris aussi. "Je suis contente que tu sois là." Et nous reprenons notre route vers l'inconnu.
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Message par Hida Koan » 03 juil. 2006, 20:43

La ville se déploit sous nos yeux ébahis. Turakamu est nerveux. Moi aussi. Shirokuro seule n'est pas perturbée. D'ici on voit plein de petites maisons répandues dans de la boue grise. Nous descendons la colline et nous croisons des paysans des fois, ils sont bien nourris. Ils nous regardent bizarrement. Des enfants nous voient, enfin ils voient surtout la chèvre et il sourient. Nous somme habillés comme eux: une tunique de toile et des semelles de corde. Aucun ne porte un kimono comme j'ai dans mon sac à dos. Turakamu s'agite et s'arrête. "J'ai besoin d'une pause" souffe-t-il. Mais ce n'est pas la fatigue, c'est l'angoisse, je le vois derrière le masque de la vieillesse.

Nous ne sommes plus très loin maintenant. La poussière grise salit nos pieds. Les hommes ici sont plus pauvres que ceux des collines. Ils sont malpropres, malodorants et décharnés. Ils ne sont pas agressifs, ils nous observent, comme les enfants de tout à l'heure. Un gros panache de fumée noire et grasse sort d'un bâtisse, ça pue horriblement. Les hommes charrient des immondices, les femmes aussi, les enfant meurent. Ils devraient vivre dans la forêt comme on l'a fait ce serait bien moins pire. Le terrain se dégage et les palissades se rapprochent. Elles sont étouffantes de grandeur. Turakamu tremble.

"- Tu as peur?"
- Oui.
- Moi aussi."

Les portes sont ouvertes. Deux gardes la flanquent, ils portent des armures orange. Ils sont beaux, la prestance les remplit on dirait. Aucun ne bouge quand nous rentrons. Shirokuro cède enfin à la panique. C'est bruyant, il y a du monde partout. Ils sont tous bien habillés ici, enfin pour la plupart. Tout s'agite et se bouscule. J'ai l'impression que je n'ai pas ma place ici. Pourtant je sais que je ressemble plus à ces gens qu'à ceux que nous venons de quitter. Cela je peux le sentir sans avoir besoin de le savoir. Nous sommes en terres Phénix: Turakamu me l'a soufflé, je n'ai pas bien retenu encore les couleurs. Rien n'est sang et ombre, nous ne sommes pas chez moi.
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Message par Hida Koan » 03 juil. 2006, 21:52

Nous avons erré toute la journée. J'ai regardé partout. J'ai trop regardé sûrement même, un samurai m'a crié dessus. Je n'ai rien dit. Je ne me sens pas prête à affronter le monde. Je ne suis pas prête. Je ne sais toujours pas qui je suis. Je connais mon clan d'origine c'est tout. Et encore, c'est ce que me répète sans cesse Turakamu, "Qui sait si tu ne l'a pas trouvé ce kimono?" Je crois qu'il voudrait que je reste toujours avec lui. Ca me va. Il m'a sauvé la vie. Il m'a rendu un nom, même si ce n'est pas le mien.

Un aubergiste a voulu acheter Shirokuro. J'ai dit non. Il nous a chassé, il était de méchante humeur. Turakamu n'a pas d'argent et moi non plus. J'ai mendié un peu mais je ne sais pas bien le faire. J'essaierai peut-être de vendre des herbes demain. Il n'y a pas trop de monde près du pont, on peut y dormir sans être dérangé. Des hommes approchent mais ils ne font rien. Il y a du bruit ici, même la nuit. La rivière ne chante pas la même musique que la mienne, c'est étrange. Ce n'est pas très bien une ville finalement. Mais je pourrais peut-être retrouver un peu de ma mémoire ici.

On nous chasse! Le soleil est à peine levé qu'on nous prie de bouger, et sans ménagement. Ils sont quatre, la patrouille disent les autres qui dorment près de nous. Les avertissements retentissent encore quand on débouche dans les premières ruelles: "Les clochards ça dort en dehors des murs! Qu'on ne retombe pas sur vous cette nuit!" Moi je veux bien mais où dormir sans le sou, à deux avec une chèvre. Je ne la vendrais pas. Et de toutes façons Turakamu ne veut pas non plus... Il va vraiment falloir trouver de l'argent je crois.
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Message par Hida Koan » 03 juil. 2006, 22:18

Il y a une vieille là dans un coin, elle a petit étal, il y a des herbes dessus. Je vais la voir. Turakamu ronchonne, comme d'habitude. Je regarde... L'air de pas regarder. "Quelque chose vous intéresse mademoiselle?" C'est quoi ces petites pancartes? C'est quoi tout ces machins? Rien de ce qu'il y a sur la table ne fait ce qu'elle a écrit ça j'en suis sûre. Sauf peut-être cette herbe là, elle repose c'est vrai. Mais sinon c'est le grand n'importe quoi.

"- Mademoiselle?
- Je m'appelle Kitoku. Dites... C'est de l'arnaque vos produits là. On a jamais vu des feuilles de mûriers guérir les maux d'estomac. Et puis ça là, le genévrier, c'est sensé soigner les cors aux pieds? C'est pour les culs de jatte c'est ça?"

La vieille prend une teinte rougeâtre. Turakamu accourt avec Shirokuro. Je les entends se crier dessus mais j'm'en fiche. Je sais bien que j'ai raison. Je fais le tour du présentoir et je regarde dans les pots. Pourtant il y a des choses pas mal là-dedans... La vieille se retourne prestemment et me regarde avec des yeux noirs. Turakamu déclame "Je vous avais bien dit qu'elle avait été touchée par les Kami. Regardez moi ces yeux de bovin." Il ose. "Seulement chère Tani-hime les Fortunes l'ont bénie! Elle fait corps avec les plantes! Montre tes échantillons Kitoku!" Je suis rouge pivoine. "Allez montre tes herbes je t'ai dit!" et il me donne un coup dans les côtes.

On est dans la petite maison de la vieille. Elle me montre tout un tas de fleurs et de plantes et me demande comme si j'étais une demeurée "Alors et ça qu'est ce que ça fait Kitoku-chan?" Il me paiera le vieux bouc. En plus il se fiche de moi avec son sourire en coin. Je crois que c'est comme si Tani m'avait embauchée. Au moins on peut dormir là, même Shirokuro. On peut se laver aussi. Et la vieille fait à manger. Il faut juste que je ne parle pas pour ne pas briser le secret. Ca devrait aller...
Dernière modification par Hida Koan le 09 juil. 2006, 15:40, modifié 1 fois.
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Message par Hida Koan » 05 juil. 2006, 08:32

Ca fait une semaine. Aujourd'hui il y a pas mal de monde. Ca fait deux jours que c'est comme ça. Tani est radieuse, elle n'avait jamais eu autant de clients je crois bien. Il faut dire que maintenant elle peut proposer des remèdes qui fonctionnent... Turakamu ne fait trop rien de ces journées, ici les herbes c'est une affaire de femme "ça ferait fuir les clients" dit la vieille. Alors il s'occuppe de Shirokuro et il range un peu la maison de Tani. Ca commence à me peser de passer pour une imbécile aux yeux de tous, mais ça fonctionne bien une femme sage et une demeurée surdouée on dirait. Finalement elle est gentille la vieille, un peu arnaqueuse mais gentille.

Une femme vêtue plus proprement que la moyenne s'avance. "Ma maîtresse cherche une herbe pour accroître sa fertilité." Pendant que Tani s'affaire à chercher ce qu'il faut je reste bouche bée en regardant dans le vague avec mes yeux de veau, la force de l'habitude il faut croire. Pas très loin de l'étal se tient une femme à la beauté stupéfiante. Elle a un kimono ravissant bleu azur et argent. Sa coiffure traditionnelle est magnifique et éclatante sous le soleil de l'automne. Ses cheveux blancs sont comme la neige. Elle a les yeux tristes pourtant. Elle ne doit pas être bien plus vieille que moi en fin de compte. Elle me sourit.

Le soir j'essaie d'en apprendre un peu plus. "C'est qui la dame en bleu?" Et Tani de me répondre en me démêlant les cheveux "C'est Doji Aiko. Une grande Dame. Elle habite dans le quartier noble, c'est une représentante de son clan ici. D'ailleurs on doit lui livrer un autre remède sous peu, tu voudras y aller?" Je me contente de sourire et la vieille comprend que l'idée me plait bien. Il va falloir que je dise la vérité un jour, parce qu'à jouer l'attardée comme ça je pourrais me rendre compte que c'est une bonne vie, et peut-être que je voudrais m'en contenter.
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Message par Hida Koan » 08 juil. 2006, 21:52

Le portail est magnifique. Le jardin plus beau que jamais. Ca ma rappelle des choses, des images me reviennent. Il devait y avoir un beau jardin comme ça chez moi. J'attends devant la porte. Un serviteur arrive, même lui parait distingué. "Je suis Kitoku, j'apporte un remède de Tani la vendeuse d'herbes à votre maîtresse." Je dis ça en bafouillant. L'homme me regarde avec pitié. Mon entourloupe fonctionne bien on dirait.

Une jolie voix flûtée se fait entendre. C'est la servante de la dernière fois. "La vendeuse m'a dit que c'était difficile à préparer... Tu sais le faire toi j'espère." Je fais oui de la tête. "Viens avec moi alors." Elle m'emmène dans la cuisine. Je pose tout sur la table et je regarde autour de moi. Il y a tout ce dont j'ai besoin ici. "De l'eau chaude" dis-je sans manière. Je prend un pilon et un mortier sur l'établi. La domestique fait bouillir de l'eau. Je m'affaire à tout bien préparer. Un regard pèse sur ma nuque je le sens. Je ne me retourne pas.

La décoction avance. J'ai fait quelques aménagements pour qu'elle n'ait pas un goût affreux. "Mon mari est souvent absent". Je ne me retourne pas. "Il ne rentre que très peu dans l'année. Chaque fois nous prions les kami pour avoir une heureuse nouvelle mais chaque fois nous espérons en vain. C'est pour cela que j'ai demandé cette potion à ton employeur. Une prêtresse m'a conseillé de mieux préparer mon corps pour accueillir une nouvelle vie..." Je verse la boisson chaude dans un petit flacon, je ne suis toujours pas face à elle. "Tu ne dis rien?" Je bouche la flasque et je nettoie rapidement la table.

Quand je fait volte face elle est là, elle me regarde. Elle a un kimono d'intérieur, elle est jolie. Elle a toujours l'air aussi triste. Elle a les cheveux lachés aujourd'hui. Je lui tend le flacon. Sa petite main blanche approche. Sa prise est trop faible alors elle le lache. Je le rattrappe avant qu'il tombe au sol. Elle ne bouge pas. "J'en ai pour combien de temps?" "Trois jours." "Alors tu reviendras à la fin de la semaine." Je m'incline et je m'en vais. Son regard pèse toujours lourd sur ma nuque.
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Message par Hida Koan » 08 juil. 2006, 23:16

"Encore!" crie Turakamu "Tu peux pas préparer ça ici et on lui fait livrer le flacon à la grande Dame?! Tu perds un temps fou chaque fois!" Les jours passent. Ca fait un bout de temps qu'on est là maintenant. Tout va bien. Tani à l'air plus heureuse. C'est étrange les vieilles personnes, on dirait qu'elle cherchent juste de la compagnie. C'est peut-être même le cas de tout le monde... Shirokuro va bien elle s'est habituée au petit bout de jardin. Elle est vieille elle aussi.

D'autres souvenirs me sont revenus. Mais toujours pas de noms. Les visages sont de plus en plus distincts. Des fois je croise des membres de mon clan en ville: c'est familier. Je vais à la bibliothèque emprunter des rouleaux, je me documente un peu sur le passé. Et pour ce qui est du présent les rumeurs de la ville nous tiennent bien au courant. La politique en revanche je trouve ça un peu complexe, mais je me dis que ça ne vient pas forcément de mon amnésie: peut-être que je n'ai jamais aimé ça.

Chez Tani je m'occuppe souvent du ménage et du jardin. Ses vieux membres la font souffrir, mais je la soupçonne d'en rajouter un peu. Ce n'est pas si grave au moins comme ça les jours sont plus courts. L'hiver approche alors les horaires de vente des herbes ont été raccourcis. On travaille quelques heures dans l'après-midi. C'est suffisant maintenant, on a de bons clients réguliers... Ca me laisse du temps à moi. Je fais un peu d'exercice dans le jardin, il parait que je suis agile. Je vais beaucoup me promener aussi.

Je suis allée chez Doji Aiko presqu'une dizaine de fois. Chaque fois j'arrive, je prépare la boisson dans la cuisine et la jeune femme parle dans mon dos. Elle s'ennuie beaucoup je crois, ça se sent derrière ses paroles maniérées. Je croise des fois des artistes quand j'y vais mais elle n'a pas l'air de s'être spécialement amusée quand ils repartent. Je n'ai pas encore vu son époux. Il n'est pas revenu depuis que je suis ici j'ai l'impression. Elle, elle continue à prendre son remède, et à m'observer comme un animal en cage.

Je dois y aller aujourd'hui. J'arrive en début d'après-midi comme d'habitude. Le serviteur m'ouvre la porte et je vais toute seule à la cuisine. Je fais ce que j'ai à faire. "Tu veux boire quelque chose Kitoku?" "Oui". Doji Aiko fait signe à une domestique et se dirige vers le jardin. Je lui emboîte le pas. La jeune épouse trébuche devant moi, je m'élance et la rattrappe. Elle est très maladroite, elle fait tout tomber, souvent elle-même. Je me demande qui la suit tout le temps quand je ne suis pas là, c'est une catastrophe ambulante... Une fois remise debout je fais quelques pas en arrière, elle continue à avancer.

Elle s'assoit sur un petit banc de bois près d'une table basse. Elle porte un gros manteau clair, le temps commence à être un peu frais maintenant. Elle me fait signe, je m'assois par terre en face d'elle, près de la table. La domestique apporte du thé fumant. Silencieusement je la sers puis me sers moi-même. J'attends qu'elle parle. Elle parle beaucoup. "Mon mari doit arriver dans quelques semaines, j'espère que tes herbes marcheront..." Elle sourit. Ca n'arrivait pas souvent. Elle me dévisage, mais j'ai l'habitude. "Tu sais bien boire le thé... Habilement et joliemment je veux dire." Je ne dis rien, comme toujours. "Tu n'es pas bavarde." Nous finissons notre thé en silence.

Un miaulement se fait entendre. Je me retourne vivement. Doji Aiko a un petit chat blanc. Un petit chat, c'est assez rare pour être souligné. Il s'appelle Yuki (neige), ce n'est pas très original pour un animal si singulier... Mais c'est comme ça. Moi j'aurais fait un effort, je ne sais pas je l'aurais appelé Petit glacier d'hiver qui enchante mes journées... Ca l'a fait rire quand je lui ai dit ça la fois dernière. C'est vrai que Neige, c'est plus court. Il est dans l'arbre, très haut d'ailleurs, il a l'air d'être coincé. Doji Aiko affiche une mine angoissée. Elle semble hésiter "Je vais appeler Hei il va nous aider." Mais elle ne fait rien. "Vous voulez que je le fasse?" proposais-je. Elle a l'air d'accord. Je pose ma tasse et me relève. Toujours cette désagréable impression quand je lui tourne le dos. Je retire mes sandales devant le tronc sec et je remonte ma tunique sur mes cuisses. Je monte à l'arbre. Il est sacrément haut ce foutu chat. Après quelques crachats désapprobateurs j'arrive à attrapper Yuki. Je regarde en bas et je souris à Aiko. Elle s'est levé et me regarde attentivement.

La branche casse. Je n'aurais pas cru. Tout se passe très vite. J'arrive à saisir une branche mince de ma main gauche, qui se brise à son tour. Dans ma chute j'essaie de me rapprocher du tronc mais tout ce que je vois c'est que je me rapproche du sol. A à peine deux mètres je trouve enfin un point d'appui et je peux rectifier ma trajectoire. Après un saut assez hasardeux, et juste quelque secondes après le début de ma dégringolade, j'atterris sur mes pieds. Je sors un Yuki tout hérissé de ma tunique, je ne me rappelle même plus l'avoir mis dedans et le pose à terre. Je me redresse pour regarder la jeune dame. Elle sourit franchement cette fois. A croire qu'elle attendait ça depuis longtemps.

"Qui es tu?"
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Message par Hida Koan » 09 juil. 2006, 11:39

De la vapeur s'échappe de la théière. Les petits gateaux secs sont appétissants. Yuki est sur ses genoux. Elle me regarde. Elle a l'air de bonne humeur. La décoration de ce petit salon que je n'avais jamais vu me surprend. C'est raffiné, c'est beau. Ca me change de ce que je vois chez Tani mais ça me rappelle des choses aussi. Elle n'a rien ajouté depuis tout à l'heure elle me regarde juste de manière insistante... Pour changer. Elle renvoit la domestique.

"Qui es-tu?"

La question résonne dans ma tête comme un echo lointain de mes propres interrogations. Si seulement je le savais je ne serais pas là à faire la vendeuse d'herbes demeurée.

"Je ne pense pas que tu sois touchée par les kami . Tu ne parles pas beaucoup mais tu joues un rôle, ça se voit. Tu ne te déplace pas comme quelqu'un du peuple et tu as des réflexes trop habiles Kitoku. D'ailleurs je ne pense même pas que tu te nommes Kitoku."

J'ai des suées mais je ne dis toujours rien. Que dire? Je n'ai pas ces informations en ma possession... Et qui plus est je ne suis pas persuadée que cette femme m'aiderait. Je ne la connais pas.

"Mais en ayant retourné toutes les possibilités dans mon esprit je crois aussi que tu ne me veux pas de mal. Sinon ce serait déjà fait... Et qui voudrait du mal à une courtisane du clan de la Grue perdue en terres Phénix à attendre chaque jour son mari voyageur? A moins que je ne sois à l'heure actuelle en train de mourir à petit feu avec un poison de fertilité. "

Mon regard se fit plus dur.

"Je n'affirme pas cela. Pour tout te dire j'ai fait analyser ce que je bois chaque jour. Et un médecin me suit de très près également."

Je ne sais plus où me mettre. Je sens que je devrais partir mais je reste.

"- Alors... Tu ne dis toujours rien? Bien. Laisse moi faire des hypothèses alors. Tu n'es pas du clan de la Grue, je l'aurais senti. Tu n'es pas du clan du Phénix tu regardes tout le monde ici avec des yeux ahuris. Il apparait comme évident que tu n'appartiens pas au clan du Crabe, et du Dragon encore moins. Rien ne m'empêcherait de penser que tu es du clan de la Licorne mais je n'y crois pas. Lion? Non... Trop simple. Scorpion donc. Je me trompe? Qui es-tu?

- Je ne sais pas."

C'est à son tour de devenir rouge comme une pivoine.

"- Tu essaies de me tromper" dit-elle calmement. "Je suis sûre de ton origine alors j'ai gagné ce jeu. Dis moi qui tu es maintenant, tu me le dois.

- Je ne sais pas.

- Je te vois tous les trois jours depuis presqu'un mois si tu n'étais qu'une simple heimin je m'en serais rendu compte. Tu es du clan du Scorpion tu ne peux pas le nier. Pour qui me prends-tu? Crois-tu que le mariage m'ait rendue aveugle et bête?! Crois-tu que tu puisses berner si aisément un courtisan du clan de la Grue?!

- Je n'insinue rien de tel madame, je déclare juste sollenellement sur mon...

- Déjà je vois que tu changes ton discours! Tu sais donc parler! Je le savais! Tu te fichais de moi depuis des jours alors!" me coupe-t-elle, paraissant pour la première fois excédée.

Je me lève brusquemment et lui coupe la parole à mon tour. Moi aussi je peux monter le ton.

"JE NE SAIS PAS QUI JE SUIS! Je présume ardamment depuis des mois que je suis effectivement originaire du clan du Scorpion. Cependant je ne me rappelle de rien, je ne connais même pas mon propre nom! Je ne vous mens pas, je ne me permettrais pas! Je me suis réveillée à la fin du printemps sur le bord d'une rivière non loin d'ici, dans un kimono rouge et c'est tout ce dont je me souviens!"

Je continue alors qu'elle écarquille ses grands yeux: "Que voulez-vous que je dise alors que mon esprit est si embrumé?! Je ne sais pas plus que cela! Maintenant je vis comme ça, que puis-je y faire?! Je glane des informations à droite à gauche mais rien ne m'aide à révéler la vérité! Voilà où j'en suis Doji Aiko-sama!" finis-je dans un souffle.

Elle reste stoïque, assise par terre, devant son thé. Toute rougeur a disparu de son teint de porcelaine. Yuki a eu peur des éclats de voix. A la fin de ma tirade un garde Daidoji a ouvert le shoji. Aiko l'a renvoyé rapidement.

"- Tu es amnésique?

- Je viens de vous le dire.

- Bien. Tu peux disposer. Reviens dans trois jours, je serais à court de remède."
Dernière modification par Hida Koan le 09 juil. 2006, 15:34, modifié 1 fois.
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Message par Hida Koan » 09 juil. 2006, 12:05

Le serviteur m'ouvre la porte comme d'habitude. Je vais dans la cuisine et je prépare le remède. Je suis partie un peu tendue tout à l'heure... Turakamu l'a remarqué, il m'observe avec des yeux bizarres depuis trois jours. Je crois qu'il a vu que j'étais perturbée. "Bonjour, Kitoku-san. Avez-vous mangé du riz aujourd'hui?" Je me retourne et je la vois, elle est rayonnante. Elle a tressé ses cheveux, on dirait une enfant. "Quand vous aurez fini venez au petit salon s'il vous plait."

Je pose le flacon sur une étagère et nettoie la table. La domestique me donne un plateau avec un théière fumante et des gateaux. "apporte ça tant que tu y es." Le shoji du petit salon est entrouvert, j'entre dans la pièce. Doji Aiko est affairée autour d'un tas de papier et de monceaux de chiffons il semblerait. Elle tourne la tête et me sourit, comme si l'altercation que nous avions eu n'avait jamais eu lieu.

Elle soulève un vêtement. "C'est mon kimono de mariage. Je l'ai fait retouché pour qu'il soit moins froufroutant. Il est rouge. Je pense qu'il t'ira bien." Elle s'approche et tient le superbe ouvrage devant ma sihouette. "Oui, oui, ça ira, il est à ta taille on dirait, nous sommes du même gabarit." Elle le jette sur la table et farfouille un peu encore."Tiens ça c'est mon obi noir. Il est beau non? Ca ira très bien avec le kimono." Elle jette aussi la pièce de soie sur le tas de vêtements de luxe. "Et ça ce sont les sandales. Si tu es bien proportionnée, comme moi, tu devrais avoir de petits pieds. Ca devrait aller aussi."

Je reste abasourdie, à l'entrée, avec mon plateau dans les mains. Elle a l'air d'une enfant avec une poupée. Elle à l'air de vivre au moins... Je ne l'ai jamais vu comme ça. Je la sors de sa routine ennuyeuse je crois. Si c'est bien de l'aide qu'elle va m'apporter, elle ne tiendra qu'à un fil. Il ne faudrait aps que je sois relayée au placard apr un jouet plus nouveau. Elle me fixe, concentrée "Il faudra voir pour tes cheveux aussi. On ne peut pas laisser ça comme ça."

Elle continue de marmonner. Elle se retourne et me dit distraitement de poser le plateau. "Oui... Il ne reste que ça... Plus que ça et ce sera fini..." Triomphante je la vois se précipiter vers moi à petits pas et me tendre un objet dans du papier de soie. "C'est pour toi!" Je me dis que son entrain frôle l'hystérie... "Allez, ouvre-le!" C'est un masque en porcelaine. Il s'arrête juste au dessus des lèvres et monte jusqu'à la racine des cheveux. Il est de la couleur des masques en bois rouge. Un dard en filigrane doré court sur la joue droite.
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