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par Pénombre » 30 janv. 2010, 11:30
1/ Comment voyez-vous l'organisation de la contrebande pour le clan de la grue? Sachant qu'il s'agit d'un des clans les plus riches en koku de Rokugan et qu'ils peuvent à priori se procurer n'importe quoi de façon légale, je vois mal pourquoi le clan se mouille dans la contrebande.
Tout d'abord, les Chiens de Meute sont la branche "opérations spéciales" des dirigeants du clan. Grosso modo, leur chaine de commandement passe par le chef de famille des Daidoji pour arriver jusqu'au champion de clan.
La famille Daidoji est impliquée dans le commerce (et la contrebande...) mais ce sont les fameux "cartels daidoji" qui s'en occupent. Notamment, c'est la famille vassale Hiramichi (Secrets of the Crane, p.32) qui contrôlent toute cette partie des activités Daidoji. Le chef de famille Daidoji est généralement un bushi et laisse les Hiramichi s'occuper de ce genre de détails.
La contrebande des Daidoji concerne plusieurs domaines : d'abord, malgré l'embargo commercial entre les Yasuki et le clan de la Grue, les Daidoji sont bien obligés de tenir compte de cette puissance économique dans le sud de l'Empire - qui contrôle par exemple Sunda Mizu Mura et la majeure partie de la Baie des Poissons Morts, un port majeur vers les iles de la Mante. Nuire aux magouilles Yasuki légales ou non occupe déjà pas mal les Daidoji.
Ensuite, les articles de contrebande sont souvent intéressants pour les élites, et par leur biais, les Daidoji ou leurs cousins Doji les moins scrupuleux peuvent gagner des faveurs intéressantes.
Localement, pour déstabiliser un daimyo de province par exemple, il peut être utile de saturer les marchés locaux de produits concurrençant ceux des producteurs qui payent l'impôt à ce daimyo.
Il y a aussi quelques denrées totalement illégales mais qui peuvent intéresser les Chiens de Meute, justement. Comme la poudre noire... dont la fabrication est difficile et le commerce interdit, mais que les Ide importent aussi en douce.
Enfin, la contrebande, ce sont des bénéfices qu'on ne déclare à personne. Quand on considère l'honneur moyen du clan de la Grue (entre 2.5 pour la plupart des Daidoji et 3.5 pour les gars des autres familles...), un certain nombre de gens dans le lot ne sont certainement pas aussi vertueux. Mettre de la tune de côté qu'on n'a pas besoin "d'oublier" de déclarer dans les impôts parce qu'elle n'existe pas...
Quand on lit la description des Hiramichi, il est clair que la contrebande est en fait perçu non pas comme un outil commercial mais avant tout comme une arme politique. Elle permet de déplacer des marchandises pour modifier certains équilibres locaux sans qu'on puisse accuser le clan de la Grue, d'obtenir des faveurs, de se tenir au courant des activités illégales des autres clans dans le domaine commercial et plus généralement, à travers qui achète quoi à qui, dans le domaine criminel, etc... l'argent et les bénéfices sont un bonus appréciable, surtout intéressant dans la logique que tout ce fric là, c'est autant de moins dans la poche des Ide, des Mantes ou des Yasuki...
2/ Quels sont les marchandises qui sont supposées être vendues en sous main sur les terres du clan de la grue et celles exportables sur les terres des autre clans?
La plupart des choses qui sont l'objet de contrebande ne sont pas à proprement parler illégales mais surtout réglementées. Pense à la contrebande de CD, ou de cigarettes, ou d'articles de luxe chez nous. Les denrées circulent, les matières premières sont transportées, transformées en outils ou en vêtements ou en armes, revendues, etc... chaque clan obtient un surplus de ressources en taxant les marchandises qui proviennent des autres clans, dans une complexe danse où il s'agit de faire le maximum de bénefs tout en ne décourageant pas les importations de ce dont on manque (ou que l'on peut revendre, ou que l'on se contente de laisser passer sur ses terres vers un clan de l'autre côté...). Quand on voit la carte de l'empire, on est loin du schéma de la mondialisation moderne : on sait vite avec qui ont peut commercer et la concurrence n'est pas terrible. Donc, les taxes sont en fait assez élevées car chaque clan sait que ses voisins ont peu de marchés en dehors de ses propres frontières, et inversement. Ces taxes, personne n'a envie de les payer à son voisin. Et même de l'autre côté, chez le voisin, elles se répercutent sur le prix de vente des denrées ou produits importés. Donc, plein de gens se disent que si cet argent (ou ces tonneaux de saké, ou ces ballots de riz) pouvait ne pas être versé à quelqu'un, ça serait toujours mieux pour eux. Les plus "honorables" se disent que cet argent qu'ils ne payeront pas pour l'exportation, il sera versé à l'empereur dans les impots, ou servira aux infrastructures locales, pour faire des choses utiles à la population, donc, générant plus de satisfaction et de richesses. Les autres se disent que cet argent qu'ils pourraient économiser discrètement, ben ils peuvent le garder pour eux-mêmes. Ou, éventuellement, qu'il peut constituer une réserve appréciable en cas de conflit, ou s'il est nécessaire de faire appel à des gens "particuliers", etc...
En bref et en clair : l'essentiel des volumes de contrebande ne concerne pas les articles illégaux mais les articles sur lesquels on ne veut pas payer de taxes et pour lesquels on a calculé qu'en termes de volume, ça serait plus économique de courir le risque de voir des sous-fifres attrapés que de passer à la caisse. Comme le clan de la Grue a un pouvoir qui repose sur deux choses : le contrôle de la majeure partie des terres fertiles et du littoral ainsi que le jeu des faveurs politiques, il peut difficilement se permettre d'ignorer ces mouvements. Non pas que la plupart de ses membres s'y intéressent pour eux-mêmes, ou souhaitent faire de l'évasion fiscale... mais il y en a quelques uns, et surtout, il y a ceux qui se disent qu'en surveillant tout ça, ils peuvent aussi exercer dessus un certain contrôle. Notamment, le jour ou le clan déclare un embargo contre un ennemi, le fait d'avoir un certain contrôle sur les réseaux de contrebande peut justement réduire la marge de maneuvre de cet ennemi qui déciderait d'y recourir pour contourner l'embargo...
3/ Le joueur souhaite jouer un bon vivant proche des heimins et parler dans les maisons de thé ou de jeu de ses aventures en tant que contrebandier de façon assez libre. Il compte sur moi pour lui fournir des anecdotes sur ses éventuels exploits ou mésaventures précédentes.
Je pencherais pour non. Les murs ont des oreilles et raconter ces histoires me semblent délicat.
Y-a-t-il des circonstances spéciales sur lesquelles le joueur pourrait librement s'exprimer sur ces sujets avec des heimins ou des amouraïs?
Non, sinon, il n'a rien d'un agent secret... surtout qu'il va se promener avec le mon Daidoji et qu'il a une existence tout à fait officielle. Cependant, à L5a, il y a une grosse nuance bien utile : l'allusion. Même si certaines déclarations semblent cousues de fil blanc, tant qu'elles ne sont pas trop explicites ou franches, elles peuvent passer. Mais c'est un jeu dangereux, parce qu'on trouve souvent quelqu'un d'assez subtil pour te piéger avec tes propres allusions en te forçant à dévoiler ce qu'elles cachent. Cependant, l'art politique et la courtoisie sur lesquels reposent le système sont justement basés sur l'idée que - par exemple - tant que tu n'es pas pris à insulter l'autre qui pourrait alors demander réparation, tout est bon pour le descendre en flammes mine de rien. Par exemple...
Donc, pour nuancer ce que je disais, "non, il ne peut pas se vanter de ses exploits qui n'ont rien d'honorable, car il perdrait la face, mais il peut jouer sur l'ambiguité de ses propres mots et les autres font de même". Ainsi, par exemple, quand deux chefs de caravane Daidoji et Yasuki se croisent dans un relai, ils papotent, ils échangent des potins "sans importance", ils se vantent, ils se dénigrent, mais tout ça par allusions, ou en contournant le problème : je ne parle pas de moi mais je dis que j'ai entendu parler d'un type dont je ne connais pas le nom qui aurait dit ceci, ou qu'il parait qu'un inconnu aurait fait cela, etc... ca peut donner des discussions d'autant plus intéressantes que tout le monde comprend parfaitement ce qui est dit, même les gens autour, mais que personne ne peut rien dire parce que ce ne sont que des allusions et pas des déclarations.
Au niveau des cours, on procède pareil, mais souvent on s'échange des poèmes improvisés en guise de conversation. Même si bcp de courtisans comprennent le sens de ces poèmes, tant qu'ils ne sont pas trop limpides, on peut prétendre qu'ils ne signifient rien.
Après, ça ne change rien au fait que les murs ont des oreilles et que ce que tu dis pourra être utilisé contre toi... pas forcément officiellement, mais bon, quand tu comprends ce qui se passe et que tu as intérêt à le perturber, les possibilités ne manquent pas...
Des discussions franc du collier, dans un coin isolé, sont toujours possible. Et puis, on se croit souvent plus subtil ou impénétrable qu'on ne l'est, donc, on en laisse souvent échapper plus qu'on ne croit. Mais disons que pour l'essentiel, un chien de meute ne se vante pas, surtout vu sur quoi reposent ses activités. Mais il laisse entendre qu'il aurait entendu parler de gens qui... ou il ne dit rien et laisse les autres interpréter certains de ses actes, ou il prétend qu'il "passait là par hasard quand il a vu ça" et trucs du genre.
4/ Concernant son obligation à 4 points, je sèche un peu. J'aurais souhaité que vous m'aiguilliez un peu s'agissant de ce désavantage. Je le vois évidemment comme une intrigue secondaire/ voire principale au long cours pour le perso. Mais je ne veux pas l'associer à sombre secret. Apparemment s'il ne s'acquitte pas de cette obligation il "gagne" le désavantage brebis galeuse au sein de sa famille ou clan et perd de l'honneur. Je ne vois pour l'instant pas très bien comment l'associer au reste.
Les Chiens de Meute servent plus pour des opérations militaires que pour de la contrebande. On a pas besoin de "ninja" pour faire de la contrebande : on a besoin de heimin qui fermeront leur bouche, de quelques hommes de paille et surtout de contacts de l'autre côté de la frontière. A priori, les occasions d'aller farfouiller dans les papiers des magistrats, d'espionner des conversations ou de saboter des caravanes rivales sont relativement peu nombreuses. Même s'ils sont concurrents, tous les contrebandiers savent qu'ils ont comme intéret commun d'être le plus invisibles possible.
Donc, à la base, si le champion de la Grue ou le chef de famille Daidoji considère qu'il doit y avoir un chien de meute impliqué dans la supervision (locale ou générale) des activités de contrebande, c'est qu'il faut que ses talents particuliers soient utiles. Et si ça représente l'essentiel du passé du personnage, ça veut dire que ses talents sont plus souvent utiles qu'ils ne le devraient dans ce genre d'affaires. Si déjà tu creuses le "pourquoi je charge mon james bond de surveiller des caravanes et des garde-frontières", tu as plein d'intrigues plus ou moins durables possibles : il peut en fait être chargé de surveiller un des responsables Daidoji des cartels, parce que ses supérieurs ont des doutes sur sa loyauté, ou qu'il fait des trucs bizarres. Il peut s'agir d'une opération à long terme visant à identifier l'ensemble d'un réseau adverse et de frapper pour le faire disparaitre, mais un seul coup décisif. Il peut s'agir d'une mission de longue haleine alors qu'on a constaté que depuis quelques mois, les autorités et les bandits semblaient un peu trop bien renseignés sur les activités du cartel Daidoji, etc... à mon sens, ta difficulté est là : comment insérer le personnage et ses enjeux avec le reste du groupe et ce que tu comptes leur proposer, sans que ça tourne autour de lui mais qu'il ait objectivement intéret à les accompagner parce que ça devrait lui donner le moyen d'avancer ses propres plans, ou au moins de prétendre "passer dans le coin pour une autre raison". En fait, l'idéal, ça serait d'en faire à mon avis une sorte de "clarificateur" : le chef de famille Daidoji sait que ses subordonnés des cartels nagent souvent en eaux troubles, comme je viens de le montrer. Avoir quelqu'un qui - sans le leur dire - pourra leur éviter certains excès ou découvrir leurs agissements les plus douteux et faire un rapport à qui de droit, ça peut être utile. De fait, l'histoire du clan de la Grue a deux belles anecdotes qui induisent ce genre de surveillance :
- la défection des Yasuki, justement.
- la naissance de la famille vassale des Katogama (Doji) à la suite de la trahison de Yajinden. Les Katogama qui sont le plus souvent magistrats ou courtisans sont en fait chargés de surveiller le clan de la grue de l'intérieur, pour le compte du champion.
Ainsi, le personnage aurait à la fois un rôle proactif (neutraliser certaines menaces extérieures) et réactif (surveiller les agissements de ses propres parents). Et là, c'est au joueur de faire preuve de finesse pour avoir l'air digne de confiance tout en ayant des choses à cacher à ceux qui penseront savoir qui il est parce qu'ils se servent parfois de lui pour neutraliser un concurrent.
Mais il a intérêt à se présenter à ses propres cousins Daidoji comme "un bushi un peu pragmatique". JAMAIS comme un chien de meute. Peu de gens savent qu'ils existent, même au sein du clan, et ceux qui sont au courant savent TOUS que les chiens de meute sont les agents non pas de la famille Daidoji ou du clan de la Grue mais du chef des Daidoji et du champion du clan... ils ne sont qu'une poignée et ils ne répondent qu'aux plus hautes autorités du clan, secrètement en plus. Rien que ça, ça permet déjà de donner pas mal d'occasions à ton joueur de faire de l'équilibrisme...