La Voix De Rokugan

- Ah oui ? L'homme que je connais est plus connu pour ses talents de déguisement, pas pour jouer les monte-en-l'air. Cela étant, quand je disais que je pouvais me renseigner, je voulais bien sûr dire que la plupart de mes informateurs étaient morts et que c'était très difficile.

- C'est dommage alors, quand je disais que je ne voulais pas tout savoir, je voulais bien sûr dire qu'on était actuellement dans une traque activé de toute contrebande ou recel. Dans la situation si précaire dans laquelle se trouve votre ville, qui se remet à peine du cataclysme, on ne peut rien laisser passer. C'est affreux de ne pas arriver à s'entendre avec tour le monde, surtout quand chacun a à y gagner.

- Et vous voudriez pas que je vous dise pour qui je travaille, non plus ? Comme ca vous pourriez épingler tout le réseau et pas juste des extrémités.

- Si vous y tenez, dit-elle en rigolant, c'est ma journée, je devrais jouer au tripot vous ne croyez pas ? Je pourrais parier de l'argent. Je ne vois pas trop combien par contre, je ne sais pas à quel point je suis en veine.

- Non, vous n'êtes pas particulièrement en veine. Et vous ne devriez pas vous frotter aux jeux de hasard. Vous êtes une ancienne Garde des Eaux moins corrompue que la moyenne qui a accédé à des responsabilités auxquelles elle ne comprend rien.

Il avait fini son verre - et celui de Kei, en fait, avant de commencer sa tirade et il la regardait d'un oeil égrillard.

Kei se leva, posa deux zeni sur la table, remercia l'aubergiste qui n'avait pas été si désagréable que ça et sortit. Sans rien dire à ce connard de vétéran. Elle en avait assez de se faire traiter comme de la merde, encore plus par un pilier de bar pourri. Tant pis. Elle trouverait bien un moyen d'apprendre quelque chose et lui elle se rappelerait de son visage. De toutes façons il était tard, il valait mieux rentrer.

Elle commença à descendre les escaliers, suivi de Matsusuke, qui ne pipait mot. La petite barque était à quelques pas.

Il allait voir. Elle irait voir la Garde, pour le faire arrêter et qu'il crache le morceau.

Ouais... Tu vas chouiner à ton mari quoi...

Elle n'avait pas vu ça comme ça... Mais ne pourrait certainement plus jamais le voir autrement. Par les kami se dit-elle, je vais devenir celle qui ne fait rien et qui va se plaindre à son époux au moindre problème.

La barque s'approcha alors qu'elle se rongeait les ongles. Le passeur approchait en tenant sa perché. Il avait déjà allumé une petite lanterne car la nuit tombait rapidement.

Elle remonta les escaliers aussi sec en sortant son sabre, elle buta dans deux de ses gardes, manqua de tomber à la flotte et reprit miraculeusement l'équilibre. Elle rentra dans l'auberge une nouvelle fois le katana au clair et se rua sur le vétéran.

- Tu parles maintenant ou on t'embarque. Et si tu m'insulte encore je te fais sauter une oreille.

Elle préférait encore finir rossée que fermer sa bouche, aussi crétine soit-elle.

Le type était resté sur son tabouret. Il n'avait pas bougé d'un cil quand elle avait enfoncé la porte et s'était précipité vers lui (alors que la salle se vidait d'un coup).

- Par les c*** de Hida, c'était plus calme avec Toroboshi. Embarquez-moi et ranger ce sabre. Vous pourriez vous blesser.

Son regard gris était calme comme la baie en hiver.

Elle ne rengaina pas.

- C'est une insulte ça !

- Mais non ! N'importe quoi !

Bleue faisait son grand retour, toute d'inquiétude vêtue.

- Bah ça y ressemblait vachement quand même répondit Rouge, un peu moins sûre.

- Mais non ! C'était juste un ton paternel...

- Debout. On y va.

Elle ne vit pas son bras partir, ni d'où pouvait bien sortir le jitte. Mais elle sentit son sabre lui échapper des mains et entendit (crut entendre ?) le bruit des planches dans lesquelles il se ficha. Par contre, elle sentit bien le poing qui heurta sa joue droite, et le sol qui heurta son bras gauche.

Ses gardes eurent à peine le temps de lever les bras qu'ils étaient emportés par deux tables - et les coups de pieds qui étaient derrière.

- Bon, maintenant que les choses sont claires, j'accepte votre invitation à venir continuer cette conversation dans votre bureau, avec du vrai alcool. Ou alors je continue les baffes.

Il lui tendait une main chaleureuse. Enfin, au moins caleuse.

Elle prit sa main, se releva bien vite en se servant de son aide et de ses jambes à elle mais ce fut pour ne pas s'arrêter du tout et lui mettre un gros coup de boule... Qu'il esquiva plutôt très bien... Et en lieu et place de (re)casser un nez qui en avait vu d'autres, le front de Kei s'écrasa sur son arcade sourcilière qui pissa le sang. Elle recula d'un bond assez agile ne sachant plus vraiment ou se tenir tant elle avait mal au bras, à la joue et maintenant au front. Elle aurait sûrement un bel oeuf demain, presque entre les deux yeux.

Instinctivement elle se mit en garde, la garde étrangement tordu de la boxe de l'homme ivre (ce qui lui allait plutôt bien d'ailleurs vu ce qu'elle venait de se manger)... Et ne fit rien.

- On peur y aller alors... Et on a du koshu 12 ans d'âge au dojo...

Il éclata de rire.

- Vous êtes sacrément chiante, comme fille. Vous seriez la mienne je vous aurais roué de coup pour votre fichu caractère. Bon, allons-y.

Il récupéra juste des compresses derrière le bar (l'auberge avait dû en voir d'autres, elle aussi) et tamponna son front. Il dégagea son sabre d'un coup sec et le lui rendit ; elle put se rendre compte que ses jitte étaient en fait des sai - plus rapides à sortir et rangés non dans sa ceinture, mais à travers des ronds de métal - ça devait être sacrément rapide. La preuve.

Cahin caha, ils prirent la barque avec des soldats un eu estomaqués et qui le regardaient avec des éclairs de meurtre, et finirent par atteindre le dojo.

- Vous seriez mon père j'aurais de sacrées envie de parricide... Marmonna-t-elle.

Après cet après-midi pas terrible, elle préférait presque ce qui venait de lui arriver. Au moins l'adrénaline lui faisait penser à autre chose. Les coups aussi d'ailleurs.

Son bras allait déjà bien mieux quand ils arrivèrent à la garnison ouest. Elle fit appeler deux gardes supplémentaires en passant la porte. Ce serait moche que ce fou pète un plomb et qu'on ne puisse pas le maîtriser. Enfin au moins maintenant ses gardes du corps étaient prevenus, et elle aussi. Elle demanda à un coursier d'aller chercher une bouteille au dojo et lui remis un petit papier avec son sceau. En attendant elle se débarbouilla et fit un rapport succinct.

- Vous tenez audience chez la garde grise ? J'aurais cru que vos bureaux étaient un poum plus haut.

- Y'a plus de Garde Grise, y'a que la Garde de la ville, et ici on est en ville. Puis si un de vos hommes s'introduit dans le Dojo sur les ordres de je ne sais qui, que ça pourrait bien être vous, je vois pas pourquoi moi je vous y ferait rentrer sans que vous vous fouliez