Dis moi, tu es plein d'interrogations métaphysiques en ce moment. Tu préfères pas envisager une campagne de Woodstock & Bisounours
Plus sérieusement, ça dépend des attentes de tes joueurs, vis à vis de l'univers. Est ce qu'ils ont besoin que leurs persos accomplissent des trucs personnels ? est ce qu'ils veulent changer les choses au niveau local ? est ce qu'ils veulent changer le monde ?
S'agit pas de leur donner tout ça, mais de leur permettre d'en obtenir des morceaux tout en les faisant payer le prix fort. Ne pas oublier, aussi, que dans un univers cyberpunk, un personnage peut s'en sortir et même réussir individuellement, mais que ça ne change pas forcément la donne pour les autres, ou pour le monde en général.
Puisque tu connais tes classiques, prends un truc comme le roman "Cablé" de Walter John Williams : les protagonistes principaux (Cowboy et Sarah) ne changent pas fondamentalement le monde, ni n'obtiennent de garantie concernant leur avenir perso (sans parler de leur relation). Mais ils ont dézingué un beau salaud, et ils ont parcouru plusieurs pas dans des directions importantes pour eux. Ils sont donc bien "gagnants", même si cela ne correspond pas à leur idéal, et que la plupart des épreuves qu'ils subissent leur sont imposées, ils arrivent à survivre à leurs rêves sans être (trop) amochés parce qu'on leur a brulé les ailes, et en ayant quelques petits lots de consolation.
En fait, en dehors des foules qui vivotent, il y a des gens heureux et satisfaits de leur sort dans les univers cyberpunk. La différence, c'est que les protagonistes ne sont pas des moutons (qui refusent de regarder en face le prix qu'ils payent dans l'espoir qu'on les laisse tranquille) et qu'ils considèrent qu'il faut se démener pour s'en sortir, c'est à dire pour vivre quelque chose qui te parle plus que la misère ambiante ou le bonheur formaté réservé à certaines catégories de gens. Ils ont peu de chances d'y arriver, mais c'est encore possible. Ce "bonheur" n'est pas forcément définitif, mais il est envisageable. C'est parce qu'il l'est qu'ils s'y accrochent, le plus souvent.
Maintenant, ils peuvent réussir sans que cela change quoi que ce soit pour celui qui essayera demain. Le monde peut ne même pas remarquer leur passage. Ou l'influence qu'ils ont sur lui échapper à leur contrôle et leurs intentions (Le fait que Case - le protagoniste principal - libère Muetdhiver, dans Neuromancien, par exemple...). En fait, toute réussite implique à la fois d'arriver à gérer le prix que tu sais qu'elle te coutera, et tout ce que tu n'as pas pu prévoir par ailleurs...
De fait, quand ils réussissent, bcp de personnages du genre cyberpunk peuvent se demander si ça en valait la peine. Est ce qu'ils ont obtenu quelque chose de si important, ou juste un moment de paix et d'espoir sans garantie aucune, ou juste un sursis alors que tout s'effrite...
Par rapport à tout ça, c'est je pense à toi de savoir bien cerner les attentes de tes joueurs, et de se débrouiller pour qu'ils puissent progresser, mais que cela génère toujours son lot d'imprévu. Evite de leur brûler trois fois de suite l'atelier, ça fait peut-être très "cyberpunk" mais ça fait surtout très con de se faire marcher sur la figure trois fois de suite d'une manière aussi basique... donne leur aussi assez de corde pour pouvoir la serrer autour de leur cou et les maintenir sous pression quand tu en as besoin, mais c'est un peu comme le coup de "j'ai épousé la pnj topissime de la campagne et depuis, elle se fait kidnapper toutes les deux séances et subit des trucs vraiment moches". On peut trouver mieux comme enjeux. Les pnjs ne servent pas que d'otages ou d'amorces à scénario, ils viennent avec leurs propres problèmes et leurs propres espoirs, aussi.